Les infirmières : la province (1964)
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Sommaire
Générique principal
Gén. début : l'avenir est à vous / Les infirmières- la province / Lyon & Nîmes
Gén. fin : réalisation : Jean-Pierre Chartier, production : Françoise Dumayet
Contenus
Sujet
Suite et deuxième partie de l'enquête sur les conditions de travail et d'études des infirmières en France. Après le premier volet, "L'école, les infirmières, le dévouement", situé en Île de France, l'émission se centre sur deux contextes non parisiens : Nîmes et Lyon. Au terme d'une succession d'entretiens et de séquences tournées dans les locaux de soins, elle adresse le message suivant : il faudrait davantage d'écoles de formation pour les infirmières, mieux organiser leurs journées de travail et définir leurs tâches et les rémunérer davantage.
Genre dominant
Résumé
Les contenus abordés par les infirmières : les critères de sélection pour entrer en classe préparatoire aux études d'infirmières ; la surcharge de travail ; l'idéal de soigner et sauver les autres ; l'habileté manuelle pour les soins ; la surcharge du programme d’études ; la possibilité du travail à mi-temps pour concilier métier et foyer ; la différence de dispositions d'esprit entre une religieuse soignante et une infirmière "civile" ; les raisons pour lesquelles un soignant peut aimer ou déprécier son service.
Les contenus abordés par les directrices et directeurs d'établissements : le traumatisme psychologique produit par le contact brutal avec les réalités médicales ; le pourcentage peu élevé d’échec à l'examen ; l'analyse des conditions de travail.
Contexte
La formation des infirmières
Jusqu’à la fin du XIXe siècle, soigner est un art essentiellement pratiqué par les religieuses. Dès le XIIIe siècle, les soeurs augustines s’occupent des malades de l’Hôtel-Dieu. Elles représentent l’une des principales congrégations religieuses hospitalières actives dans les hôpitaux de la Charité, Beaujon (dans sa première implantation à Paris), Lariboisière et Saint- Louis. Les religieuses vouent leur vie aux soins apportés aux malades, traités essentiellement sous l’angle de la santé spirituelle. Le mouvement de laïcisation amorcé en 1878 amène au départ progressif des religieuses des hôpitaux, où elles n’occupent généralement plus que les postes de surveillance. Sont alors formées de véritables professionnelles laïques pour une prise en charge médicale des malades et pour leur prodiguer les soins nécessaires à leur guérison.
La circulaire du 28 octobre 1902 qui encourage fortement la création d’écoles de formation, précise la définition de l’infirmière : « L’infirmière telle qu’on doit la concevoir est absolument différente de la servante employée aux gros ouvrages de cuisine, de nettoyage, etc. Elle est réservée aux soins directs des malades ; c’est la collaboratrice disciplinée, mais intelligente, du médecin et du chirurgien ; en dehors de sa dignité personnelle qu’il est essentiel de sauvegarder, elle doit éprouver une légitime fierté d’un état que relèvent à la fois son caractère philanthropique et son caractère scientifique. » Des écoles d’infirmières municipales existent déjà avant la parution de cette circulaire : dès 1878, elles forment également des servantes et des aides-soignants. Les règles d’hygiène, les notions en petite pharmacie et l’apprentissage de l’art des pansements leur permettent d’apporter tous les soins nécessaires aux femmes en couches et aux enfants.
En 1907 ouvre l’école d’infirmières de l’Assistance publique dans l’enceinte de l’hôpital Salpêtrière. Le règlement de l’école reprend les propositions données dans la circulaire de 1902 sur l’hébergement des élèves, ainsi que sur les modules de formation et le recrutement. Les postulantes doivent être âgées de 18 à 30 ans, avoir de bonnes capacités intellectuelles ainsi qu’une bonne condition physique. La scolarité, d’une durée de 2 ans, est gratuite : en échange, les élèves s’engagent à servir l’Assistance publique en travaillant dans un de ses hôpitaux pendant un certain nombre d’années. Les élèves suivent un enseignement théorique la 1re année, puis un stage pour la mise en pratique la 2nde année. Le temps de loisirs et de repos est également prévu dans le règlement. Cette école ne remet pas en cause la création des écoles municipales : on parlera ainsi des « bleues » (en référence au manteau bleu des nouvelles élèves) et des « municipales » pour distinguer l’origine des infirmières. Dans les années suivantes, des écoles ouvrent dans les hôpitaux de la Pitié, Lariboisière, Bicêtre ou encore à l’hôpital Franco-Musulman (aujourd’hui Avicenne). Cf. https://archives.aphp.fr
Éléments structurants du film
- Images de reportage : Oui.
- Images en plateau : Non.
- Images d'archives : Non.
- Séquences d'animation : Non.
- Cartons : Non.
- Animateur : Non.
- Voix off : Non.
- Interview : Non.
- Musique et bruitages : Non.
- Images communes avec d'autres films : Non.
Comment le film dirige-t-il le regard du spectateur ?
Le film consiste en une alternance entre situations hospitalières prises sur le vif et entretiens avec des élèves, des infirmières, ou des cadres. Le commentaire juxtapose aux vues des informations qui suppléent celles que fournissent les entretiens.
Comment la santé et la médecine sont-elles présentées ?
Ici, la profession est vue sous l'angle de la différence des conditions de sa pratique selon qu'elle est exercée à Paris ou en province. A Nîmes, les difficultés de déplacement sont moindres qu'à Lyon ou à Paris. Si les équipements et locaux ne sont pas aussi modernes que dans ces deux métropoles, ils sont cependant modernisés pour être efficaces et d'un usage plus agréable.
Parmi les élèves interrogées, nombreuses sont celles qui font par de leurs désillusions en étant confrontées à a réalité de la pratique, en particulier dans leurs rapports avec les patients. Celles qui ont passé le cap et ont accédé à la professionnalisation quittent ce registre de la plainte et de l'appréhension. Les difficulté qu'elles exposent sont avant tout matérielles : temps de déplacement, horaires exigeants, pénalisation du choix de travailler à mi-temps.
Comme le volet précédent, Les infirmières : l'école du dévouement, Les infirmières : la province met en débat l'idée que l'orientation vers le métier d'infirmière suppose un dévouement. A cet égard, la séquence sur les soeurs hospitalières exerçant dans l'Hôpital de la Croix-Rousse n'est pas aussi anecdotique que sa place dans l'exposé général ne le laisse paraître. La figure de la religieuse constamment disponible pour les malades, qui confond sa vie avec son travail, qui considère celui-ci comme une mission est en quelque sorte l'épure de la représentation des infirmières aujourd'hui, lesquelles demandent à être considérées selon leurs attentes d'individus comme les autres.
Diffusion et réception
Où le film est-il projeté ?
Télévision française, Première chaîne, mercredi 08/07/1964 à 21h35
Communications et événements associés au film
Public
Tout public
Audience
Descriptif libre
"Ce n'est pas comme je l'ai imaginé"
Musique jazz be bop (incongrue étant donné le style et le propos de l'émission). Une femme en vélo contourne la façade des arène de Nîmes (une affiche dans le plan suivant annonce un spectacle de feria dans ces mêmes arènes), au premier plan un panneau indique la direction des localités Le Vigan et Alès. Commentaire (voix de Françoise Dumayet) : " Aujourd'hui c'est à Nîmes et à Lyon que nous poursuivons notre enquête sur les problèmes des infirmières." Elle ajoute qu'une précédente émission (Les infirmières, l'école du dévouement, aussi sur Medfilm) avait traité le même sujet dans le cadre de l'activité de l'Assistance Publique à Paris. dans la capitale, "le manque de logements, les distances, le nombre des malades ont rendu la crise plus aigüe." La femme montrée en premier plan continue son trajet en vélo, elle s'enfonce dans une ruelle étroite que le soleil éclatant de la journée n'arrive pas à éclairer jusque dans ses profondeurs. Une enseigne "Restaurant - Paella" au premier plan. L'opérateur a soin de fournir au public les indicateurs pittoresques suffisants pour le situer. "A Nîmes, ville de 100 000 habitants, les problèmes de logement et de transport n'existent pas." Le déplacement moyen du domicile à l'hôpital ne dépasse pas dix minutes. La profession d'infirmière est davantage choisie qu'ailleurs à cause du manque d'activité industrielle dans la région qui aurait créé un important gisement d'emplois. Vue sur une cour d'hôpital où les jeunes filles étudiantes se rassemblent sur un banc, avancent en rangs sous un préau. L'école de Nîmes, précise le commentaire, a ouvert une classe médico-sociale où un enseignement de culture générale est combiné à des stages d'information sur le métier auquel elles se préparent. filmée en gros plan, une étudiante témoigne que les cours de français donnent lieu à des débats sur ses réalités. Il est dur, si bien qu'il "ne faut pas y aller pour le prestige de l'uniforme". Une autre étudiante décrit cet uniforme qu'elle a revêtu pendant les stages : "un voile jaune et un tablier blanc". D'après elle, l'expérience de ces stages ne "les a pas incité à rester infirmière hospitalière". Plan de coupe sur une infirmière accompagnée d'étudiantes qui se rend au chevet d'un patient et lui administre une piqûre à la fesse. La première étudiante interrogée intervient de nouveau, elle se dit déçue : "Ce n'est pas comme je l'ai imaginé. On voit l'hôpital comme un temple, alors que c'est plein d'activités". De nouveau filmée en gros plan, elle fait une moue, n'arrive pas à développer son explication. La journaliste lui demandant si elle a lu des romans sur le sujet, elle répond qu'elle y trouvait le personnage d'une infirmière jolie et dévouée, alors qu'elle n'a rencontré que des infirmières de mauvaise humeur à cause de la surcharge de travail dont elles pâtissent. Une autre élève déplore qu'elle devait observer et ne pas agir, une troisième se plaint de la réserve dans la relation que l'infirmière entretient avec le médecin. (05:09)
"Répulsion physique"
Plans sur des bâtiments modernes, à l'architecture élégante. Le commentaire précise que c'est l'école des infirmières. Elle estime que les infirmières qui ont réussi le concours (40 sur 270) y trouveront un "cadre accueillant qui leur permettra de mieux séparer leur vie personnelle des tâches déprimantes imposées par leurs études." les stages néanmoins les confronteront "au monde brutal de la souffrance, de la maladie et de la mort". Mais seules 4 ou 5% des élèves abandonnent. Entretien avec la directrice de l'école. Elle reconnaît que l'expérience de ces stages occasionnent chez les élèves un choc psychologique, elle insiste aussi sur l'endurance physique qu'ils exigent : "soulever des malades, les retourner, c'est extrêmement fatigant..." Pour elle, les élèves qui ont idéalisé le métier doivent s'adapter à ses résultat. Deux d'entre elles sont interrogées. L'une remarque que les patients n'obéissent plus à la contrainte de l'apparence sociale. L'autre admet avoir éprouvé une "répulsion physique vraiment totale" à l'endroit de certains malades. Elle a cru qu'elle ne serait pas capable de la surmonter et de supporter "que ces gens me touchent et les toucher moi-même". Le travail aide à vaincre cette prévention viscérale. L'efficacité de ce travail, conclut-elle est "dans les petites choses". La première élève interrogée, qui intervient de nouveau, évoque son idéal initial qui consistait à "partager sa jeunesse avec d'autres" et "sauver des vies". Avec l'expérience, poursuit-elle, elle se rend compte que "soigner est quelquefois vain", elle a vécu plusieurs fois la mort de patients qu'elle a accompagnés, auxquels elle s'était attachée.(09:05)
"Piquer une fesse, c'est de l'art"
Gros plan sur une tête de mannequin que des mains manipulent. La directrice rappelle que l'apprentissage sur de tels mannequins est bien loin de la réalité du contact avec le patient. "Le choc est très rude pour 70% des élèves". Pour l'infirmière qui mène les formations, le temps pour changer une alèse de lit est beaucoup plus long quand c'est le lit d'un "vrai malade". Plans de préparation de lit par des élèves, sous sa direction. Pour la seconde élève interrogée, qui intervient de nouveau en in, les gestes techniques demandent une grande maîtrise physique alors qu'au moment de les exécuter "on se sent embarrassé dans son corps". Plans de coupe sur une infirmière qui remplit une seringue. Pour l'élève, ce gestes paraissait impossible à faire, elle ajoute : "Piquer une fesse, c'est de l'art, complètement". Au fur et à mesure de ses études, elle a réussi à surmonter ses doutes et acquérir la conviction qu'elle-même pouvait y arriver. Plan d'un bras artificiel piqué par une élève sous le regard de l'enseignante. Sa voix douce et neutre pour rappeler : " Vous tendez bien la peau, et vous piquez d'un coup sec." Zoom sur la main de l'élève appuyant sur la seringue plantée dans la texture du bras artificiel qui rappelle le grain de la peau humaine. Une autre élève interrogée se plaint de la surcharge des programmes de la "section théorique" pendant ses deux premières années d'étude. La directrice estime que le pourcentage d'échec au diplôme, 10¨par an, est trop bas, et qu'il faudrait augmenter son exigence. (12:08)
Horaires, salaires, logement
Retour sur la jeune femme à vélo qui figurant dans les plans initiaux de l'émission. C'est une infirmière qui se rend dans le centre hospitalier où elle est affectée. Le commentaire précise que ce centre est aménagé et modernisé pour améliorer le confort des malades, "la salle commune n'existe plus". Vues sur des guichets aux espaces clairs, rythmés par des panneaux à claire-voie. Derrière les comptoirs, des infirmières consultent les classeurs où sont rangés les dossiers médicaux. De cette façon, l'émission suggère que les locaux et équipements en "province" peuvent aussi bien qu'à Paris répondre à un besoin d'amélioration selon les attentes actuelles. "Ici, les infirmières sont reconnues", elles ont le privilège de l'uniforme une fois que leurs études sont terminées. Une jeune femme devant la glace ceint sa tête de la coiffe. L'émission insiste sur l'enjeu de prestige que représente le port de l'uniforme, il motive les élèves et consacre celles qui ont réussi. La jeune femme : "C'est à partir du moment que j'ai eu des responsabilités que le métier est devenu intéressant". Séquence de préparation et distribution de plateaux repas, suivies en caméra mobile. Une infirmière détaille ses horaires : le matin de 7h à 10h ; 12h à 17h ; des roulements sont organisés pour les gardes de nuit ; un dimanche est libre sur quatre ; 1,5 jours de congés sont prévus par semaine. Pour cette infirmière, la rémunération correspond au travail attendu : "je pense que nous n'avons pas à nous plaindre si nous devons comparer nos salaires à ceux d'autres professions féminines." Selon elle, exercer à Nîmes est plus agréable que dans d'autres villes. Une autre infirmière est interrogée. Elle est mariée, elle travaille à mi-temps depuis octobre 1962 "pour des raisons familiales". Selon elle, le mi temps est appréciable "pour une femme qui aime à la fois sa profession et son foyer". Ses horaires sont 13h - 16h45 au moment où sa fille est à l'école maternelle. En contrepartie elle perd des avantages sociaux : elle revient au régime de la sécurité sociale, alors qu'une infirmière malade est "payée intégralement" pendant son congés maladie, et elle ne peut pas "verser à (sa) retraite". (19:14)
Le commentaire rappelle que salaire de base de l'infirmière est de 640 francs. Si cette rémunération est suffisante à Nîmes, elle ne l'est cependant plus à Lyon. En outre, à Lyon, les infirmières soignantes sont en manque d'effectifs. Evocation discrète d'une manifestation d'infirmières qui traversent une place. En plongée, vus d'avions, les bâtiments de l'hôpital Herriot. A proximité, des "homes" pour infirmières, "très confortables". Vue en contreplongée et panoramique vertical descendant pour décrire la façade moderne du bâtiment où ces logements sont groupés. Dans la bande son, une douce musique jouée par des cordes. Les infirmières souffrent cependant du manque de transports pour se rendre de leur domicile à leurs différents lieux d'intervention. Ainsi pour cette infirmière qui travaille à l'hôpital de la Croix-Rousse. Elle qui a vécu à Paris, estime que le déplacement est moins facile à Lyon et la vie toute aussi chère. Vues sur des façades de bâtiments, le commentaire rappelle que dans les hôpitaux de Lyon, les services étant "hautement spécialisés" exigent un personnel "nombreux et très qualifié". Séquence dans un service de soins pour enfants atteints de poliomyélite, montrant des fillettes alitées, dont certaines, ne pouvant se servir de leurs mains, compensent leur handicap par l'agilité qu'elles ont acquise avec leurs pieds. Une infirmière fait boire à une de ces fillettes un liquide à la cuillère. Plan d'un enfant qui marche grâce à un déambulateur manoeuvré par un infirmier qui le confie à une infirmière religieuse qui le prend dans ses bras avec un sourire exalté. Ce dernier plan permet la transition avec le sujet suivant. (23:19)
Les soeurs hospitalières
L'émission évoque la communauté religieuse abritée "par tradition" par les hospices de Lyon. "Ces soeurs hospitalières dont le nombre diminue d'année en année assure le même service que les infirmières." Entretien avec la soeur hospitalière apparue au plan précédent. Il se déroule dans une pièce où deux enfants, attablés, sont occupés à dessiner. Sur le mur du fond, des images, associé à des dessins d'enfants on reconnaît une reproduction de La dentellière de Vermeer. Vue sur le réfectoire, une soeurs dit les bénédicités alors que les autres se tiennent debout autour des longues tables. La caméra resserre sur une jeune femme attablée alors que la soeur interrogée explique les modalités du noviciat dans le cadre hospitalier. Elle ajoute que la soeur hospitalière suit le même parcours d'études que les infirmières. Pour elle, "l'infirmière a d'autres soucis que nous qui aidons toute notre vie les malades. On est totalement disponible. A toute heure, n'importe quand, n'importe où, il est possible de nous appeler." (25:59)
"Ce n'est pas une crise des vocations"
Des enfants, assis sur une chaise, regardent une présence hors champ et lui répondent. La voix qui s'adresse à eux est féminine. Elle leur parle du Petit Prince de Saint-Exupéry. Sur une civière, un enfant couché dessine une rose à l'invitation d'une infirmière penchée sur lui pour le guider. Le commentaire affirme que les postes d'infirmières pour enfants sont peu recherchés. Commentaire de la surveillante générale de l'Hôpital de la Croix-Rousse, filmée dans le service : "le travail auprès des enfants est plus usant d'un point de vue nerveux que celui des adultes." Elle est parfois obligée de retirer de ce service des infirmières qui ne tiennent pas, "alors que d'autres n'en partiraient pas". Selon elle, un plus grand nombre d'infirmières permettrait à celles qui sont déjà employées de travailler plus sereinement. Ces dernières pourraient avoir une "vie plus normale". Elle ajoute, souriante et ferme : "Ce n'est pas une crise de vocations. Moi, je crois encore au dévouement des jeunes et à leur amour du métier." (28:06)
"Entre le marteau et l'enclume"
Entrée d'une ambulance dans la cour de l'hôpital Herriot. Le commentaire affirme que les malades qui sollicitent ses services sont trop nombreux pour des équipes d'infirmières auxquelles il manque celles qui sont en congés, malades, ou en vacances." Or un patient nouveau se présente toutes les dix minutes au Service des urgences. Plan d'un médecin et d'une infirmière au chevet d'un homme alité qui vient d'être admis. Entretien dans la cour avec une infirmière et un jeune interne. Pour l'infirmière, les horaires qui sont déterminés par le système des trois huit sont incompatibles avec une vie normale. "Point de vue sommeil, repas... A chaque semaine, il faut s'adapter à un autre rythme." Ceci rejaillit sur la vie familiale et la possibilité de se distraire. Elle apprécie de travailler au service d'urgences parce que "c'est très varié, aussi bien en psychiatrie qu'en médecine". Elle cite les intoxications aux barbituriques et les autres. Plan de coupe où l'infirmière est montrée dans une chambre en train d'intervenir auprès d'un malade. Elle trouve que l'entente avec les collègues est parfaite, aussi bien avec les infirmières qu'avec les médecins et "le personnel secondaire". Pour l'interne, la tâche des infirmières est difficile parce qu'elles doivent affronter la venue continuelle de nouveaux malades. Qu'ils soient graves ou moins graves, "de toutes façons les familles sont toujours affolées". Confrontées à la fois aux médecins, aux patients et aux familles, elles sont placées "entre le marteau et l'enclume". Interrogée sur la perspective de se marier, la jeune fille sourit avec gêne, répond que les occasions de sortir sont peu nombreuses et puis elle et ses collègues sont "blindées" : "je crois qu'on en voit trop". Est-ce à dire que la contrainte de mettre à distance la souffrance des malades nuit à la capacité de désir et d'émotions sentimentales? "On touche de trop près la souffrance et la mort ; et par rapport aux autres camarades de notre âge, on n'est plus sur la même longueur d'ondes." (31:52)
"Une profession comme une autre"
L'enquête se poursuit dans le "home" des infirmières, un immeuble chic et moderne, aux pièces meublées et pourvu d'une salle de télévision. Ce "cadre idéal" réussit-il à les soulager de leurs dures journées? La journaliste Françoise Dumayet rejoint une des pensionnaires dans sa chambre. Elle reconnaît que les avantages matériels du lieu rendent raisonnable le montant de son loyer. Cette solution ne doit pas durer : "nous nous retrouvons qu'entre infirmières, toujours dans le même milieu. C'est assez déséquilibrant..." Elle pense qu'en tant qu'infirmière, elle est regardée par son entourage comme une "quelqu'un de curieux", au sens d'étrange. Elle ajoute : "On ne peut pas penser qu'une fille jeune ait envie de s'enterrer à l'hôpital, dans un milieu de souffrance". Françoise Dumayet amène la conversation sur la motivation à être infirmière. "- Par vocation?". Sourire gêné de l'infirmière. "Non, pas par vocation. Etre infirmière, c'est une profession comme une autre." Pour autant, ajoute-t-elle, elle ne se voit pas "faire un autre métier".
Vue sur un bâtiment en chantier, le commentaire précise qu'il abritera l'"école internationale des infirmières" sous la responsabilité conjointe du Ministère de la Santé Publique et de l'Université de Lyon. Entretien avec la directrice de la structure : elle recrutera dans différents pays sans l'imite d'âge, selon des équivalences internationales. Il s'agit de former les "cadres supérieurs" dans le métier d'infirmière. L'enseignement comportera des cours d'administration et de spécialisation de soins, et des formations.
Une situation aussi "aigüe" à Lyon qu'à Paris
Vues en plongée sur les bâtiments historiques des Hospices de Lyon, obéissant au modèle en pavillons du XIXe siècle. Dernier entretien avec "Monsieur Veyret", Directeur de l'établissement. Il est filmé dans un bureau cossu, meublé à l'ancienne. Ses propos sont précis, son sourire est crispé. Ses réponses témoignent de son intérêt pour le sort de son personnel. Selon lui, la situation des infirmières à Lyon "est aussi aigüe" qu'à Paris (toujours ce souci de comparer à Paris un établissement d'une autre ville). 300 religieuses suppléent les 700 infirmières recrutées, or le nombre de ces religieuses venant à diminuer, le manque d'effectifs grandit d'autant. Il manque selon lui, deux ou trois cents infirmières pour s'occuper les 7500 "malades aigüs" et 2500 "convalescents ou vieillards" qui sont pris en charge dans l'hôpital. Pour favoriser le recrutement nécessaire, "il est évident qu'il faut multiplier les écoles d'infirmières". Les voies d'amélioration de leurs conditions seraient "une humanisation des horaires" favorisée par une augmentation des cadres, "une augmentation des traitements", perspective pris en main par les "pouvoirs publics". Sur le plan local, il reste à garantir des avantages sociaux tels que "le logement, la nourriture, les loisirs!". Enfin, ce métier d'infirmière demande à être "défini par rapport aux tâches médicales et administratives", c'est-à-dire qu'il faudrait dispenser les infirmières des tâches administratives et repenser la répartition des tâches techniques entre elles-mêmes et le personnel des internes et externes. En France, elles assurent plus de ces tâches que dans d'autres pays, précise le directeur.
Conclusion sur des plans d'une infirmière qui prépare des outils de chirurgie. "Qu'elle soit à Paris, à Nîmes ou à Lyon, les infirmières dont la tâche difficile est maintenant appréciée à sa valeur exacte mérite qu'on s'attache à résoudre leurs problèmes. Nous souhaitons qu'ayant obtenu les avantages auxquels elles ont droit, elles seront plus nombreuses à une profession dont l'intérêt humain ne les a jamais déçues". Retour de la musique jazz incongrue.
Notes complémentaires
- Seconde émission faisant suite à Les infirmières : l'école du dévouement
Références et documents externes
Contributeurs
- Auteurs de la fiche : Joël Danet