Ils ont votre âge n°3 : un moment dans la vie de Lætitia (1982)

De Medfilm



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Titre :
Ils ont votre âge n°3 : un moment dans la vie de Lætitia
Série :
Année de production :
Pays de production :
Réalisation :
Durée :
21 minutes
Format :
Parlant - Couleur - 16 mm
Langues d'origine :
Sous-titrage et transcription :
Sociétés de production :
Commanditaires :
Archives détentrices :
Corpus :

Générique principal

(Générique de début)
Le SCEREN – [ CNDP – CRDP ] et l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3 présentent / Un film de la Cinémathèque centrale de l’enseignement public, principal distributeur de documentaires de 1920 à 1996 dans les établissements scolaires de la maternelle à l’université. / Ils ont votre âge n°3 un moment dans la vie de LAETITIA

(Générique de fin)
Dans la série animée par France NGO-KIM / c'était une émission de Janine CODOU / avec la participation de Catherine LANOUVELLE, Thérèse DABOUD, Géraldine VAUCONSANT / image : François CHARLET, Jacky PESCHARD / son : Marcel BROSSARD, assisté de : Olivier VARENNE / mixage : Claude ORHON / montage : Josette JOURDAN / chef de production : Raymonde TENDRON / assistant de réalisation : Jean-Claude RABODON / réalisation : Jacqueline MARGUERITTE / Ministère de l’éducation nationale CNDP – France - 1982 / Accompagné de la musique O SUPERMAN de Laurie Anderson

Contenus

Thèmes médicaux

Sujet

Un aperçu de la vie quotidienne de Laetitia, 8 ans, atteinte de surdité : sa scolarité en milieu ordinaire, ses interactions sociales, ses activités dans différents environnements.

Genre dominant

Documentaire

Résumé

Portrait de Lætitia, une enfant de 8 ans et demi, élève en CE2 et sourde. Cette mise en lumière souligne le soutien de sa famille, de l'école et de son enseignante spécialisée qui lui permettent de suivre une scolarité ordinaire. À travers divers exercices, on observe les efforts de Lætitia pour progresser dans l'apprentissage du langage.
Elle exprime sa joie de vivre lors de ses cours de danse et dans ses interactions avec ses camarades de classe. L’objectif de ce court-métrage est de montrer que le handicap de cette enfant n’est que sensoriel, et non social ou cognitif, et qu'une intégration scolaire est possible, et même assez facile, pour des enfants présentant une surdité.

Contexte

Ce court métrage a été tourné dans un contexte triple : celui du bannissement de la langue des signes dans l'éducation et l'instruction des personnes sourdes et malentendantes en France qui découle du Congrès de Milan (6-11 septembre 1880) d'une part, celui du "Réveil sourd" (à partir de la fin des années 1970) d'autre part, et enfin celui de la loi d'orientation en faveur des personnes handicapées de 1975.

1. Le Congrès de Milan sur "l'amélioration du sort des sourds-muets" (6-11 septembre 1880)
Il s'agit du troisième congrès international pour l'amélioration du sort des sourds (les deux premiers ont eu lieu à Paris en 1878 et Lyon en 1879). Les participants au Congrès de Milan sont des spécialistes de l'enseignement pour les personnes sourdes, essentiellement italiens et français (ce qui explique que ces résolutions aient été très peu diffusées dans les pays anglo-saxons). Seuls trois de ses participants sont sourds.
Les résolutions qui ont la plus grande influence sur l'enseignement aux personnes sourdes sont les suivantes :
"1. La Convention, considérant l'incontestable supériorité de l'articulation sur les signes pour rendre le sourd-muet à la société et lui donner une connaissance plus complète de la langue, déclare que la méthode orale doit être préférée à celle des signes dans l'éducation et l'instruction des sourds-muets.
2. La Convention, considérant que l'usage simultané de l'articulation et des signes a l'inconvénient de nuire à l'articulation, à la lecture labiale et à la précision des idées, déclare que la méthode purement orale doit être préférée."
"8. Considérant que l'application de la méthode purement orale dans les institutions où elle n'est pas encore pratiquée doit être faite de manière prudente, graduelle et progressive pour éviter la certitude d'un échec, recommande :
a) Que les élèves nouvellement admis dans ces écoles doivent y former une classe particulière, où l'instruction pourra être donnée par la parole.
b) Que ces élèves doivent absolument être séparés des autres trop avancés pour être instruits par la parole, et dont l'éducation sera terminée par les signes.(...)"

La langue des signes n'est donc pas interdite de façon formelle (légale) et générale, comme on le dit souvent. Selon Yann Cantin, spécialiste de l'histoire des sourds et de la langue des signes, "le choix de l’utiliser au sein des écoles pour sourds pour les enseignements a été laissé à la discrétion des directions de chacune d’entre elles. Cependant, celles qui allaient dans ce sens se voyaient retirer leurs subventions allouées par l’État. L’objectif implicite de la mesure était de juguler la langue des signes en faveur de la diffusion du français oral. Mais à cette époque, des langues régionales comme le Breton, le Basque, l’Alsacien, ou encore le Corse étaient elles aussi stigmatisées et subissaient ce même traitement. L’objectif alors était d’uniformiser la langue française sur le territoire. Au sein des écoles pour sourds, ce sont les directions qui ont imposé cette 'interdiction' de principe en bannissant la langue des signes des enseignements et en renvoyant un à un les professeurs sourds. Mais dans la vie quotidienne, la langue continuait à être pratiquée, dans la rue ou lors des rencontres sportives entre sourds. Toutefois, les sourds dans les campagnes subissaient davantage la pression de l’oralisme puisqu’ils étaient plutôt isolés les uns des autres et ne pouvaient donc pas la pratiquer comme en ville." (Consulté le 7 janvier 2025.)

Ainsi, tout est axé sur l'oralisation. Ce terme fait référence à l’utilisation de la communication orale et de la lecture labiale par une personne sourde. Son objectif est non seulement de permettre l'intégration dans la société des entendants mais aussi de faire disparaître le handicap (particulièrement visible quand on s'exprime dans une langue gestuelle) qui est considéré comme gênant, voire comme une "tare". L'oralisation exclusive exige des personnes sourdes qu'elles s’adaptent et se conforment à la société entendante de façon très univoque.

2. Le Réveil sourd
Il s'agit d'un mouvement social et culturel initié par des personnes sourdes et lancé dans les années 1970. Il vise la promotion des droits des personnes sourdes et la réhabilitation de la langue des signes française, ce qui implique de fait une éducation bilingue (LSF et français écrit pour les élèves concernés), tout en luttant contre les discriminations. Ce mouvement joue un rôle crucial dans la reconnaissance et la valorisation de la langue des signes en France. Ses tenants plaident pour une inclusion véritable et une prise en compte des besoins spécifiques de la communauté sourde dans tous les aspects de la société. (On notera qu'on ne perçoit aucune référence à ce mouvement dans ce documentaire qui lui est pourtant contemporain.)
Leurs efforts aboutissent à la reconnaissance du droit à la "liberté de choix entre une communication bilingue langue des signes-français - et une communication orale" dans l'éducation des enfants sourds par l'article 33 de la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales (consulté le 7 janvier 2025). Cet article est abrogé par la loi pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées du 11 février 2005 qui reconnaît la langue des signes française comme "linguistiquement légale et comme langue d'enseignement des sourds français" (consulté le 7 janvier 2025). Ce statut est ensuite confirmé par la circulaire 2008-109 du 21-8-2008 du ministère de l'Éducation nationale qui reconnaît à la langue des signes française un statut de langue de la République au même titre que le français (consulté le 7 janvier 2025).
Cependant, une demande de la communauté sourde d'inscrire la langue des signes française dans la Constitution (proposition de loi n°3895 du 17 février 2021) (consulté le 6 janvier 2025)) n'avait pas abouti au moment de la rédaction de cette fiche (janvier 2025). Si cette demande a bien été renvoyée à la Commission des lois constitutionnelles, le "dossier législatif" correspondant, publié sur le site internet de l'Assemblée nationale est vide, ce qui indique qu'elle n'a encore jamais été examinée par la Commission, qu'aucun rapporteur n'a été désigné et qu'elle n'a pas donné lieu à débats (sinon ces derniers seraient disponibles). Cette situation n'est pas rare : les propositions de loi renvoyées en commission peuvent ne jamais être effectivement mises à l'ordre du jour de la commission, en particulier quand il y a peu de chance que cette proposition aboutisse à brève échéance.

3. L'intégration scolaire des personnes porteuses de handicaps
En parallèle, une prise de conscience de la situation des personnes porteuses de handicap en général a lieu au niveau national. Elle débouche le 30 juin 1975 sur une loi d'orientation en faveur des personnes handicapées qui instaure notamment l’obligation de l’éducation des enfants handicapés. (Consulté le 7 janvier 2025.)
Les premières circulaires sur l’intégration scolaire (Circulaire n° 82-2 et n° 82-048 du 29 janvier 1982, Mise en œuvre d'une politique d'intégration en faveur des enfants et adolescents handicapés. (Consulté le 12 décembre 2024.) et Circulaire n° 83-082, 83-4 et 3/83/S du 29 janvier 1983, Mise en place d’actions de soutien et de soins spécialisés en vue de l’intégration dans les établissements scolaires ordinaires des enfants et adolescents handicapés, ou en difficulté en raison d’une maladie, de troubles de la personnalité ou de troubles graves du comportement. (Consulté le 12 décembre 2024) marquent la volonté de l’Éducation nationale de refuser l’exclusion des enfants handicapés et de réussir leur intégration. Ces circulaires mettent notamment en place le Projet Éducatif Personnalisé qui devient le fil rouge de la scolarisation des enfants handicapés.


Présence des personnes sourdes et de la LSF dans le paysage audiovisuel français et international
La première émission en langue des signes (avec voice over) diffusée à la télévision française s'appelle Mes mains ont la parole. Marie-Thérèse Abbou (de 1979 à 1986) puis Philippe Galant (jusqu'en juin 1988) y apparaissent plein cadre pour raconter une histoire pour enfants. L'émission disparaît en même temps que Récré A2 dans laquelle elle s'insérait.
La première émission pour adulte interprétée en langue des signes à la télévision française est diffusée le 10 septembre 1979 sur Antenne 2. Il s'agit d'un bulletin d'information de 4 minutes environ présenté par le journaliste Noël Mamère et diffusé juste avant l'émission C'est la vie. L'interprète s'appelle Claude Marcotte. Il apparaît en incrustation à gauche du présentateur et occupe presque un tiers de l'écran. Cependant, on observe que seules les séquences où le journaliste est visible à l'écran sont traduites. Lorsqu'un reportage est diffusé, l'interprète disparaît, ce qui a dû rendre compliquer la tâche des spectateurs sourds et malentendants qui ne disposaient alors que d'une partie des informations.

Le 9 janvier 1989, Loud as A Whisper, l'épisode 2 de la saison 5 de la série américaine Star Trek, The Next Generation se déroule sur une planète dont les habitants sont sourds parce qu'il leur manque le "gène de l'audition". La série a été diffusée en France sur Canal Jimmy à partir de 1996.

Éléments structurants du film

  • Images de reportage : Oui.
  • Images en plateau : Non.
  • Images d'archives : Non.
  • Séquences d'animation : Non.
  • Cartons : Non.
  • Animateur : Non.
  • Voix off : Oui.
  • Interview : Oui.
  • Musique et bruitages : Oui.
  • Images communes avec d'autres films : Non.

Comment le film dirige-t-il le regard du spectateur ?

L'objectif de ce documentaire est de montrer la réussite de l'intégration scolaire d'une enfant porteuse de handicap (en l'occurrence une surdité), à une époque où les réticences des établissements scolaires sont encore fréquentes malgré les récentes dispositions légales. À l’aide de nombreux gros plans sur le visage de la petite fille, le spectateur se retrouve face à une enfant souriante, curieuse et avide d’apprendre et d’évoluer avec ses camarades. Dans ce reportage, Laetitia n’est pas définie uniquement par sa surdité : des petits moments de vie, de jeu et d’interaction révèlent sa personnalité.
En ce sens, les aspects négatifs ne sont pas présentés, comme la grande fatigue potentielle d'une enfant qui doit fournir un travail supplémentaire pour suivre en classe et qui a beaucoup d'activités extra-scolaires, au profit de scènes plus intimes. Nous observons Laetitia dans ses différents lieux de vie : à l’école, avec son enseignante spécialisée, ainsi qu’à son cours de danse et finalement, au cœur même de son intimité, chez elle, en compagnie de sa mère. Par là, le réalisateur amène le spectateur à diriger son regard vers la notion implicite de "normalité", malgré le handicap. Laetitia est montrée comme une enfant très entourée, à l’école et en cours de danse, où elle retrouve ses amies. On la voit tout à fait capable de travailler, jouer et s’épanouir.

D'autre part, la mise en scène porte fréquemment le regard du spectateur sur les visages des protagonistes. En effet, à l’aide de nombreux gros plans et focus sur les visages, la caméra reproduit la vision de Laetitia directement, elle qui doit se concentrer sur les visages pour comprendre son entourage grâce à la lecture labiale. Cela forme un parallèle et force le spectateur à se concentrer, lui aussi, sur les visages en écoutant les personnes qui parlent.

À une époque où la prévention et la communication autour du handicap étaient encouragées pour contrer les nombreux stéréotypes liés aux capacités et à l'intégration des personnes atteintes de handicap, ce reportage veut offrir une preuve tangible que la surdité ne constitue en aucun cas un obstacle au développement et à l'intégration sociale (notamment scolaire). Même si, au vu de ce contexte, il était novateur de filmer le quotidien d’une enfant sourde à des fins de sensibilisation, il n’en reste pas moins que la démarche est maladroite. À trop mettre l’accent sur la normalité de la situation, cette dernière pose finalement question. C’est une pathologie dont il faut comprendre les conséquences pour l’appréhender au mieux.
Dans la mesure où le film a été réalisé à des fins de diffusion dans les établissements scolaires, il était important que le message passe clairement : ne pas discriminer les élèves porteurs de handicap, et dans ce cas, atteints de surdité. Ils jouent comme les autres, ressentent et comprennent comme les autres. Mais le travail sur la compréhension de la maladie n'a pas été fait.

Comment la santé et la médecine sont-elles présentées ?

Ce reportage se concentre sur l’intégration scolaire. Les aspects médicaux de la surdité de Laetitia ne sont absolument pas abordés. Le spectateur ignore notamment quand le diagnostic de surdité a été posé et le degré de la déficience auditive. Or ces informations auraient obligé le documentaire à nuancer son propos car un élève porteur d'une surdité profonde aurait certainement plus de difficultés et aurait besoin de davantage de soutien que Laetitia dont on peut imaginer qu'elle présente une surdité moyenne à sévère.
Mais un pont peut tout de même être établi entre les deux aspects, notamment en ce qui concerne les choix éducatifs pour les personnes porteuses de surdité, qui ont toujours été très dépendantes des avancées en médecine. La médecine permettant notamment de nos jours des dépistages de plus en plus précoces, la détection des besoins et spécificités individuelles, finit forcément par se refléter sur les prises en charge, notamment éducatives.

La santé de Laetitia est présentée indirectement sous différentes formes : d’abord d’un point de vue externe qui montre les différentes activités auxquelles elle peut participer malgré son handicap mais aussi en l'interrogeant directement sur son ressenti. Le but est surtout de montrer le quotidien des personnes porteuses d’handicap. Dans le cas de cette enfant, il y a un suivi langagier régulier, avec un lien qui est fait entre l’enseignante spécialisée, la maîtresse et la maman de Laetitia. En revanche, on ignore si elle bénéficie de séances d'orthophonie en dehors de l'école mais c'est assez compréhensible dans la mesure où le documentaire se focalise sur l'intégration scolaire.

Ensuite, on voit que la petite fille a une vie sociale assez développée, entre l’école et les cours de sport (notamment la danse, mais elle en cite d’autres). Cela contribue directement à sa santé puisqu’on sait que des interactions avec les autres contribuent au développement et à la rééducation de l’enfant atteint d’un handicap. Ainsi, cela nous permet d’avoir un point de vue à la fois objectif et subjectif de la situation. Hormis les techniques de rééducation que met en place l’éducatrice, le spectateur n'a pas accès au suivi médical de l’enfant. Le but est de permettre à Laetitia de comprendre, et de se faire comprendre en retour.
"Elle n’entend pas mais à appris à lire sur les lèvres", affirme la voix off à 2 minutes. (Cette phrase est probablement partiellement fausse, l'enfant a manifestement des restes auditifs.) Laetitia répète les patterns sonores en copiant la forme des lèvres de ses interlocuteurs, d’où l'intérêt de l'usage du LPC et qui permet à la fillette de distinguer les sosies labiaux et les phonèmes qui n'ont pas d'image labiale. Bien que son langage soit grammaticalement correct, Laetitia n'est pas toujours facile à comprendre. Il reste manifestement du travail à faire pour améliorer son articulation. On observe également chez elle une intensité sonore trop élevée, une prosodie peu variée, un rythme de parole haché et une exagération des expressions faciales.

Laetitia porte des prothèses auditives. On la voit les enlever lors de sa première leçon avec Thérèse. Par la suite, on les voit posées sur la table mais aucune parole n'est prononcée à leur sujet, au point qu'un spectateur un peu distrait pourrait les rater. Le reste du temps, la coiffure de Laetitia masque ses oreilles et donc ses prothèses, c'est-à-dire que l'élément visuel qui permettrait d'identifier son handicap est rendu invisible.

Diffusion et réception

Où le film est-il projeté ?

Diffusion télévisuelle

Communications et événements associés au film

Public

Public scolaire, grand public.

Audience

Descriptif libre

Présentation de Laetitia
Le film débute sur un cours de danse. Des fillettes bougent au rythme d’un tambourin. La scène se focalise directement sur le tambourin, puis alterne entre gros plans sur l’instrument et plans d’ensemble en contre-champ sur les enfants qui dansent. Après avoir balayé la salle en plan large, la caméra suit et se resserre sur une fillette en particulier, pour montrer que parmi toutes ces jeunes filles, c’est d'elle qu'il va être question. Elle réalise l’exercice comme ses camarades, parfois avec un petit temps de retard ou en prenant exemple sur elles. Une voix-off la présente : "Laetitia a 8 ans".(01:17)

Le quotidien de Laetitia à l’école
Dans la salle de classe (01:18), la maîtresse fait une dictée tirée du livre Le Hobbit de J.R.R. Tolkien. Laetitia est assise au plus près de l'institutrice, c'est-à-dire à son bureau. On commence par prendre la classe en plan large, puis la caméra se resserre sur Laetitia qui écrit, pour ensuite revenir sur un plan un peu plus large sur l'enfant et son enseignante.
Voix off : « Laetitia est au cours élémentaire. Elle n’entend pas mais a appris à lire sur les lèvres ». Effectivement, elle dirige automatiquement son regard vers les lèvres de son interlocutrice dès que celle-ci commence à parler. Cette affirmation du commentaire selon laquelle elle n'entend pas (du tout) est probablement partiellement fausse, d'une part parce qu'on vient de la voir réagir au son du tambourin, et d'autre part parce qu'on découvrira par la suite qu'elle porte des prothèses auditives et que son enseignante spécialisée lui fait faire des exercices de discrimination auditive. Elle a donc forcément des restes auditifs (sur lesquels s'appuie sa rééducation).
Les plans alternent à plusieurs reprises entre un gros plan sur Laetitia lorsqu'elle s’exprime et un plan d’ensemble lorsque la maîtresse lui parle. Il y a également un véritable focus en très gros plan sur les lèvres de l'enseignante et de son élève. Ces images rapprochées soulignent les difficultés de discrimination auditive de la petite fille car on voit son hésitation. Elle a du mal à comprendre et à écrire les mots dont les phonèmes n'ont pas d'image labiale comme le /k/ et le /R/ du mot "obscurité". De même, elle bute sur le mot "renâcle" qui lui est inconnu. La maîtresse insiste et lui présente une comparaison : la clé, pour les sons /kl/ qu’elle n’a pas perçu. Même si la maîtresse semble faire des efforts, elle a un air un peu agacé. Elle perd son calme après plusieurs erreurs et s'exclame : "Tu écoutes ce que je te dis ?", ce qui bien sûr est un non-sens puisque Laetitia est malentendante. Manifestement, personne n'a donné à l'institutrice les bases de phonétique qui lui permettraient de comprendre où se situe la difficulté pour son élève. D'autre part, bien qu'un poster montrant les cinq positions de la main du langage parlé complété (LPC, à l'époque également appelé par son nom anglais cued-speech) soit affiché dans la salle de classe (on l'aperçoit derrière Laetitia à 02:50), la maîtresse ne semble pas avoir recours au LPC ni y être formée.
Les autres élèves, entendants, suivent également la dictée. Laetitia est tout aussi impliquée au sein de la classe que les autres élèves : elle distribue les feuilles, discute avec ses camarades.
La caméra se concentre beaucoup sur la fillette assise près de la maîtresse. Mais elle nous permet aussi d'observer la classe et une discussion entre Laetitia et une camarade.
Voix-off : "Ses camarades savent lui parler. L’attention que lui porte son institutrice, ses encouragements, font de Laetitia une écolière comme les autres". Le choix de l'expression "comme les autres" est très important car il apporte une notion de normalité, d’inclusion, qui est l'un des thèmes clés de ce reportage. (04:15)

Petit moment de vie : la récréation
C'est l’heure de la récréation. Laetitia est montrée de loin, jouant avec d’autres enfants. Un gros plan sur son visage nous permet de la voir parler avec ses camarades. De plus, on peut observer que les plans se succèdent, avec toujours la petite Laetitia dans le cadre, en passant de gros plan, à un plan rapproché, à un plan large, l’englobant dans la masse des enfants.
Cette capture d’un instant bref d’une enfant qui joue comme n’importe quel autre élève, mélangée à la foule, renforce la volonté du film de nous montrer une enfant normale, parfaitement intégrée et adaptée à la vie en groupe.(4:42)

Thérèse, l’enseignante spécialisée
Laetitia est assise dans une salle de classe inoccupée, en face d’une adulte. Laetitia commence par enlever ses prothèses auditives qu'elle pose sur la table. On remarque que la voix off ne fait aucun commentaire à leur sujet. À aucun moment les prothèses, élément particulièrement caractéristique d'une situation de surdité, ne sont mentionnées dans ce documentaire. Laetitia les remplace par un casque branché sur un amplificateur auquel est également relié le micro dans lequel parle l'adulte. Dans cette séquence, on passe d’un plan rapproché, à l’échelle de Laetitia, a un plan moyen pour révéler l'adulte et le bureau, sans pour autant montrer toute la pièce. L’emphase est donc vraiment mise sur l’espace de travail qui forme le lien entre Laetitia et l'adulte. Cette dernière fait faire un exercice d'éducation auditive à l'enfant qui doit reconnaître le nom de ses camarades et les répéter. La jeune femme cache sa bouche quand elle parle, afin que Laetitia ne lise pas sur ses lèvres. Malgré cela, la fillette s’en sort bien.
Elle est beaucoup poussée à l’oralisation : l'adulte lui demande de choisir 7 prénoms, de nommer des sports, de raconter ce qu’elle fait le lundi après-midi, de décrire des images, etc.
La caméra alterne entre les plans rapprochés et les gros plans sur le visage de Laetitia et de Thérèse, et des plans moyens du bureau. Cela se fait quasiment en une séquence, avec peu de montage et de découpage. Cela illustre totalement qu’elles sont en plein échange et travaillent en coopération.
La voix off présente la situation et l'adulte présente une vingtaine de secondes après le début de la séquence : "Depuis la maternelle, Laetitia et Thérèse travaillent ensemble à l’école une heure par jour. Thérèse est professeure spécialisée : elle apprend aux sourds à s’exprimer oralement. Aujourd’hui, Laetitia expérimente un amplificateur qui augmente considérablement la puissance des sons." (Plus loin dans le documentaire, la mère de Laetitia fait référence au soutien qu'apporte Thérèse à Laetitia, soutien rendu possible par la proximité de cette école primaire avec un établissement spécialisé pour jeunes sourds.) Nous avons ici l'illustration d'une méthode qui incite les enfants sourds et malentendants à produire de la parole et à développer leurs restes auditifs. Le fait de ne pas équilibrer cette méthodologie en enseignant également la langue des signes montre une volonté de mise en conformité des personnes sourdes au monde des entendants et d'invisibilisation de leur handicap, typique des années 1980.
Par moment, Thérèse utilise également un codage phonologique gestuel pour aider Laetitia à identifier le bon phonème. Il s’agit du LPC (Langage parlé complété). Les différentes formes de la main droite et sa position par rapport au visage servent à coder les syllabes, ce qui permet à Laetitia de différencier les sosies labiaux et de percevoir les phonèmes qui n'ont pas d'image labiale. Cependant, le principe du LPC est d'être utilisé le plus souvent possible, par le plus grand nombre de personnes possibles autour de l'enfant, pour faciliter l'apprentissage du langage dans toutes ses dimensions. Or on constate que Thérèse est la seule à avoir recours au LPC et encore, de façon très occasionnelle, ce qui ne permet certainement pas à Laetitia de tirer tous les bénéfices de cette méthode. Par exemple, lors de la séquence de dictée du début du documentaire, si l'institutrice avait codé le mot "renâcle" à l'aide du LPC, Laetitia aurait pu identifier les phonèmes invisibles beaucoup plus facilement. De même, on pourrait s'attendre à ce que ses parents l'utilisent dans toutes leurs interactions avec elle, qu'il s'agisse des devoirs à la maison ou de leurs activités les plus banales et quotidiennes. Malgré cela, les rares codages réalisés par Thérèse lorsqu'elles travaillent le vocabulaire sportif permettent manifestement à Laetitia d'apprendre et de répéter correctement un nouveau mot (par exemple "jogging", /dʒogiŋ/, dont les deux dernières consonnes sont invisibles.)
Scène d’interview centrée sur Thérèse (8:18) avec un plan rapproché puis, dans la même séquence, zoom pour former un gros plan sur son visage ou ses lèvres. On ne voit jamais dans le film le visage de la personne qui questionne les protagonistes. L’accent est vraiment mis sur l’enfant et les personnes de son entourage.
Journaliste : "Les signes que vous utilisez avec Laetitia font-ils partie du langage gestuel que l’on voit à la télévision, dans les émissions pour les sourds ?" Cette question fait référence à l'apparition sur la chaine de télévision Antenne 2 de la LSF depuis quelques années, langue (et monde culturel) auxquels Laetitia n’a pas accès. Manifestement pour la réalisatrice (et/ou son commanditaire), il est important de préciser que la langue des signes ne fait pas partie des apprentissages de Laetitia et qu'elle est notamment exclue du milieu scolaire.
Thérèse : "Non pas du tout, ce n’est pas la langue gestuelle, c’est simplement des signes qu’on fait autour du visage pour préciser l’image des lèvres quand on parle le français. Lorsqu’on dit /bato/ ou /mãto/ [bateau ou manteau], vous avez la même image labiale, et l’enfant sourd ne peut pas reconnaître les deux mots." Elle mentionne aussi les phonèmes non visibles : /R/, /k/, etc. Au moment où elle donne ces exemples, la caméra fait un très gros plan sur ses lèvres. Cela force le spectateur à se concentrer sur la lecture labiale, comme le ferait Laetitia par exemple, et met en lumière la difficulté de la tâche. La journaliste parle de ces "émissions pour les sourds" comme d’un nouveau concept un peu mystérieux dont elle ignore le sens et le langage. Cela révèle le contexte de l’époque où la langue des signes française n’est pas encore commune et répandue, alors qu'il est désormais commun de voir des traductions en langue des signes ou des sous-titres adaptés au contenu audiovisuel.
Laetitia fait remarquer à Thérèse que leur séance de travail est terminée. Elle s'exclame qu'elle a faim en se frottant énergiquement l'estomac. Avant de la laisser partir, Thérèse écrit comme chaque jour les mots et les expressions qu'elles ont étudiés dans un cahier de liaison destiné à la maman. Cette dernière pourra ainsi les réemployer au quotidien afin d'enrichir le vocabulaire de Laetitia.

Apprentissage à la maison
Dans la chambre de Laetitia. Elle est assise à un petit bureau, sa mère est assise sur le lit, à sa hauteur. Elles revoient ensemble ce qui a été travaillé à l’école et préparent les notions du lendemain, par exemple les mots "voute" et "effroyable". Laetitia est très attentive et capable de dire qu'elle n'a pas compris quelque chose.
Pendant cette séquence, le cameraman fait un travelling avant puis s’arrête sur un plan rapproché de Laetitia et sa maman. Ensuite, la maman parle en hors champ, la caméra est portée en gros plan sur le visage de Laetitia avant de s’écarter, c’est un dézoome pour voir toute la pièce. Cela pose le cadre pour le spectateur.
Commentaire : "Dire et redire des mots pour bien les connaître n’est qu’une partie du travail quotidien de Laetitia. Il faut aussi apprendre la veille les mots et les expressions qui seront utilisés le lendemain." Dans toute cette émission, le travail du langage est présenté uniquement comme un travail d'acquisition de vocabulaire. Il n'est jamais fait mention du travail de la syntaxe, ni même de l'articulation ou de la prosodie.
Encore une fois, c'est Laetitia qui décide de la fin de la séance de travail. Elle lit une dernière phrase puis demande avec vivacité : "C'est fini, Maman, s'il te plaît, j'arrête de travailler." Elle quitte son bureau en chantonnant : "C'est fini, le travail ! C'est fini, le travail !" (11:47)

Petit moment de vie : le jeu
Laetitia joue avec un bateau de pirates Playmobil (11:48). Ses faits et gestes sont suivis par un travelling latéral et des plans rapprochés. Elle invente des histoires, fait parler les personnages. Ses dialogues sont bien construits (en revanche, comme dans le reste du reportage, elle parle trop fort et en articulant de façon exagérée) et la scène est très vivante. Le but ici est de nous montrer, comme pour la scène de récréation, une enfant qui aime rêver, qui aime jouer, seule ou avec des amis. C’est parce qu’elle a été éduquée à l'oralité qu’elle peut utiliser le langage parlé pour communiquer et même jouer. L'accent est mis sur la "normalité" de son comportement.(12:14)

Interview de la mère
On assiste ensuite à une interview de la maman, assise sur un canapé avec un plan d’ensemble sur la scène, entrecoupée de moments en classe pour illustrer les propos. La journaliste lui demande : "Travaillez-vous ainsi chaque soir avec votre fille ?" La mère se dit obligée de le faire car Laetitia n’a jamais entendu les mots : il faut donc les lui présenter et les lui expliquer, sinon le lendemain en classe elle n’aura pas accès au sens. C’est finalement tout le problème d’amener le son en priorité et non le sens : il faut sans cesse rattraper le retard, apprendre par cœur la prononciation, le sens du mot nouveau, jamais perçu ni utilisé. On notera cependant que ce travail serait grandement simplifié et l'accès aux mots nouveaux facilité pour Laetitia si le LPC était utilisé de façon beaucoup plus généralisée dans l'entourage de Laetitia, a minima par ses parents, son institutrice et son enseignante spécialisée.
Pour illustrer ces propos, nous sommes de retour à l’école dans un moment de lecture d’une histoire par la maîtresse (12:47). Laetitia est toujours placée au centre du champ de vision, ce qui incite le spectateur à porter son attention sur elle. Laetitia est au milieu des autres enfants et interagit aussi avec la maîtresse en posant des questions et en participant activement. Elle est assise à côté de son enseignante pour pouvoir suivre dans le livre et se tourne régulièrement pour regarder ses lèvres. Cependant, elle serait beaucoup mieux placée si elle était assise en face de l'institutrice, ce qui lui permettrait de voir son visage directement, sans avoir besoin de tourner la tête. Dans le livre, Laetitia retrouve les mots qu’elle a révisés la veille. Elle comprend et participe grâce au travail quotidien fait à la maison. Cependant, il arrive qu'elle parle en même temps que la maîtresse. D'ailleurs, on a pu remarquer au cours de séquences précédentes qu'elle ne respecte pas toujours le tour de rôle dans un dialogue ou une conversation.
Cette séquence commence par des gros plans avant de se détacher de la petite fille pour montrer l’ensemble de la classe en travelling latéral. Ensuite, on revient très vite à un plan rapproché sur Laetitia.
Nous sommes de retour à l’interview avec un plan américain suivi d’un travelling sur le visage de la mère. (14:02) La journaliste lui demande : "Vous habitez la banlieue parisienne : pourquoi Laetitia va à l’école dans le centre de Paris, assez loin de chez vous ?" Elle répond qu'elle voulait une école qui accepte Laetitia et son handicap de son plein gré, ce qui n’a pas été le cas dans sa commune. Dans l’école où elle se trouve, par sa situation géographique, elle bénéficie du soutien d’un professeur de l’institut des sourds qui vient chaque jour et travaille en coordination avec sa maîtresse et elle-même. Cette réponse met en lumière les difficultés de trouver un suivi pédagogique adapté. Sans développer, il est sous entendu que les écoles précédentes ne l'ont pas acceptée, nous laissant imaginer les discriminations auxquelles Laetitia et ses parents ont dû faire face.
Quant à l'établissement spécialisé mentionné par la mère de Laetitia, il s'agit probablement de celui qui porte actuellement le nom d'Institut National de Jeunes Sourds de Paris, rue Saint-Jacques, et qui a été fondé par l'abbé de l'Épée en 1791. Son rôle est historique, pionnier, et continue à être au cœur de l’enseignement, de la pédagogie, de la rééducation, de l’évolution du statut et des droits des personnes atteintes de surdité.
Travelling d'accompagnement sur la voiture qui conduit Laetitia à l'école(14:30). En voix off, la mère explique qu’elle et le père de Laetitia se relaient pour la déposer en classe. L'enfant sort de la voiture et son père l'embrasse. D'autres élèves entrent dans l'école. Nous sommes en hiver, le jour commence à peine à se lever. La caméra remonte au-dessus de la porte d'entrée pour se fixer sur le drapeau français et une grande inscription : "République française, Ville de Paris, École primaire, Ve arrondissement, (...)" (la fin est illisible). C'est un rappel du contexte politique, légal et idéologique dans lequel s'inscrit l'intégration scolaire de cette enfant handicapée.(15:12)

Le lien entre famille et école
Nous sommes ensuite de retour dans la salle où Laetitia travaille avec Thérèse. "Comme chaque jour, à 11h, Thérèse, doucement, patiemment, en jouant parfois, introduit peu à peu Laetitia dans le monde des entendants." Laetitia s’exerce aux tables de multiplication en jouant avec des oranges et de petits cochons en plastique qu'elle échange avec Thérèse. Les différentes activités sont présentées à l’aide de gros plans sur le matériel, les mains, le cahier de l’élève… À la sortie de l'école, (16:09) la mère rencontre la maîtresse (qui a enfin un air un peu plus détendu, peut-être parce que la caméra est plus loin d'elle que quand elle est filmée en classe) et demande comment s'est passée la journée. Grâce au plan d'ensemble, on observe la classe devant le bâtiment et les deux adultes qui surplombent le groupe. Il y a entre Géraldine, l’institutrice, et la maman une véritable complicité pour faciliter la vie d’écolière de la petite fille, adapter au mieux les enseignements et les apprentissages. Un plan d’ensemble montre de le départ de la voiture de la mère : le spectateur comprend que la journée d’école est finie pour Laetitia, elle rentre chez elle.
À la maison, travelling en gros plan sur le visage de Laetitia, puis de sa mère. Un plan d’ensemble montre qu'elles sont installées dans un salon. La mère est interrogée (16:50) : "Ne pensez-vous pas qu'à la maison et à l’école, c’est demander beaucoup d’efforts à une petite fille ?" Effectivement, pendant cette séquence, Laetitia reste blottie contre sa mère en suçant son pouce. Elle semble vraiment fatiguée. Sa mère répond: "Oui c’est évident, je crois que c’est indispensable quand on a fait le choix d’une scolarité normale."
Tout au long du reportage, l’accent est mis sur cette "scolarité normale" : elle est ici enfin nommée. Pour la permettre, ce genre d’efforts (échanger avec le corps éducatif, thérapeutique et pédagogique) est plus que nécessaire. (17:18)

Interview de Laetitia
Laetitia raconte à la journaliste ses activités extra-scolaires : peinture le mercredi matin, gymnastique japonaise, cinéma, promenade au parc avec sa maman, danse... Cette scène est importante car la parole est donnée à la petite fille qui peut parler d’autre chose que les leçons.
Elle parle de ce qu’elle aime faire, et du fait que le sport a une place importante pour elle. Même si ses phrases sont bien construites, le ton de sa voix, sa prosodie assez répétitive et sa rhinolalie ouverte la rendent parfois un peu difficile à comprendre.
Toute la scène se déroule en gros plan sur Laetitia, sauf sur les dernières secondes qui préparent la transition avec la séquence suivante. (18:19)

Conclusion
Épanadiplose cinématographique (reprise d'une scène initiale ou d'un motif initial à la fin) : nous sommes de retour au cours de danse, comme au début du reportage. Focus sur Laetitia, notamment grâce à des plans taille. On observe un travelling descendant puis latéral dans la salle de danse pour montrer les différentes activités des fillettes et les déplacements de Laetitia, mettant l’accent notamment sur la synchronisation de Laetitia avec ses camarades du cours de danse. Une fois la musique lancée, elle se fond dans la masse dans certains plans. Elle écoute attentivement, tape le rythme avec ses mains. La voix off nous dit : "On dirait que Laetitia recrée intérieurement la musique qu’elle n’entend pas. Elle vit et danse au même rythme que ses camarades." Encore une fois, cette affirmation selon laquelle elle n'entend pas (du tout) la musique est probablement erronée. Il est fort possible qu'elle la perçoive au moins partiellement, grâce à ses restes auditifs, à ses prothèses et à l'éducation auditive dont elle bénéficie depuis un certain temps (quelques années ?)
Nous retrouvons à nouveau cette volonté de ne pas catégoriser la petite fille en tant que personne atteinte de handicap mais bien comme une fillette “ordinaire”. Cette phrase finale de la voix off, même si elle va trop loin, illustre parfaitement l’objectif de ce documentaire : prouver que c’est une petite fille qui peut s’intégrer, avoir les mêmes activités que les autres.
La toute dernière séquence prête un peu à confusion. Laetitia danse seule. La musique qui accompagne l'image est-elle vraiment celle qui passe pendant qu'elle danse ? Y en a-t-il une autre ? Danse-t-elle en silence ?
Même si pour l’époque, au vu du contexte, il était novateur de filmer le quotidien d’une enfant sourde à des fins de sensibilisation, il n’en reste pas moins que la démarche est maladroite. À trop mettre l’accent sur la normalité de la situation, cette dernière pose finalement question. C’est une pathologie dont il faut comprendre les conséquences pour l’appréhender au mieux.
Dans la mesure où le film a été réalisé à des fins de diffusion dans les établissements scolaires, il était important que le message passe clairement : ne pas discriminer les élèves porteurs de handicap, et dans ce cas, atteints de surdité. Ils jouent comme les autres, ressentent et comprennent comme les autres. Mais le travail sur la compréhension de la maladie n'a pas été fait.
Durant des siècles, la surdité a été associée à une déficience intellectuelle mais grâce aux recherches et aux avancées, notamment en médecine, nous savons aujourd’hui que ce n’est pas le cas du tout. Cependant, cette association persiste dans nos sociétés modernes sous forme d’une fausse croyance confondant handicap social, cognitif et sensoriel. Le documentaire permet de fissurer ce stéréotype avec ces instants de vie filmés qui, même s’ils manquent de subtilité parce qu'ils évacuent tout aspect médical et refusent de prendre compte d'éventuelles difficultés (à l'exception de la fatigue de l'enfant qui est montrée brièvement et mentionnée), permettent un premier pas vers la sensibilisation.

Références et documents externes

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Contributeurs

  • Auteurs de la fiche : Amélie Bonal, Félicia Langlois, Loïc Le Pont, Mélusine Mestrou, Élisabeth Fuchs