Focus
De brefs articles qui reviennent sur une thématique, une notion, un événement illustrés par des films étudiés sur MedFilm…
Joël Danet, 20 March 2023
« Je ne vois pas, madame ! »
Les films sur la prise en charge des enfants atteints de troubles visuels.
Pendant une grande partie du XXe siècle, l'enseignement des aveugles est du ressort du ministère de la Santé (et non pas de l'Instruction publique). Quelques classes pour "amblyopes" sont ouvertes au sein d'écoles primaires de la Ville de Paris mais la plupart des aveugles restent cantonnés aux établissements spécialisés. Deux films rendent compte de cette prise en charge publique des enfants concernés, qui implique leur instruction et leur formation professionnelle.Produit en 1954 par le Ministère de l’Education Nationale, Clarté dans la nuit promeut les méthodes pédagogiques qui, grâce aux travaux de Louis Braille, permettent aux jeunes aveugles d'avoir accès à la diversité des disciplines de l'enseignement classique, à la culture artistique et la formation professionnelle. Produit en 1955 par la Banque des yeux, avec le concours des Laboratoires Rhône-Poulenc, Des enfants comme les autres décrit le fonctionnement d'une classe d'élèves amblyopes dans une école parisienne, puis évoque les différentes orientations professionnelles que leur permet cette instruction adaptée. Leurs réalisateurs, respectivement Pierre Neurisse et Pierre Zimmer, sont actifs dans le milieu du documentaire utilitaire et traitent de sujets divers par leurs films. Leurs choix de réalisation sont déterminés par les intentions du commanditaire. Ici, ils rassurent le public en montrant des enfants entourés, guidés, conseillés par un personnel enseignant. Dans la plupart des plans, ceux-ci apprennent auprès d’un référent adulte qui surveille le progrès de leurs gestes. De même, les deux films euphémisent la mise en scène du handicap. Les attitudes des élèves pendant un cours de sport ou une leçon de musique sont voisines de la normalité. Dans L’enfant aveugle qu’il tournera dix ans plus tard sur le même sujet, le documentariste Johan Van der Keuken s’attachera au contraire à souligner la spécificité plastique des jeunes corps mus sans regard.
Sur Medfilm :
- Clarté dans la nuit (1954)
- Des enfants comme les autres (1955)
Joël Danet, 17 March 2023
« Dans des rires ambigus, elle semble réclamer : "Fais-moi peur!.." »
Les films d’étude pédiatrique de Julian de Ajuriaguerra
Julian de Ajuriaguerra (1911-1993), neuropsychiatre et psychanalyste français s’est intéressé au film comme outil d’étude sur le développement de l’enfant. Il en réalise plusieurs durant ses années d'enseignement au Collège de France où il tient la Chaire de Neuropsychologie du développement de 1976 à 1982. Ces réalisations régulières, selon Julian de Ajuriaguerra, « doivent permettre de mettre en évidence les perspectives évolutives et comparatives du développement. »Elles se présentent de la façon la plus simple : une succession de rushes montrant l’enfant observé, entrecoupés de cartons sous forme de textes manuscrits ou tapuscrits sur une feuille blanche : « Emilie 19 mois, cache spontanément un jouet derrière son dos » ; « Julien 7 mois 21 jours, peut se débarrasser du foulard en posture assise ; chaque fois surpris, il partage ensuite le rire de l'adulte... ». Les tournages ont lieu dans des locaux pédiatriques ou dans l'intimité de la maison comme dans Jeux de coucou. Les plans sont toujours centrés sur l'enfant, y compris lorsqu'il est en interaction. Dans la bande son, pas de commentaire, mais les bruits ambiants et les voix des personnes présentes. Une expérience d’immersion au plus près du développement de l’individu enfant.
Ces archives filmiques sont détenues par l'Hôpital Sainte-Anne qui les a mises à disposition de Medfilm.
Sur Medfilm :
Christian Bonah, Joël Danet, 15 March 2023
« C'est un bruit râpeux, avec une sensation de raclement et de craquement de cuir neuf. »
La série « Cœur et vaisseaux » produite par les Laboratoires Boehringer-Ingelheim
Réalisés en 1974 par Eric Duvivier, les trois volets de la série « Cœur et vaisseaux » sont des exposés didactiques sur l’étude des bruits anormaux du cœur. Ils en établissent une typologie et en expliquent les origines, les caractéristiques acoustiques, la localisation. Cette série est destinée à actualiser les connaissances des professionnels de santé à un moment où la cardiologie tend à se développer en discipline à part entière. La réalisation de « Cœur et vaisseaux » reprend la tradition du genre du film didactique qui s’est épanoui dans les années 20 par les productions pionnières de Jean Brérault et Marc Cantagrel pour le compte de l’école, Jean Painlevé pour celui de la recherche scientifique.L’originalité de « Cœur et vaisseaux » réside dans son approche acoustique. Ses films sont ponctués d’enregistrements cliniques de bruits cardiaques correspondant aux différentes anomalies inventoriées. Ce choix de réalisation permet l’écoute approfondie, répétée et collective d’un son extrait de l’habitacle du corps. Elle le rend accessible au public au-delà du rapport direct et exclusif par le stéthoscope (aux résultats incertains pour les débutants). Le commentaire emprunte à la littérature pour imager les effets produits par les sons cardiaques. Le bruit dit « systolique » est « sourd, grave, prolongé » ; le bruit diastolique est « bref, sec, claqué ». A propos du frottement péricardique : « C'est un bruit superficiel râpeux, avec une sensation de raclement et de craquement de cuir neuf. » Une reprise des termes employés par Laennec lui-même.
Sur MedFilm : série Cœur et vaisseaux
Joël Danet, 24 January 2023
"Remarquons le calme et la sérénité de cette fermière…" : l'accouchement sans douleur et l’œuvre du Dr. Ploquin
Plusieurs archives Medfilm témoignent de l’action du Dr. Ploquin pour promouvoir sa méthode d’accouchement sans douleur auprès du plus grand nombre, hommes et femmes confondus. Max Ploquin, médecin gynécologue accoucheur, a débuté sa carrière comme médecin généraliste de 1959 à 1964. Avec l'aide de sa première épouse Nicole, alors sage-femme, il a incité les femmes enceintes du Boischaut à suivre une préparation théorique et pratique destinée à leur rendre la maîtrise de l'accouchement. Le Dr. Max Ploquin a ensuite exercé à la clinique Montaigne de Châteauroux. Sa devise était : « Accoucher ici comme à la maison ». La liberté de la mère était respectée, comme ses désirs : liberté de mouvement, de choix, de présence et d’accompagnement d’amis et familiers, de mode d’accouchement, d’alimentation, etc.Sur Medfilm :
- Tant d'amour (1970)
- Naissances sereines (1970)
Joël Danet, 23 January 2023
Louis Pasteur : mémoire, héritages
La démarche et les méthodes de Pasteur vues par les chercheurs d’aujourd’hui
Depuis le centenaire de sa naissance, le cinéma institutionnel célèbre son œuvre scientifique et la création de son Institut. Le film Pasteur, réalisé en 1922 par Jean Benoit-Lévy, avec le concours des figures du cinéma impressionniste Jean et Marie Epstein, retrace la vie du scientifique en insistant sur les bénéfices de son travail sur l’économie et la médecine. Il s’agit d’une adaptation du livre La vie de Pasteur, publié la même année, rédigé par René Vallery-Radot, gendre de Pasteur. L’émission pour la télévision scolaire diffusée en 1963, Louis Pasteur (avec la participation de Jacques Monod), ou bien le film L’Institut Pasteur aujourd’hui, produit en 1982 par l’Institut Pasteur, s’attachent à montrer comment la recherche actuelle reste tributaire de l’approche et des méthodes qui furent propres à Louis Pasteur.Sur Medfilm :
- Pasteur (1922)
- Louis Pasteur (1963)
- L'Institut Pasteur aujourd'hui (1982)
…
Joël Danet, 22 January 2023
Ne plus parler des jeunes, leur parler
le SIDA et la communication orientée sur la jeunesse
Dans Attention Sida, le comédien humoriste Michel Boujenah est montré dans son propre rôle, interviewé sur un plateau de télévision à propos du SIDA. Des jeunes, rassemblés devant un poste qui diffuse l’entretien, discutent entre eux, inattentifs à ses propos. Impatienté, Boujenah les interpelle : « Oh ! Le sexe, ça vous intéresse ? Et le SIDA, ça vous intéresse ? » Les jeunes, surpris, se taisent et leurs regards convergent vers le poste. Les voilà disposés à recevoir le message. Humour, présence de vedettes, langage décontracté, habillage clip… Tout est réuni pour parler aux jeunes selon leurs codes (registre de l’absurde, reprise de leur mode de paraître, registre de proximité du ton), et en tant qu’individus (« vous devez vous informer parce que vous êtes responsables »). De manière moins sophistiquée, d’autres spots et programmes contemporains sur le SIDA cherchent aussi à parler directement aux jeunes, avec le registre qui leur est approprié.Sur Medfilm :
- Attention SIDA (1987)
- Génération SIDA (1989)
- Le sida, tu ne l’attraperas pas (1991)
Joël Danet, 09 November 2022
" Today, the world of doctors remains terrifying and fascinating "
Igor Barrère and Étienne Lalou's medical programme: from surgical prowess to the doctor's everyday life
The medical program is the first health program on Radio Télédiffusion Française. Its life on the small screen is remarkably long: broadcast from 1956, it lasts until 1984. The intention of its creator, Igor Barrère, is to democratize medical discourse, open medicine to patients, hospital staff, professionals, show the progress of medicine and surgery. The first shows focus on surgical firsts and technological innovations. Over time, the inspiration of the content evolves, new themes appear: psychoanalysis, mental illness, birth control, family medicine (with the figure of the country doctor). The subjects resonate with new concerns within society. Returning to the adventure of the Mediales, Igor Barrère said in 1989: “Medical programs have become an institution. We started when medicine was still seen as witchcraft. Today, the world of doctors remains terrifying and fascinating. We have respected this myth, we have also helped to demystify it. »On MedFilm
- Le langage (1960)
- Médecins et ingénieurs (1961)
- Berck hôpital maritime (1964)
- Le jeu de la vie: l'hôpital psychiatrique (1964)
- Progrès de la médecine et responsabilité du médecin (1966)
- Attention... aux maladies vénériennes (1969)
- La virulence des virus (1973)
- Une autre médecine: le médecin généraliste (1974)
- Igor Barrère