Magic fauteuil (1990)
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Sommaire
Générique principal
Réalisation
Monique Saladin
Alain Casanova
Assistant
François Bedel
Ingénieur du son
Philippe Lecocq
Montage
Dominique Frasez
Jean-Claude Bolmont
Conseiller technique
Lynn Davis (AFM)
Production
Starfilm International
Laboratoire B.Frybourg
(CNAM)
Nous remercions vivement:
Le muséum National d’histoire naturelle
Les écoles maternelles de Lattre de Tassigny du Perreux, de Polangis, de Joinville-le-Pont
La piscine municipale du Perreux
« Jacadi » du centre commercial de Créteil
Léonard Ginsburg, Françoise, Yvon et Tristan Martin, Isabelle Hureaux, Rolande Camut
Et bien sûr Juliette et Emmanuel
(C) starfilm international 1990
Contenus
Sujet
L'arrivée des fauteuils électrique de la marque "Turbo" en France et leur impact sur la vie quotidienne des enfants atteints d'amyotrophie spinale.
Genre dominant
Résumé
Magic Fauteuil montre la vie quotidienne de deux enfants atteints d'amyotrophie spinale, Juliette et Emmanuel, ainsi que les efforts de leurs parents pour leur offrir le plus d'autonomie possible, en particulier grâce au fauteuil verticalisateur Turbo.
Contexte
L'AFM-Téléthon
Le contexte de production de ce film est étroitement lié à l’association française pour la myopathie : AFM.
En 1958, une poignée de parents révoltés contre l'ignorance et l’impuissance de la médecine et de la science face aux maladies neuromusculaires qui touchent leurs enfants, décident de créer l’Association Française pour la Myopathie. L’AFM se bat alors pour faire reconnaître des maladies délaissées par les pouvoirs publics et mal connues des médecins et des chercheurs. En 1976, l’AFM est reconnue d’utilité publique.
Mais ce qui a contribué à la notoriété de cette association, c’est son rôle dans la création du Téléthon. En 1986, à la demande de Bernard Barataud, alors président de l'AFM, Pierre Birambeau, directeur du développement, part aux États-Unis avec sa famille pour étudier le Téléthon américain, un marathon télévisuel caritatif porté, depuis 1966, par le comédien Jerry Lewis. Convaincus que le Téléthon est la solution pour sortir les maladies rares de l’oubli et disposer des moyens de les combattre, les deux hommes (tous deux pères de garçons atteints d’une myopathie de Duchenne) proposent à l’AFM de transposer en France le concept américain et d’organiser un Téléthon français.
Le premier téléthon français a lieu en 1987, et connait un succès immédiat (175 millions de francs soit l'équivalent de 29 650 000 euros de dons)
Ce film a été produit en 1990, soit trois ans après le premier Téléthon. Il a très certainement été pensé pour être diffusé auprès d'un large public, dans une volonté de sensibiliser les spectateur·ices à ces cas rares de maladies infantiles. Par ailleurs l'AFM ayant fait du remboursement des fauteuils électriques l'un de ces combats, ce film contribue à démontrer que les fauteuils "turbo", alors importés d'Angleterre, représentent une révolution pour le quotidien des familles concernées, et donc de justifier leur prise en charge par la Sécurité Sociale.
Quelques dates clés concernant le combat de l'AFM concernant les fauteuils roulants :
- 1972 : Marcel Thorel rapporte des fauteuils roulants électriques d'Angleterre.
- 1977 : La Sécurité sociale prend en charge le remboursement des fauteuils roulants.
Ce film a deux producteurs :
- la société Star film international, spécialisée dans le secteur d'activité de la production de films institutionnels et publicitaires. Cette société n’est plus en activité aujourd’hui.
- le laboratoire Brigitte-Frybourg, qui dépend du Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) à l’époque. Il a été depuis délocalisé à Laval.
En 1997, l’AFM a créé une société appelée AFM Production. Son objectif est d’informer, de partager les connaissances et de sensibiliser le grand public aux enjeux majeurs d’aujourd’hui que sont la santé, la recherche scientifique et médicale, le combat pour la citoyenneté et les droits, notamment à travers les histoires de vies des familles touchées par des maladies génétiques rares.
Ce film produit 7 ans avant la création de cette société de production répond néanmoins à tous ces objectifs.
Le cinéma direct
L’approche cinématographique de Monique Saladin et Alain Casanova s’inscrit dans le mouvement du cinéma vérité, ou comme il a été renommé plus tard, cinéma direct.
Né en Amérique du Nord entre 1958 et 1962, le cinéma direct s’emploie à capter les moments du quotidien, à rechercher les situations de spontanéité, pour transmettre directement le réel.
Son avènement est rendu possible notamment par l’évolution technologique des caméras et magnétophones, devenus plus légers et fiables.
Monique Saladin et Alain Casanova en parlent en ces mots dans leur ouvrage Le regard des autres, publié en 1990 : "Le cinéma direct est né de trois mouvements concomitants. Sortir des
studios d'abord, et utiliser la caméra comme stylo, comme instrument d'eth
nologie ou de sociologie avec une approche pragmatique, un peu comme les
Anglo-Saxons ou les Québécois, plutôt qu'intellectuelle et universitaire à la
française.
Il y a eu enfin l'essor fantastique de la télévision.
Avec le 16 mm et aujourd'hui la vidéo, très sensiblement, le caméraman
va s'approcher du sujet pour écouter et même dialoguer, grâce à la maniabilité
de plus en plus grande du matériel de prise de vues. C'est désormais le
contenu du discours qui bien souvent va rythmer les séquences et même
servir de fil conducteur au montage. Le cadre serré guette et traque la parole
libératrice, comme le silence éloquent, tout aussi révélateur."
Éléments structurants du film
- Images de reportage : Oui.
- Images en plateau : Non.
- Images d'archives : Non.
- Séquences d'animation : Non.
- Cartons : Non.
- Animateur : Non.
- Voix off : Non.
- Interview : Non.
- Musique et bruitages : Non.
- Images communes avec d'autres films : Non.
Comment le film dirige-t-il le regard du spectateur ?
La notion clé à retenir dans la réalisation de ce film est la volonté de créer une proximité entre les personnes filmées et le spectateurices. Cela répond naturellement à l’objectif de l’AFM qui est de produire des films qui permettent au grand public d’appréhender le quotidien de ces enfants et de leurs familles touchées par une maladies rare, ici particulièrement par l’amyotrophie spinale. Ce film donne la parole aux parents, ce n’est pas un film destiné à expliquer la maladie mais plutôt ses répercussions sur la vie quotidienne et les épreuves auxquelles se trouvent confrontés les parents des enfants malades.
Le film ne montre pas d’images des enfants dans des structures hospitalières mais dans des lieux quotidiens, qui sont ceux de tous les enfants: l’école, la piscine, le centre commercial. Les activités filmées sont toute de l’ordre de « la vie de tous les jours » : sortir de la voiture, laver l’enfant, l’habiller. Il tend à démontrer comment ces actions communes sont pour ces enfants et leurs parents d’une très grande complexité.
Les spectateurices sont donc ainsi amenées à s’identifier à ces familles, soumises aux mêmes contraintes que n’importe quel parent (aller travailler, s’occuper des enfants, jouer avec eux…) mais qui doivent parallèlement assumer un handicap extrêmement lourd. Le public se trouve face à des images de reportage, dont la dimension esthétique ne semble pas être l'enjeu prioritaire. Néanmoins par de subtils effets de juxtaposition d'image, les réalisateurices parviennent à donner une dimension artistique et donc très émotionnelle à ces images brutes. Par exemple, l'image du fauteuil au milieu des corps dansants des jeunes enfants fait ressortir la matérialité de ce fauteuil et la masse qu'il représente comparé au corps encore si petit de la jeune Juliette.
Dans l'introduction du Regard des autres (1990), Monique Saladin se confie en ces termes:
" Toute rencontre provoque une certaine émotion mais sans doute est-elle plus forte, même inconsciemment, avec une personne handicapée. Comme dans toute situation humaine, elle change selon les personnes, les lieux et les raisons de la rencontre. Certes, dans toute communication inter-personnelle, on joue un peu à cache-cache avec ses propres sentiments, mais ce jeu devient plus compliqué avec bon nombre de handicapés. Il n'est pas facile d'établir avec eux la juste distance relationnelle. On oscille entre une mise à distance ou une trop grande implication. Il y a surtout une rigidité de communication qui s'instaure et qui semble difficile à modifier. Il faut libérer les émotions, les leurs comme les nôtres. Ne plus en avoir peur, les apprivoiser car si elles n'arrivent pas à s'exprimer, nous ne pourrons jamais nous adapter à la situation. Nos émotions font partie du processus d'adaptation.
Arriver à une attitude réceptive à l'autre, sans angoisse ni rejet, sans compassion, ni pitié ni complaisance, dans une supposée supériorité que vous donne la conscience de votre propre intégrité apparente, demande beaucoup de temps. Toutes ces choses oblitèrent nos rapports avec ces autruis, miroirs dérangeants de nos fragilités et de nos déficits. Le moi idéal, modèle ou idole, est battu en brèche par ce renvoi à nos incomplétudes, à nos diminutions, à la plus massive et déterminante de celles-ci : la perte de la vie. Elles sont donc des images insoutenables de notre propre mort. Ces sentiments, concomitants mais aussi contradictoires, sont autant d'éléments qu'il a bien fallu, à un moment donné, regarder en face.
Comment admettre que nous soyons doubles en nous-mêmes puisque la vie et la mort s'y affrontent? Comment devenir conscients de nos inconscients et des désarrois qui y règnent? Comment réussir à devenir complice de notre malaise? Le handicap n'est-il pas, finalement, un déficit d'identité, une détérioration du rapport au monde qui va jusqu'à la mort? Etais-je seule habitée de tout cela? Fallait-il le taire ou en parler? N'était-ce pas moi le monstre?
C'est alors que je me suis aperçue que parmi les valides, tout le monde, ou presque, avait peur, et que les handicapés, aussi, finissaient par avoir peur de la confrontation. Chacun campait sur ses positions. La communication, les rapports entre valides et handicapés se passent comme si les deux groupes en présence se faisaient réciproquement peur. Des deux côtés, même si l'on s'observe à la dérobée, la méconnaissance des problèmes de l'autre est importante. Les défenses profondes qui se manifestent lors d'une confrontation ne sont guère entamées. Souvent les problèmes sont mal posés. Chaque geste des uns augmente la gêne des autres. Où se situe cette peur? Comment la débusquer? Peut-on la dépasser? Comment peur et marginalisation peuvent- elles céder la place à une communication capable de transformer progressi vement les relations? Il fallait sortir de cette situation, d'autant plus qu'aujourd'hui, parmi les 320 millions d'habitants de la Communauté européenne, près d'un tiers vit de façon plus ou moins proche, et plus ou moins régulière, les problèmes induits par les handicaps de plus de 30 millions d'entre eux. "
Comment la santé et la médecine sont-elles présentées ?
La santé et la médecine ne sont pas les « personnages principaux » de ce film mais constituent plutôt un arrière plan. À aucun moment les réalisateurices ne nous placent en immersion dans le milieu médical, il s’agit plutôt de voir comment les protocoles médicaux et notamment les outils technologiques prennent place dans le quotidien des familles.
Le premier élément majeur qui représente la dimension médicale est bien évidemment le fauteuil "Turbo" dont les deux familles présentées dans le film ont fait l’acquisition. Il s’agit d’un fauteuil qui, à ce moment-là n’est pas encore commercialisé en France et que les familles ont été chercher en Angleterre. Ce fauteuil est un élément crucial dans le développement des enfants atteints d’amyotrophie spinale, à plusieurs égards :
- Aspect physiologique :
Le fait de se verticaliser régulièrement améliore la circulation sanguine et le transit intestinal des personnes restant assises ou allongées très longtemps.
- Aspect social :La communication d'une personne assise dans un fauteuil roulant avec d'autres personnes se tenant debout génère inconsciemment des relations hiérarchiques qui peuvent dans certains cas être mal vécues psychologiquement et créer des douleurs cervicales à force de regarder vers le haut. La verticalisation permet d'éviter cette situation et de mettre les enfants à la hauteur de leurs camarades.
- Aspect pratique :
Le fauteuil roulant verticalisateur améliore l’accessibilité. Principalement utilisé au domicile, le fauteuil permet d'accéder aux placards, d'être à la bonne hauteur pour mettre la table par exemple comme le fait Juliette à un moment du film.
Un autre équipement médical est également donné à voir : l’appareil respiratoire Bird.
Le papa de Juliette est filmé pendant l’utilisation de l’appareil avant le coucher de sa fille. Ce moment n’est pas filmé pour nous expliquer son utilité précise, ni pour nous expliquer son fonctionnement, mais plutôt pour mettre en valeur le fait que ces techniques médicales ont pris place dans le quotidien et même dans le rituel du coucher d’un petite fille.
Le soin ici est dispensé par les mères et les pères, qui sont tout à la fois parents et soignants. La scène du massage d'Emmanuel par sa mère en est un exemple probant. On assiste alors à un moment de complicité parent-enfant, mais aussi une véritable source de soulagement physique pour l'enfant que l'on peut voir se détendre alors considérablement. On comprend aussi dans les récits qu'une dimension de la santé n'est pas assez prise en compte : celle qui affecte la qualité de vie des parents, qui se réveillent toutes les nuits, qui portent des charges très lourdes, et subissent une angoisse quotidienne concernant l'avenir de leurs enfants. Qu'en est-il alors de leur santé psychique? Sans aborder cette question de façon frontale, le film sensibilise le public à la question de la santé des aidantes qui est encore aujourd'hui d'une grande actualité.
Diffusion et réception
Où le film est-il projeté ?
Nous n'avons pas trouvé d'information sur la diffusion de ce film, y compris sur inamediapro.
Cependant on peut faire l'hypothèse que c'est un film destiné à être projeté lors de l'émission télévisée du Téléthon.
Communications et événements associés au film
Monique Saladin et Alain Casanova sont également en 1990 les réalisateurs du documentaire sur les myopathies La vie entre vos mains, où apparaissent encore Emmanuel, Juliette et leurs mères.
Emmanuel Hureaux a fait l'objet d'un reportage de France Télévision en 2016.
Il est également intervenu à propos de l'intelligence artificielle lors de l'évènement S3Odéon, qui rassemble des témoignages sur les enjeux des sciences, de la santé et de la société
Public
Grand public.
Audience
Descriptif libre
Générique animé
Le soleil se lève sur un paysage très simple : la terre est représentée par un dégradé de vert et le ciel est bleu clair. La terre se soulève vers la droite et devient une virgule vert foncé sur fond vert clair (sa forme rappelle la virgule de la société d'équipements sportifs Nike, logo déposé en 1988), entourant le soleil qui est devenu un point vert foncé. Il s'agit du logo de l'AFM de l'époque. Il suggère un envol ou une personne qui lève les bras en signe de victoire et véhicule un grand dynamisme.
Les lettres AFM apparaissent au bas de l'écran avec, l'un après l'autre, les trois verbes qui composent le slogan de l'association à l'époque : Refuser, Résister, Guérir. (En janvier 2025, le logo de l'AFM est composé d'une grosse apostrophe entourée de 5 taches colorées. Il pourrait avoir été réalisé par un enfant qui aurait dessiné un bonhomme en peinture au doigt. Le slogan de l'association est Innover pour guérir).
Aucune bande son n'accompagne cette séquence. (00:16)
La tentation du désespoir
Dans une grande salle de sport, des fillettes d'environ 4 ans font différents mouvements de gymnastique ou de danse tandis qu'une adulte donne quelques consignes. D'autres adultes (probablement des parents ou autres accompagnateurs) sont assis ou debout sur les côtés et au fond de la salle. La caméra tourne autour d'une fillette qui surplombe les autres enfants parce qu'elle est assise dans un fauteuil électrique volumineux bleu vif. La petite fait des mouvements des bras puis manœuvre le joy-stick de son fauteuil pour allonger les jambes et faire descendre son assise. Elle a un air concentré
Un petit garçon qui porte une veste rouge et un bonnet bleu est assis dans un voiture ressemblant à une petite Cadillac des années 1960 sur un manège. Sa tête est penchée vers la gauche. Plan très court sur une jeune femme qui lui fait signe. C'est manifestement sa mère. Retour dans la salle de gymnastique où la fillette en fauteuil se déplace au milieu des autres enfants tandis que la mère du garçonnet témoigne : "Il y a plusieurs années, l'attitude générale, médicale, était d'abandonner ces enfants et de les laisser glisser vers la mort, tout simplement. [Vue en plongée sur le manège qui continue à tourner.] C'est une maladie incurable, évolutive, et avec un pronostic extrêmement sévère. [La fillette sourit et poursuit son évolution dans la salle de gym.] L'enfant n'a plus que pour quelques mois à vivre, peut-être un an, peut-être plus. [La mère du garçonnet le fait sortir de la petite voiture et le porte puis on le voit assis dans son fauteuil, en train de regarder tourner le manège.] Après ce diagnostic et ce pronostic, je me suis retrouvée avec mon bébé mort-vivant, puisque c'était ça. On se dit 'Est-ce que c'est vrai ? Est-ce qu'on a fait un enfant comme ça, une poupée de chiffon qui ne pourra rien faire ? [La caméra suit le petit garçon qui se déplace en fauteuil rouge dans un centre commercial.] Qu'est-ce qu'on va en faire ? y a des tas d'idées qui vous viennent, des idées de..." La phrase reste en suspens et ne sera jamais complétée. Dans toute cette séquence, le témoignage de cette maman qui parle d'un pronostic très sévère, d'une maladie incurable et évolutive, de la tentation de l'abandon, de désespoir, et qui évoque des gestes définitifs, contraste de façon marquante avec les situations de vie presque ordinaires vécues par les enfants, présentées dans des scènes où le mouvement est essentiel (gymnastique/danse et manège). Le fait que ces enfants soient manifestement toujours là, plusieurs années plus tard, atteste de la volonté de leur famille de leur offrir une vie la plus normale possible, malgré le manque de solutions proposées.
Le titre du documentaire, Magic Fauteuil, s'affiche en capitales d'imprimerie blanches en bas à gauche de l'écran. (01:27)
L'acceptation
La mère du petit garçon sort le fauteuil électrique rouge du coffre de sa voiture à l'aide de deux rampes métalliques. Elle sort également son fils de son siège auto pour le porter jusqu'au fauteuil. En voix off, elle explique qu'elle a dû faire le deuil d'un enfant qui pourrait aller à l'école et acquérir de l'autonomie. Elle parle aussi de son acceptation : "De toute façon, il n'y en a pas pour longtemps, je le garde jusqu'au bout, je vais m'en occuper moi-même."
Après le bain, elle masse son fils dont elle donne le prénom pour la première fois : Emmanuel. Elle parle de tout le bénéfice qu'ils trouvent tous les deux à cette activité. Pendant ces scènes, Emmanuel est toujours particulièrement souriant et rieur. (Dans le documentaire Bird_et_grenouille_ou_frog_et_oiseau ?, également réalisé par Eric Duvivier pour l'AFM, on peut voir la maman masser Emmanuel plus longuement tandis qu'un médecin explique en voix off en quoi ces massages sont utiles et nécessaires (03:45-04:17)) (02:08)
L’enfant pilote
Cette fois, c'est la mère de la fillette qui décharge le fauteuil de sa voiture. L'objet paraît très lourd. Elle installe le dossier puis porte sa fille, Juliette, jusqu'au fauteuil. En voix off, elle parle du diagnostic reçu à la naissance (amyotrophie spinale) et du pronostic qu'on leur a donné dans la foulée : "On nous avait dit : survie prolongée". Elle explique qu'elle s'est révoltée contre le mot "survie" parce qu'elle avait envie qu'elle vive une vie "la plus normale possible, malgré son handicap". Leur recherche d'autonomie a mené à l'achat en Angleterre d'un fauteuil de la marque Turbo. En même temps, Juliette est montrée dans sa classe d'école maternelle, en train de faire de la peinture avec l'aide d'une adulte. Ces scènes alternent avec des plans rapprochés sur le changement et le rechargement des grosses batteries de son fauteuil. Sa maman insiste sur les éléments de normalité que le fauteuil offre à la fillette : elle peut refuser de venir ou se sauver quand on l'appelle, faire des bêtises, etc. En même temps, on voit la fillette transporter deux de ses camarades dans un petit chariot attelé à son fauteuil. Les enfants ont l'air de beaucoup s'amuser.
Le fauteuil "Turbo" est alors présenté : commercialisé uniquement en Angleterre, c’est lui qui offre à Juliette et Emmanuel la possibilité de se déplacer, d’aller à l’école, de jouer, d’aider à la maison, de gagner en autonomie, mais aussi de s’exprimer, y compris dans le refus. L’enfant peut le piloter seul, et il permet d’adopter un position assise ou bien debout. (03:30)
Le mouvement retrouvé
On accompagne ensuite Juliette et sa maman à la piscine, où l’on assiste à un moment de plaisir, la petite fille ayant appris, grâce aux conseils d'un maître-nageur à dépasser son appréhension et à se mouvoir dans le bassin. L’eau permet en effet à l’enfant, contre toute attente, de progresser et de retrouver le mouvement de la marche.
Nouveau plan sur le déchargement du "Turbo" qui est si lourd qu'il échappe un peu à la mère de Juliette.
Dans le jardin, Juliette joue avec son frère. Après quelques aménagements de la maison, elle peut aller où elle le souhaite en fauteuil. En voix off, sa mère explique que désormais la petite mène "presque une vie normale", c'est-à-dire que l'objectif qu'elle s'était donné plus tôt est atteint, grâce au fauteuil électrique. Tandis que Juliette prend la rampe qui lui permet d'accéder à l'entrée de la maison, son père mentionne en voix off les éléments d'amélioration qu'il souhaiterait "dans l'idéal" : un pavillon de plain-pied pour que Juliette puisse y accéder directement et qu'elle puisse entrer et sortir de la voiture seule.
Dans la cuisine, le père de Juliette place une batterie rechargée dans le fauteuil et lui indique qu'il a fini par ces mots : "Ça y est, tu as fait le plein, tu peux y aller." La fillette se déplace autour de la table dans un espace étroit pour dresser le couvert.(05:50)
Nuit et jour, parents-soignants
Dans la chambre de Juliette. Son père lui applique sur la bouche et le nez un masque en silicone relié à un appareil de ventilation, le Bird, dont le principe est d'insuffler de l'air sous pression dans les poumons pour produire une expansion thoracique passive. Ce traitement vise à entretenir la mobilité thoracique et à restaurer la ventilation dans les cas de maladie neuromusculaire. Le père de Juliette explique qu'il a fallu plusieurs mois à l'enfant pour accepter cette machine et que c'était "une corvée terrible" pour eux deux. Désormais, ça se passe beaucoup mieux et il arrive qu'elle le réclame. Il reconnaît que c'est une astreinte pour lui parce qu'il faut être très régulier et que cela empêche les sorties. En même temps, c'est devenu "un moment fort de la journée". Cette activité de soins qui le place directement en contact avec le corps de son enfant (il est assis tout près d'elle, la main gauche placée sur son abdomen pour suivre les mouvements de sa respiration) fait écho à la situation de massage dont parlait la mère d'Emmanuel. C'est un moment de contact physique où se produit une connexion intense entre le parent et l'enfant et qui leur fait du bien à tous les deux sur le plan relationnel, au-delà du soin physique.
Raccord sur le lit où Emmanuel se réveille. Sa mère est également placée tout près de lui. Elle le porte hors de son lit, encore très endormi. Alternance de plans très courts où elle lui donne le biberon, le retourne dans son lit (avec ou sans attelles), etc. Elle explique en voix off la difficulté de ces nuits où il faut que le ou les parents se lèvent de très nombreuses fois pour ajuster, enlever ou remettre les attelles et tourner l'enfant qui ne peut pas le faire seul.
Scène de brossage de dents. La mère d'Emmanuel donne des images à son fils pour lui indiquer les mouvements à faire : le chanteur d'opéra (bouche grande ouverte), le tigre (commissures des lèvres étirées, dents serrées visibles).
Emmanuel sur son fauteuil sort par le garage de sa maison, sa mère le suit avec une poussette. Une voix off qui est peut-être celle de sa grand-mère décrit les émotions contradictoires par lesquelles passe son entourage. "Quand on passe la nuit avec lui, on est vraiment démoralisé parce que c'est une petite chose, toute petite. Ses membres sont totalement ankylosés. On est à chaque fois vraiment pris à la gorge, pris au cœur. On dit : 'Il s'en tirera pas.' Dès qu'il a un encombrement, on a peur. On est angoissé mais après on se dit : "Mais non, il va s'en sortir, il a une énergie telle, il a un tel goût de vivre, une telle envie de vivre.'"
Chez les grands-parents (probablement maternels) d'Emmanuel. Le garçonnet est en position debout dans son fauteuil, devant une grande tablette sur laquelle sont disposés les éléments d'un jeu de construction. Il interpelle sa grand-mère à qui il raconte une partie de la légende d'Isis et Osiris. La clarté de son expression sur un sujet qu'on imagine réservé à des enfants plus âgés contraste fortement avec son aspect physique.
Retour chez Juliette. Sa mère l'installe en position verticale dans son fauteuil pour qu'elle puisse jouer avec son frère. En voix off, elle parle de sa fatigue et des reproches qu'elle se fait le soir, quand elle est couchée parce qu'elle estime qu'elle a manqué de patience avec son enfant ou qu'elle n'a pas été "particulièrement sympathique" avec elle au milieu de la nuit. À l'image, Juliette, un voile de déguisement sur la tête, se met du rouge à lèvres et sourit devant un miroir. Toujours en voix off, sa mère explique combien il est difficile pour le couple parental de préserver son intimité lorsque les nuits sont interrompues et que le lit de l'enfant est installé dans leur chambre pour plus de commodité. La grand-mère d'Emmanuel se confie également sur cette situation très difficile : "Jusqu'à maintenant, on a vécu vraiment l'enfer parce que mon gendre et ma fille vivaient vraiment l'enfer (...)" C'est la première fois que le père d'Emmanuel est mentionné. On ne le verra jamais sur l'ensemble du documentaire. Les différentes scènes où on voit Emmanuel jouer permettent aussi d'apercevoir différents types de siège de maintien qui font partie de l'environnement quotidien de la famille (notamment à (10:19)).
La grand-mère d'Emmanuel continue en expliquant qu'elle n'avait pas d'espoir jusqu'au 4 ans de son petit-fils. Désormais, elle se sent suffisamment en confiance pour le prendre chez elle un week-end afin que sa fille et son gendre puissent "se retrouver en amoureux". En même temps, à l'image, Emmanuel arrive à l'école maternelle où un jeune homme l'aide à dessiner en suivant les consignes qu'il lui donne. Sa mère résume la situation par ces mots : "Nous, parents, nous sommes mobilisés nuit et jour (...)" Emmanuel est entouré de petits camarades qui lui donnent son goûter avec plus ou moins de délicatesse. Ensuite, il participe à un cours d'initiation à l'anglais avec d'autres élèves de son âge.
Pendant ces témoignages, nous voyons néanmoins le bénéfice de cet investissement familial, dans le regard d’un enfant qui parle sans aucune difficulté, manifeste sa curiosité, joue et apprend avec les autres. (12:33)
Des passions et des projets pour l’avenir
Scène de repas où la mère d'Emmanuel lui donne à manger à la cuillère. Le processus est manifestement long.
Dans un magasin de vêtements pour enfants de la marque Jacadi, une vendeuse aide la mère d'Emmanuel à essayer un nouveau pantalon et une veste au petit garçon. En voix off, la maman répète une question qu'on doit lui poser assez souvent : "Pourquoi vous ne mettez pas votre enfant en centre puisque ça représente de telles contraintes ?" Elle répond que c'est l'amour qui les incite à laisser leurs enfants dans leur "milieu naturel familial". Pour elle, et à son avis pour d'autres parents, la séparation d'avec l'enfant est inacceptable. Ses mots à ce sujet sont très forts : "Nous refusons d'entrer dans une institution parce que c'est une séparation, c'est une rupture. Nous savons que ces enfants se laisseront glisser vers la mort, automatiquement (...) Ce n'est pas dans un centre qu'ils arriveront à trouver cet épanouissement."
Gros plan sur un livre pour enfants sur les dinosaures. Zoom arrière : le livre est posé à l'arrière du fauteuil d'Emmanuel qui est en train de visiter la galerie de paléontologie du Muséum national d'Histoire naturelle (consulté le 20 janvier 2025). Sa mère et lui se promènent entre les vitrines présentant des squelettes de dinosaures. Emmanuel a apporté un cadeau pour le géologue et paléontologue Léonard Ginsburg qui les accompagne : un stégosaure en plâtre qu'il a peint. Très intéressé, il pose des questions. Plan large sur Emmanuel en position verticale qui roule rapidement entre les vitrines et les présentoirs, suivi de sa mère et de L. Ginsburg. L'une des dernières phrases de la maman contraste fortement avec le désespoir qu'elle a ressenti après la naissance de son fils et qu'elle relatait au début du documentaire : "Ce que nous voulons, c'est les rendre à la vie."
Emmanuel roule rapidement dans une allée du Jardin des plantes. Il sort manifestement du Muséum. Il fait un quart de tour. Arrêt sur image sur son visage souriant et ravi.
Notes complémentaires
Paulus, J, Vos malades s'interrogent sur... le Bird, Bulletin Myoline, 64, Publication AFM, 2003. (Consulté le 20 janvier 2025.)
Saladin, Monique, Casanova, Alain, Vidali, Umberto, Le Regard des autres, Pédagogie psychosociale, Éditions Fleurus, Paris, 1990.
Histoire de l'AFM, 9 juin 2022. (Consulté le 16 janvier 2025)
Pour faire cette fiche nous avons collecté de nombreuses informations sur différents sites, notamment sur le site de l'AFM
AFM-Téléthon
Certains articles nous ont permis de mieux comprendre l'évolution des fauteuils roulants:
Fauteuils roulants
L'ouvrage Le regard des autres, publié en 1990, est disponible en ligne sur la bibliothèque en ligne de la BNF: Le Regard des autres
Contributeurs
- Auteurs de la fiche : Béatrice Derouin, Chloé Brugnon