Une Journée à la crèche_15 mois à 2 ans (1983)
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Résumé
Une journée ordinaire à la crèche Cabanis de Paris (2 rue de Cabanis, XIV arrdt.) qui accueille des enfants de 15 mois à 3 ans.
Contexte
Les crèches en France
La première crèche voit le jour en 1844, par la volonté de Firmin Marbeau, adjoint au maire du 1er arrondissement de Paris. Son but est de combler le vide entre "l'aide aux couches" et la salle d'asile (ancêtre de notre école maternelle), mais pas seulement. Car le XIXe siècle est une période mouvementée, tant politiquement que socialement. L'émergence du capitalisme industriel voit un fort développement des usines et un exode rural massif vers la capitale. L'objectif est d'accueillir à la crèche les enfants des populations modestes, afin que leurs mères puissent aller travailler. On veut également lutter contre la mortalité infantile, pacifier la société et moraliser les classes pauvres: à travers les enfants, on éduque aussi leurs parents, selon le modèle de la famille bourgeoise. Elle s'installe dans une maison bourgeoise avec jardin (la question du bon air est prégnante), généreusement cédée par une famille aisée. Après avoir été déshabillé, lavé et revêtu de l'uniforme de la crèche, l'enfant est pris en charge par une berceuse. S'il est allaité, sa mère doit venir le nourrir aux heures des repas. Pour le moment, l'aspect éducatif est négligé. Les berceuses sont recrutées parmi les femmes de bonne moralité, ayant de grands enfants, afin d'éviter l'absentéisme. Le règlement précise qu'elles "doivent pourvoir avec douceur à tous leurs besoins, comme s'ils étaient leurs propres enfants." A la fin du XIXe siècle, avec le mouvement pastorien et l’arrivée et le développement de la médicalisation, la priorité est donnée à la lutte contre la mortalité et les épidémies de maladies infantiles. La crèche évolue dans cet esprit hygiéniste, sous le contrôle médical qui s’est également étendu aux nourrices.
Une seconde mutation s'opère dans les années 50 émerge avec les travaux de recherche menés par René Spitz sur l’hospitalisme qui mettent en évidnce les carences affectives dot souffrent les enfants évoluant en crèche. L'enfant est désormais considéré comme une personne à part entière, ce qui implique la prise en compte de sa vie psychique et de sa subjectivité, notions introduites par les recherches en psychologie du développement. Les théories de l’attachement élaborées par John Bowlby et Mary Ainsworth contribuent à la prise en compte du lien dans la construction psychique de l’enfant.
Les dates repères :
1844: création de la première crèche collective à Paris
1869: la Société des crèches est reconnue d'utilité publique
1874: instauration de la surveillance nationale des enfants placés en garde
1945: création de la PMI (Protection maternelle et infantile)
1947: création du diplôme de puéricultrice
Années 1950: apparition de la théorie de l'attachement
1968: fin des guichets dans les crèches, qui s'ouvrent aux parents
1973: création du diplôme d'éducateur de jeunes enfants
Années 1980-1990: la crèche devient un lieu d'éducation à part entière
2016: création de la charte nationale d'accueil du jeune enfant
D'après "les crèches, toute une histoire" par Catherine Bouve, docteure en sciences de l'éducation (université de Paris) et chercheure associée au laboratoire EXPERICE.
La production filmique de Julian de Ajuriaguerra
Collaboratrice de Julian de Ajuriaguerra, Marguerite Auzias décrit les intentions et les modalités de sa production filmique : "Julian de Ajuriaguerra réalise plusieurs films d'étude durant ses années d'enseignement au Collège de France où il tient la Chaire de Neuropsychologie du développement de 1976 à 1982. Pendant ces années, il anime avec son équipe des recherches sur le nourrisson. Ils ont été réalisés à partir de séquences de films de recherches longitudinales sur le développement normal du nourrisson durant les deux premières années de la vie. Ces films, selon Julian de Ajuriaguerra, doivent permettre de mettre en évidence les perspectives évolutives et comparatives du développement. Ils contribuent à une sémiologie propre à l'enfant dans un but thérapeutique. Selon lui, photographie et film sont des outils de recherche qui permettent une observation concrète et précise des fonctionnements et leur mise en relation avec l'état comportemental du moment. Ils sont à même de susciter une émotion qui fait mieux comprendre le sens et l'essence des comportements étudiés. Pour certaines études, il choisit de filmer les bébés nus car il veut observer les corps des bébés en mouvement et ainsi mettre en évidence l'interrelation tonico-émotionnelle. Certaines séquences sont tournées dans des situations de tout-venant, sans préparation spéciale, le bébé allant et venant selon son bon plaisir, les parents lui parlant, l'embrassant, le câlinant, le nourrissant, le baignant, l'habillant, l'endormant ou jouant avec lui selon l'heure. Pour certaines recherches, cependant, des situations standardisées sont aménagées en fonction d'un sujet délimité comme les déplacements, les mouvements spontanés avant sept mois comme le planeur, des comportements de tendresse. Ces situations standardisées aménagées sont toujours organisées dans le milieu normal de l'enfant, sa salle de crèche, ou son domicile. Les bébés, familiarisés de longue date avec les membres de l'équipe et les séances de filmage, finissent par ignorer la caméra et le caméraman. Cela permet d'éviter tout effet de sidération. On recueille avec la caméra ce que les bébés donnent à voir. Il en ressort un stock de documents filmiques très précieux. Le film constitue une observation à disposition. Ces documents sont ensuite analysés dans le détail ; c'est le matériau d'élaboration patiente à l'aide de grilles d'analyse. Puis vient le temps de la discussion et l'élargissement de celle-ci à des problèmes connexes et plus vastes englobant le thème étudié. Pour Julian de Ajuriaguerra, les théories évoluent mais les descriptions restent, il est alors nécessaire d'aboutir à une sémiologie riche et précise. Ces films sont d'une qualité particulière. Ce ne sont pas des films à thèse cherchant à passer un message ni des films pédagogiques ; ce sont des films d'observation, imparfaits du point de vue technique mais montrant des bébés dans des situations bien définies, qui se comportent en fonction de leur âge, selon leurs penchants naturels et leur humeur du moment. Ils ont la fraîcheur de leurs comportements spontanés." (d'après le commentaire Marguerite Auzias, Présentation des films de recherche de l'équipe Ajuriaguerra - Auzias, Centre Hospitalier Sainte-Anne, 2017).
Éléments structurants du film
- Images de reportage : Oui.
- Images en plateau : Non.
- Images d'archives : Non.
- Séquences d'animation : Non.
- Cartons : Oui.
- Animateur : Non.
- Voix off : Non.
- Interview : Non.
- Musique et bruitages : Non.
- Images communes avec d'autres films : Non.
Comment le film dirige-t-il le regard du spectateur ?
Zooms et gros plans insistent sur certaines actions ou mouvements importants produits par le bébé étudié. Cf. Marguerite Auzias, citée dans la partie "Contexte" : "Les bébés, familiarisés de longue date avec les membres de l'équipe et les séances de filmage, finissent par ignorer la caméra et le caméraman. Cela permet d'éviter tout effet de sidération. On recueille avec la caméra ce que les bébés donnent à voir."
Le film se présente comme un document de recherches avec des répétitions de scènes pour les constituer en série. La caméra saisit un projecteur ou un micro pour rappeler que ce que le public voit résulte d'une construction.
Comment la santé et la médecine sont-elles présentées ?
Diffusion et réception
Où le film est-il projeté ?
Destiné à la recherche, le film est présenté à des collaborateurs ou des confrères.
Communications et événements associés au film
Public
Spécialisé dans la pédiatrie
Audience
Descriptif libre
L'accueil des enfants
Vue générale d'un immeuble moderne, gros plan sur une plaque qui indique que ce bâtiment est une crèche municipale à Paris. Succession de cinq scènes identiques montrant une personne adulte accompagnée d'un ou deux enfants. Elle ouvre une petite porte grillagée qui donne accès au couloir extérieur, puis ouvre une porte vitrée dont la décoration de dessins vivement colorés exprime la vocation du lieu. Nous devinons que les adultes montrés sont des parents qui confient leurs enfants à la crèche. Un seul d'entre eux est un homme, aucun adulte ne se présente avec un autre adulte, les regards caméras des enfants montrent qu'ils sont conscients d'être filmés : la caméra ne se cache pas. Vue intérieure, une femme en blouse avec des enfants, dézoom, une autre femme apparait dans le champ. Cette dernière fait un geste d'au-revoir, nous devinons que c'est une mère qui s'entretient avec une responsable de la crèche avant de partir. La pièce est conçue pour le séjour des enfants : canapé à leur taille rangé le mur, dessins colorés d'arbres et d'animaux, profusion de tapis et coussins, petit toboggan. Répétition de la scène avec d'autres parents qui s'attardent dans cette pièce, le temps de procéder aux au revoir avec les enfants qu'ils ont amenés. C'est un rituel où chaque enfant vit un transfert de tutelle et de référent affectif. La séquence est complétée par des vues d'enfants se livrant à des jeux collectifs, bataille de coussins, tours de balançoires... Nous voyons que le local est particulièrement fourni en équipements ludiques qui développent l'éveil corporel. (03:58)
Scènes de bac à sable
Une feuille scotchée sur une paroi vitrée, couverte d'une écriture manuscrite. Elle indique : "crèche Cabanis, octobre 1983,chez les 'grands' et 'moyens grands' 15 mois-3 ans". Vues en plongée sur une cour équipée d'un toboggan et d'un bac à sable où les enfants évoluent, accompagnées de plusieurs puéricultrices. L'espace est étroit, les enfants sont nombreux, néanmoins les activités se déroulent sereinement. La caméra isole l'un ou l'autre des enfants dans le champ. L'un d'eux se coiffe d'un seau renversé, un autre s'attarde sur le sommet du toboggan et se positionne pour le descendre à l'envers. Les deux puéricultrices qui sont assises côte à côte sur un banc ont toutes les deux, sur leurs genoux, un enfant qui n'a pas quitté son doudou. (08:39)
Les vivres vinrent à manquer...
Une serviette éponge pend sur un dossier de chaise, verte, semée de motifs d'éléphants blancs. C'est la serviette que tous les enfants mettent au cou pour manger. Installés à des tables basses en L par cinq ou six, ils sont surveillés par trois puéricultrices. Certaines rejoignent les tables et encouragent les enfants à s'alimenter en portant elles-mêmes un peu de nourriture à leur bouche puis en faisant un "miam" encourageant. Comme pour la scène tournée dans la cour, la caméra resserre sur l'un ou l'autre des enfants, selon qu'il emploie la cuillère ou ses doigts pour porter la purée colorée ou un bloc de viande à sa bouche. Assez curieusement, la musique choisie pour animer le déjeuner dans le réfectoire est la chanson Il était un petit navire. Nous entendons une femme chanter : "Au bout de cinq à six semaines les vivres vinrent à manquer" sur le plan d'une petite fille qui tient sa cuillère en suspens au-dessus de son assiette. Le panoramique dans la pièce saisit un projecteur installé pour l'éclairage du film. Les assiettes sont disposées sur les serviettes nouées au cou des enfants, certains réussissent néanmoins à consteller abondamment la surface de leur table de projections de purée. Un plan montre des jeux de jambes sous la table où deux enfants mangent côte à côte. Un autre enfant pose son pied sur la table. Voix lasse d'une puéricultrice : "C'est marrant les pieds dans les carottes!" La séquence se termine sur les réticences d'un enfant à engloutir son riz, finalement vaincues par la puéricultrice qui lui répète que "ce n'est pas chaud", ou bien est-ce parce qu'elle finit par lui tourner le dos qu'il s'intéresse à son assiette. (13:11)
"Donne -lui à boire"
Volet pratiqué par une main placé devant l'objectif et s'en écartant de manière progressive. Autre scène de repas, l'ambiance parait plus calme, les enfants sont plus grands. Dans un coin de la pièce, une maison en carton avec l'enseigne "épicerie" accrochée à son pignon. Sur des pupitres d'écolier rangés contre les murs sont disposés des parkings miniatures. "Donne-lui à boire!", dit une puéricultrice à un enfant attablé avec son alpin en peluche, plaçant devant lui un verre rempli d'eau. Docile il s'exécute, tend le verre au lapin dans des rires qui résonnent hors champ. Du raisin au dessert, noir et vert, les enfants sont filmés en gros plan entrain d'arracher les grains à la grappe et de les porter à leur bouche. Ils sont rassemblés autour de tables semi circulaires. (15:01)
Au pot, à la toilette
Un plan de coupe sur des feuillages peints sur la fenêtre entre deux scènes de repas. Nous retrouvons le même décor dans le plan suivant, ainsi que l'épicerie en carton. la pièce est à présent occupée par des lits. Nous comprenons que la même pièce sert de réfectoire et de dortoir. En plan moyen et ralenti, une petite fille ôte ses chaussures et ses chaussettes ; au plan suivant elle déplie la structure amovible de son lit. Le film insiste ainsi sur la limite d'espace dont pâtit la crèche, mais aussi sur l'apprentissage par les enfants de la débrouillardise et de l'autonomie que cette contrainte entraîne. Un petit garçon baisse son slip et, concentré et résolu, fait quelques pas avec son slip entravant ses chevilles. Scènes de change, les puéricultrices, autant qu'elles lavent les fesses sales, manipulent les enfants pour leur faire sentir l'élasticité de leurs corps. Autre scène d'autonomie, un garçon saisit un des pots rangés sur une étagère, le porte pendant quelques pas, le pose au sol, s'installe dessus. La caméra suit très attentivement l'agencement de ses gestes alors qu'il regarde hors champ d'un air interrogatif : attend-il une approbation? A l'un des lavabos communs, un fille, la main prise dans un gant de toilette, se frotte le bas du visage avec méthode. Dans le champ cohabitent deux enfants, l'un d'eux se brosse les dents d'un geste habile, l'autre qui machouille vaguement sa brosse regarde son voisin avec attention, comme s'il était soumis à un modèle. (17:45)
Dodos
"Dodo... dodo..." répète un enfant qu'une puéricultrice emmène au lit. Alors qu'il est couché, elle reste à son chevet, dispose contre lui doudou et biberon. Au bord cadre supérieur, un micro bonneté est tendu vers eux pour capter leurs échanges. "Suffit maintenant, on se couche!" Le plan s'élargit sur l'alignement des lits. Les puéricultrice encouragent des enfants plus ou moins réticents à céder au sommeil. Jeu avec les draps, on se lève ou on s'étend avec une obéissance ostensible. Succession de plans montrant des puéricultrices berçant les enfants d'une main posée sur leur hanche ou leur épaule. Zooms sur des enfants endormis, le pouce dans la bouche, certains coiffés de leur doudou. Silence dans la pièce, puis diffusion d'une musique orientale après qu'une des puéricultrices est allé abaisser un volet incliné. (22:40)
Réveils
Scènes de réveil, les enfants restent calmes et couchés, les yeux grand ouverts. D'autres dorment encore. La caméra insiste sur les enfants en couche qui se sont installés sur le ventre et à genoux. Les puéricultrices préparent les activités : lecture et découpages. L'une d'elles dispose des feuilles en papier au bout des ramures d'un arbre dessiné au mur. Musique jouée à la flûte. Noir, une feuille de papier sur laquelle est écrit : "Réveil de la sieste". Une des puéricultrices, revenu à la fenêtre, a levé le volet roulant. Dézooms sur des enfants à présent réveillés, très sages. L'un d'eux applaudit la musique qui continue de jouer, bientôt imité par deux de ses voisines. Elles sourient, contentes de ce jeu commun. Avec celle du brossage de dents et des jeux de jambes, c'est une des rares scène d'interaction entre enfants.
Notes complémentaires
Références et documents externes
Contributeurs
- Auteurs de la fiche : Joël Danet