Autoérotisme dans la première année de l'enfant (1979)
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Sommaire
Générique principal
À 02:00, deux cartons de générique sous forme d'écriture manuscrite au stylo sur une feuille de papier présentée à la caméra : "L'autoérotisme dans la 1re année de l'enfant - quelques aspects longitudinaux - 1979 / par - J. de Ajuriaguerra - M. (Marguerite) Auzias, Chargée de recherches INSERM - I Casati, Technicienne CNRS - D. Sechen, Technicien INSERM".
Contenus
Sujet
L’autoérotisme dans la première année de l’enfant : quelques aspects d'une étude longitudinale (qui suppose un suivi dans le temps pour établir les modalités d'une évolution depuis un point de départ caractérisé).
Genre dominant
Résumé
Ces images de recherches présentent une étude longitudinale, de deux bébés sujets, un garçon et une fille. Les séquences filmées présentées sont extraites de documents de travail, pris dans le cadre de diverses recherches, dont celles sur le mouvement spontané et les réactions liées à un stimulus sur le bébé. D’autres images ont été prises dans le cadre de scène de la vie quotidienne. Toutes ces séquences entrent dans « la notion d’érotisation infantile ».
Contexte
L'autoérotisme et le développement de l'enfant
Cette étude longitudinale portée sur l'autoérotisme chez l'enfant de 0 à 1 an est liée aux travaux menés au début du XXe siècle sur l'enfant et son développement. L'autoérotisme est une forme de manifestation de pulsion sexuelle. Sa particularité est qu'elle ne se dirige pas vers d'autres personnes, ou plus généralement vers des objets extérieurs, mais se satisfait dans le corps propre de l’individu. Cette notion freudienne est introduite dans le vocabulaire scientifique en 1898. Chez le psychanalyste Havelock Ellis (1859-1939), le terme désigne une excitation provenant du corps et ne répondant pas à un stimulus. Dans Les Trois Essais sur la théorie sexuelle (1905), Sigmund Freud (1856-1939) décrit l’évolution des satisfactions chez le bébé. Plusieurs stades ponctuent son développement. Le premier, qui concerne l’étude longitudinale ci-jointe, est le stade oral qui se manifeste dans la première année. Le plaisir provient de la sphère buccale, zone érogène, et liée à l’alimentation, à la tétée maternelle. Le premier stade oral est lié à la succion, puis il évolue en stade oral sadique, lié à la morsure. L’objet autoérotique de cette pulsion est donc le sein, et tout ce qui s’y apparente. Lorsque le sevrage intervient, et même avant, le suçotement se met en place comme activité autoérotique retournée sur le corps propre, il s’accompagne aussi de pulsion envers certains objets sur lesquels le bébé retransmet son affect. Cette théorie des stades qui se succèdent, reprise et étayée par les docteurs H. Wallon (1879-1962), Lacan (1901-1981) ou encore J. Bowlby (1907-1990), entre dans le mécanisme de développement de l’intelligence et de l’affectivité de l’enfant. Le premier stade, le stade d’impulsivité motrice (0 à 6 mois), consiste en un désordre gestuel, une agitation diffuse des émotions. Au stade émotionnel (3 à 9 mois), les gestes deviennent utiles, expriment des besoins. C'est aussi à ce stade que l'expression de l'émotion émerge, que l'enfant se reconnaît dans le miroir : le bébé peut alors identifier ce corps qui est à lui et qui est différent de l'Autre, le premier Autre : la mère. Le dernier stade, stade sensori-moteur (9 à 12 mois) se caractérise par une meilleure association entre mouvements et perceptions, et une conscience plus précise des objets. L'enfant acquiert alors la capacité symbolique, de la représentation de l’objet.
Le film montre une scène d'enfant en érection. Dans le volume 41 de L'année psychologique, publié par le professeur Henry Piéron en 1940, une étude sur « le comportement de l’organe génital et les sphincters chez le bébé de sexe masculin » fait référence à cette situation. Sur une étude de 9 bébés âgés de 3 à 20 semaines, une érection du pénis a été constatée. « Sa cause principale est la stimulation provenant de la pression de la vessie […] l’érection tend à empêcher la miction et cette inhibition est d’autant plus forte que la turbidité du pénis est plus grande ». [1]
La production filmique de Julian de Ajuriaguerra
Collaboratrice de Julian de Ajuriaguerra, Marguerite Auzias décrit les intentions et les modalités de sa production filmique : "Julian de Ajuriaguerra réalise plusieurs films d'étude durant ses années d'enseignement au Collège de France où il tient la Chaire de Neuropsychologie du développement de 1976 à 1982. Pendant ces années, il anime avec son équipe des recherches sur le nourrisson. Ils ont été réalisés à partir de séquences de films de recherches longitudinales sur le développement normal du nourrisson durant les deux premières années de la vie. Ces films, selon Julian de Ajuriaguerra, doivent permettre de mettre en évidence les perspectives évolutives et comparatives du développement. Ils contribuent à une sémiologie propre à l'enfant dans un but thérapeutique. Selon lui, photographie et film sont des outils de recherche qui permettent une observation concrète et précise des fonctionnements et leur mise en relation avec l'état comportemental du moment. Ils sont à même de susciter une émotion qui fait mieux comprendre le sens et l'essence des comportements étudiés. Pour certaines études, il choisit de filmer les bébés nus car il veut observer les corps des bébés en mouvement et ainsi mettre en évidence l'interrelation tonico-émotionnelle. Certaines séquences sont tournées dans des situations de tout-venant, sans préparation spéciale, le bébé allant et venant selon son bon plaisir, les parents lui parlant, l'embrassant, le câlinant, le nourrissant, le baignant, l'habillant, l'endormant ou jouant avec lui selon l'heure. Pour certaines recherches, cependant, des situations standardisées sont aménagées en fonction d'un sujet délimité comme les déplacements, les mouvements spontanés avant sept mois comme le planeur, des comportements de tendresse. Ces situations standardisées aménagées sont toujours organisées dans le milieu normal de l'enfant, sa salle de crèche, ou son domicile. Les bébés, familiarisés de longue date avec les membres de l'équipe et les séances de filmage, finissent par ignorer la caméra et le caméraman. Cela permet d'éviter tout effet de sidération. On recueille avec la caméra ce que les bébés donnent à voir. Il en ressort un stock de documents filmiques très précieux. Le film constitue une observation à disposition. Ces documents sont ensuite analysés dans le détail ; c'est le matériau d'élaboration patiente à l'aide de grilles d'analyse. Puis vient le temps de la discussion et l'élargissement de celle-ci à des problèmes connexes et plus vastes englobant le thème étudié. Pour Julian de Ajuriaguerra, les théories évoluent mais les descriptions restent, il est alors nécessaire d'aboutir à une sémiologie riche et précise. Ces films sont d'une qualité particulière. Ce ne sont pas des films à thèse cherchant à passer un message ni des films pédagogiques ; ce sont des films d'observation, imparfaits du point de vue technique mais montrant des bébés dans des situations bien définies, qui se comportent en fonction de leur âge, selon leurs penchants naturels et leur humeur du moment. Ils ont la fraîcheur de leurs comportements spontanés." (d'après le commentaire Marguerite Auzias, Présentation des films de recherche de l'équipe Ajuriaguerra - Auzias, Centre Hospitalier Sainte-Anne, 2017).
Éléments structurants du film
- Images de reportage : Oui.
- Images en plateau : Non.
- Images d'archives : Non.
- Séquences d'animation : Non.
- Cartons : Oui.
- Animateur : Non.
- Voix off : Oui.
- Interview : Non.
- Musique et bruitages : Oui.
- Images communes avec d'autres films : Non.
Comment le film dirige-t-il le regard du spectateur ?
Zooms et gros plans insistent sur certaines actions ou mouvements importants produits par le bébé étudié. Cf. Marguerite Auzias, citée dans la partie "Contexte" : "Les bébés, familiarisés de longue date avec les membres de l'équipe et les séances de filmage, finissent par ignorer la caméra et le caméraman. Cela permet d'éviter tout effet de sidération. On recueille avec la caméra ce que les bébés donnent à voir."
Comment la santé et la médecine sont-elles présentées ?
Diffusion et réception
Où le film est-il projeté ?
Destiné à la recherche, le film est présenté à des collaborateurs ou des confrères.
Communications et événements associés au film
Aucun évènement connu
Public
spécialisé
Audience
Descriptif libre
Stade d’impulsivité motrice
[2’06:4’06]
Carton : « Anne-Sophie 4mois 1/2 », deuxième carton : « enfant très choyée, aussi bien en famille qu’à la crèche, en crèche elle cherche le contact avec l’adulte. Suivant les moments elle peut y répondre ou bien garder une distance en poursuivant avec continuité les activités centrées sur elle-même. » En plan moyen, le bébé évolue nu sur un tapis, positionné sur le dos. Un homme (Ajuriaguerra) cherche à la stimuler, il souffle au niveau du torse, puis le chatouille, toujours au niveau du torse. L’enfant interagit, gazouille et rit. Quand l’homme lui chatouille les pieds, l’enfant n’interagit plus, il tend ses jambes, et se tait. Dans les deux cas, la réaction est bilatérale, Anne-Sophie agite les deux bras ou les deux jambes à la fois. En plan d’ensemble, alors que l’homme s’est éloigné du bébé, celui-ci le cherche du regard. Pour capter son attention de l’homme, elle s’agite et gazouille.
Stade émotionnel
[4’06-4’54]
Carton : « Anne-Sophie, 6 mois et 20 jours », un deuxième carton situe la scène « après la sieste ». Allongé sur le ventre, le bébé suce son pouce. Le même homme que dans la séquence précédente vient lui souffler dans le cou afin de créer des stimuli. L’enfant est moins agité, il contrôle davantage ses mouvements, le stade d’impulsivité motrice est passé.
[4’54-7’20]
Carton : Anne-Sophie a « 7 mois et 3 jours » Postée sur le dos, elle interagit avec ses pieds, les porte au visage, semble davantage maîtriser ses membres. Le bébé nu est ensuite positionné sur le dos, sur le tapis. Il joue avec son corps, le découvre notamment grâce à sa bouche et au suçotement, de ses doigts, mains et pieds. « 7mois et 27 jours », elle maîtrise de mieux en mieux ses mouvements, et se tient à quatre pattes.
[7’20-9’00]
Anne-Sophie a « 10 mois ». Elle suce son pouce et se tient assise, joue seule. « 10 mois et 24 jours », elle essaye de saisir l'objet qu'on lui tend, une roue avec un bout long en plastique, interagit avec en ouvrant la bouche. Mais quand l’homme lui présente l’objet par la roue en avant elle ne semble plus s’y intéresser : la forme sphérique ne génère pas d’intérêt chez le bébé. Elle reprend son pouce. En plan rapproché, le bébé est à genoux face à un miroir, s’agite face à son reflet et sourit. Sur d’autres plans, on la voit interagir avec une femme, elle se balance en souriant, elle la connaît et joue avec elle.
Stade sensori-moteur
[9’00-10’38]
Carton : « Anne-Sophie, 11 mois 7 jours, petits balancements et succion de pouce ponctuent encore l’activité ludique ». Le bébé se déplace dans son environnement, joue avec les autres bébés, suce encore son pouce. Elle se déplace aisément à quatre pattes, sait se redresser et tenir debout seule.
L’étude longitudinale sur le sujet un se termine sur ces images. Cartons : « Vincent 21 jours », les images sont filmées « à domicile ».
Stade d’impulsivité motrice
[10’45 -13’00]
Le bébé est allongé sur le dos, une femme lui caresse l’abdomen, le bébé n’interagit pas, il regarde ailleurs et ne s’agite pas. Changement de plan, plan moyen, le bébé est posé sur le dos. Seul, il reste silencieux, sa gestuelle est désordonnée, son regard ne se porte pas sur les personnes dans la pièce. Le bébé semble avoir une érection, un carton le confirme : « l’érection s’est prolongée pendant les trois minutes de tournage, miction à la 4e minute ». Toutefois cette miction n'est pas nécessairement associée à un comportement autoérotique, c'est un comportement mécanique.
Stade émotionnel
[13’00 - 18’00]
Carton : « Vincent 5 mois ». Déposé sur le dos, il se retourne et se déplace sur le tapis, maîtrise davantage les mouvements de son corps et suçote son pouce et sa main. Il rigole et interagit avec les personnes dans la pièce. « Vincent 6 mois », à nouveau le phénomène érectile se produit, accompagné d’une miction. « Vincent 7 mois », le bébé se retourne sur le ventre et sur le dos aisément, joue et cherche à capter l’attention de la personne dans la pièce. Il tente de se redresser plusieurs fois. « Vincent 8 mois », le comportement autoérotique du bébé se précise par l'exploration de son appareil génital. Ce stade de découverte est plus précoce chez le petit garçon, et suscite une excitation.
Ces deux sujets d’étude, très riches, illustrent les étapes de développements dans la première année de l’enfant. Ils insistent sur l’importance de l’autoérotisme chez un bébé pour qu'il puisse explorer son environnement et son corps. Chez Anne-Sophie le stade buccal est davantage visible que chez Vincent. Pour Vincent, les images insistent sur les étapes de la compréhension de son corps, jusqu’à l’établissement d’une nouvelle zone érogène, dès l’âge de 7 mois. Tous deux semblent donc avoir un comportement autoérotique différent, propre à leurs affects.
Notes complémentaires
Références et documents externes
Henry Piéron, « L'évolution de la naissance à la puberté » L'année psychologique. 1940 vol. 41-42. pp. 408-416. Régine Prat, « Le sexuel chez le bébé : prémisses de l'organisation psychosexuelle à travers les premières symbolisations » Le Carnet PSY, vol. 143, no. 3, 2010, pp. 32-45. « Psychologie et développement de l'enfant », "Le dossier de l'INFOP" sans date, URL : https://ressources-cemea-pdll.org/IMG/pdf/developpement_enfant_dossier.pdf
Contributeurs
- Auteurs de la fiche : Joël Danet, Justine Viard