La syphilis, l'ennemi public n°1 (1939)
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Main credits
réalisés par le médecin lieutenant-colonel Lucien Jame, professeur agrégé du Val-de Grâce et S. M. Roullet, conférencier d'hygiène sociale
Content
Medical themes
- Pathology of the urogenital system. Urinary and sexual (genital) complaints. Urology
- Communicable diseases. Infectious and contagious diseases, fevers
Theme
« Film de propagande antivénérienne ». Film de prévention contre la syphilis sous la forme d'une conférence menée par un officier médecin, avec des prises de vues scientifiques, des séquences d'animation et de fiction à l'appui.
Main genre
Résumé
Le film met en scène un médecin militaire qui s'adresse directement aux soldats, par le regard et la tournure du discours. A l'appui de celui-ci, des séquences de fiction mettant en scène des personnages qui incarnent les conséquences heureuses ou malheureuses de la conduite que va adopter le soldat-spectateur.
Context
La maladie et sa prise en charge
Affection microbienne contagieuse, la syphilis a pour agent le tréponème pâle et se transmet par les rapports sexuels. Son évolution se fait en trois phases successives : le stade primaire au bout de trois semaines avec l’apparition d’un chancre et de ganglions non douloureux, le stade secondaire entre six semaines et trois ans avec des lésions cutanées, le stade tertiaire avec une dégradation générale de l’organisme puis du système nerveux.
Cependant les évolutions médicales pour la soigner sont de plus en plus perfectionnées. L'intervention des pouvoirs publics par la surveillance sanitaire des marins, des soldats et des prostituées, ainsi que l'introduction de nouvelles thérapeutiques comme l'iodure de potassium, et ceux de l'hygiène, font sensiblement reculer toutes les maladies vénériennes entre le milieu du siècle et 1880. Dès 1905, les Allemands Fritz Richard Schaudinn et Paul Erich Hoffmann découvrent l'agent de la syphilis, un spirille nommé "tréponèm pâle". La même année, Wassermann met au point un séro-diagnostic qui permet d'identifier la maladie dès ses premiers stades. Pour le mettre en évidence, ils emploient le le microscope à fond noir mis au point par Siedentopf et Zsigmondy en 1903. En 1909, Jean Comandon mobilise ce même microscope pour réaliser dans l'Hôpital Saint-Louis des prises de vue micro-cinématographiques du même spirille.
En 1910, Paul Ehrlich et Sahachiro Hatta découvrent l'arsphénamine ou '606' (le produit sera commercialisé sous le nom de Salvarsan). Viendront le '914' ou Néo-Salvarsan puis le '910' ou Stovarsol. Les numéros correspondent à ceux des dossiers dans l'ordre des expérimentations animales. En 1921, Ernest Fourneau, met au point un dérivé de l'arsenic à l'institut Pasteur : le Stovarsol. Ce dérivé est plus stable et se prend par voie orale. En 1934 le principe actif du Salvarsan, découvert en 1920 par Carl Voegtlin et Homer Smith, est introduit par le traitement de la syphilis sous le nom de Mapharsen. L'arrivée des traitements par sulfamides puis par antibiotiques a donné l'espoir de pouvoir éradiquer, sinon toutes, du moins les plus graves des MST, et jusque vers 1965, la diminution continue des nouvelles contaminations l'a laissé espérer.
L'organisation de l'information et de la prévention publique
Par le décret du 27 janvier 1920, Millerand crée le ministère de l'Hygiène, de l'Assistance et de la Prévoyance sociale, à la suite d'une pétition déposée à la Chambre des députés le 27 février 1919 par les associations de lutte contre les fléaux sociaux et les groupes parlementaires qui les représentent. La création de ce nouveau département résulte de la juxtaposition des services du ministère de l'Intérieur, notamment ceux de l'assistance et de l'hygiène, et de ceux du ministère de la Santé, et les services du ministère du Travail, en particulier ceux de la mutualité et de la prévoyance. Mais le ministère de l'Hygiène est peu doté et le ministère du Travail s'oppose au projet et refuse de débloquer les fonds nécessaires. Lorsque, en 1924, le ministère de l'Assistance, de l'Hygiène et de la Prévoyance sociale disparaît et est absorbé par le ministère du Travail, il n'y a plus de place pour le projet. Justin Godard, radical-socialiste déjà engagé dans la lutte contre les fléaux sociaux et M. Gunn de la Fondation Rockefeller élaborent un projet d'Office destiné à coordonner les activités des services d'hygiène et de santé publique. Le 4 décembre 1924, l'Office national d'Hygiène sociale est créé, sous la direction de Jules Brisac, ancien directeur de l'hygiène au ministère de l'Intérieur. Il marque l'institutionnalisation bureaucratique des fléaux sociaux, sous l'influence américaine, puisque les trois quarts du budget du nouvel Office sont consacrés à la lutte contre les maladies infectieuses. Les trois quarts du budget du nouvel Office sont d'origine américaine suite à l'implication de la Mission Rockfeller. Ce n'est que quatre ans plus tard que le budget français dépasse celui de la fondation philanthropique. L'objectif de l'Office était de "rassembler et mettre à jour la documentation sur la situation sanitaire de la France, " en inventoriant les documents relatifs à l'hygiène, aux maladies sociales et à leur prophylaxie ; d'assurer la coordination des efforts entre les pouvoirs publics et les organismes sociaux " Plusieurs services sont créés : Études techniques, Enquêtes départementales, Documentation et statistiques. Enquêtes, documentation et statistiques départementales. Les principales associations y sont représentées : la CNDT, la Ligue contre le péril vénérien, la Ligue nationale contre l'alcoolisme, le Comité national de l'Enfance, la Ligue contre le cancer... Mais la crise économique et les restrictions ont conduit à la suppression de l'Office le 4 avril 1934.
Syphilis et cinéma
Tout le temps où la syphilis s'est imposée comme fléau social, Le problème des médecins demeure l'ignorance de la population devant la menace qu'elle représente. Les campagnes d'information ne parviennent pas à la sensibiliser de façon déterminante. D'où le recours de plus en plus fréquent au cinéma : ce médium attire les foules et présente un réel potentiel pédagogique en présentant des agencements de vues réelles, de schémas animés et d'images microcinématographiques. Le Dr André Cavaillon, responsable au Ministère de l'Hygiène publique, spécialisé dans la prévention du péril vénérien, en est convaincu. Le film Il était une fois trois amis lui paraît exemplaire à ce titre, par l'efficacité de son exposé et son choix de la fiction pour le présenter : "Ce n'est pas uniquement le genre documentaire qui doit uniquement instruire le public. Il faut faire en sorte que le public soit presque inconscient qu'il est en train d'assister à un film d'instruction. Quoique des films dramatiques de ce type soient difficiles à faire, ils peuvent être faits, comme le prouve l'expérience (ainsi Il était une fois trois amis, œuvre du Dr Devraigne, chef de la maternité Laribosière, et de Benoit-Lévy.)" (Dr André Cavaillon, Le cinéma et les campagnes contre les maladies vénériennes).
Syphilis et contexte militaire
Avec la Première Guerre mondiale, la recrudescence de pathologies infectieuses dans le milieu militaire comme la blennorragie et la syphilis a imposé d’ajouter, au moyen de la propagande sanitaire, une nouvelle guerre à celle qui se traduit par le conflit armé. La peur de la sanction ou de la stigmatisation poussait les soldats infectés à ne pas déclarer leur situation, différant de cette façon le traitement nécessaire et favorisant le cycle de contamination. Afin de les inviter à se manifester, les autorités ont senti la nécessité d’adopter un discours compréhensif à leur égard, compte tenu de leur éloignement de leurs familles.
Structuring elements of the film
- Reporting footage : Yes.
- Set footage : Yes.
- Archival footage : Yes.
- Animated sequences : Yes.
- Intertitles : Yes.
- Host : Yes.
- Voix off : Yes.
- Interview : No.
- Music and sound effects : No.
- Images featured in other films : No.
How does the film direct the viewer’s attention?
Le film cherche à interpeller directement les soldats par la présence de l'officier-médecin à l'écran, le regard orienté vers la caméra pendant sa conférence. Il cherche à être le plus direct possible, ses images sont franches, le discours est « d'homme à homme », dénué de charge moralisatrice. De même, les prises de vues sont sans tabous. Les séquences de fiction, rares et empruntées, s'insèrent mal dans le fil de l'exposé. L'équipe de ce film a également réalisé « La blennoragie, danger social » Le traitement est le même, ainsi que la tonalité : dans le cadre d'une conférence cinématographique, l'officier cherche à parler net aux soldats ; se posant moins comme leur supérieur hiérarchique que comme le responsable de leur santé, il met à profit le contexte militaire pour s'exprimer franchement à leur égard.
How are health and medicine portrayed?
Santé et médecine proposent une prise en charge efficace sans risque de stigmatisation du patient infecté
Broadcasting and reception
Where is the film screened?
dans les structures militaires
Presentations and events associated with the film
Audience
militaire (soldats appelés notamment)
Local, national, or international audience
Description
Dans un bureau, un officier se tient debout à côté d'un tableau noir qui porte l'inscription : « Moyenne annuelle des décès en France : 650 000. Moyenne annuelle des décès par syphilis : 140 000. Proportion : 1 décès sur 5. » L'officier cherche la caméra des yeux tandis qu'il parle sans détours : « On l'appelle l'ennemi public n°1. Pour la combattre, nous avons besoin de votre aide. Il faut que vous sachiez d'abord comment elle se manifeste. » Images MG du tréponème pâle : « C'est sa mobilité qui lui permet de pénétrer dans les muqueuses et dans la peau au moment des rapports sexuels mais aussi d'un simple baiser. » Dessin des visages d'un homme et d'une femme en train de s'embrasser, puis d'un homme dont la lèvre inférieure porte un chancre. Ce dernier dessin se fond avec une prise de vue du même sujet, le principe devient réalité. Une main gantée examine une verge portant un chancre. « Quand on le palpe entre les doigts, il donne une impression de dureté. » Le plan s'élargit sur le médecin en train de traiter l'homme atteint. « Si le malade ne se fait pas soigner, la syphilis se répand par le sang ». Schéma animé d'un corps humain parcouru de vibrions blancs. Scène de fiction : un homme et une femme attablés dans un bar. La femme examine dans le miroir de sa boîte à poudre une tache blanche marquant le revers de sa lèvre inférieure, se maquille puis boit une gorgée dans son verre. Quand elle le repose, le garçon arrête son geste pour y boire à son tour. « Évitez l'imprudence de ce jeune homme. La transmission peut se faire par les objets infectés. »L'officier a revêtu une blouse blanche pour nous décrire la seconde période de la maladie. Abcès et ulcères marquent tour à tour un bras, des fesses, un nez effondré. Schéma animé pour expliquer comment l'aorte peut être atteinte, puis une scène de fiction pour nous montrer les effets de cette évolution : un homme assis à son bureau, en train de téléphoner, porte soudain la main à son cœur, lève les yeux au ciel et s'écroule (cette scène théâtrale suscite invariablement l'hilarité du public d'aujourd'hui). Vue sur une femme alitée dans un hôpital, puis sur des enfants atteints, le regard exorbité quand ils dévisagent la caméra. « Je ne veux pas m'attarder sur ces drames mais insister sur l'utilité des examens prénuptiaux. » GP sur une annonce de journal : « Syphilitiques, faites vous soigner à l'Institut de médecine universelle. Vous serez guéris IMMÉDIATEMENT et vous pourrez vous MARIER après deux mois de traitement. Discrétion assurée. » Le commentaire de l'officier : « Méfiez vous des charlatans. Adressez vous à votre médecin de famille. » Dans une chambre d'hôpital, une maman sourit au bébé que l'infirmière lui tend. « C'est sur ce mot que je veux finir : GUÉRIR ». Le mot apparaît en lettres capitales sur l'écran. En animation, la silhouette d'un homme lèvre les bras en signe de victoire.
Supplementary notes
Lucien Jame : né le 20 octobre 1891 à Gourdon (Lot), fils d'un officier de la police, il fait des études à l'école de santé militaire. Pendant la Première Guerre mondiale, sa bravoure au front lui a valu d'être récompensé de plusieurs médailles. Après l'armistice, il soutient une thèse intitulée Contribution à l'étude de la prophylaxie contre les maladies vénériennes (Lyon, 1919). Officier affecté dans le Sud de l'Algérie en 1921, il a publié des articles sur la lèpre, la tuberculose et la malaria. Sa réussite aux concours dans la métropole lui permet de devenir officier – médecin avec le grade de Commandant au Service de Santé de Toulouse où il collabore avec Nicolas Dobo. En août 1943, il atteint le sommet de sa carrière en prenant le commandement du Service de Santé à Alger, puis à Rabat. Il a supervisé les opérations sanitaires pendant les campagnes d'Italie, de France et d'Allemagne. Grand-Officier de la Légion d'Honneur, il prend sa retraite avec le grade de Général, continuant néanmoins d'oeuvrer dans la prévention jusqu'à sa mort le 16 juin 1969.
References and external documents
Nicolas Dobo et Pierre Jame, "Le Médecin Général Inspecteur Lucien Jame (1891-1969)", in Histoire des sciences médicales, vol 30, n°3, pp.381-388. (Voir ci-dessous.)
Contributors
- Record written by : Joël Danet
- 2 Traducteurs_vers_anglais : Michael Craig
- Transcription French : Michael Craig
- Subtitles English : Michael Craig