Introduction : un coup de sang inexpliqué
Plongée immeuble, pano sur les rues, le square, avec la musique sereine : une ville au petit matin. Devant l’entrée de l’immeuble, deux femmes bavardent. Un homme ouvre brusquement la porte et assomme une des deux femmes avec une casserole. PG foule, des visages envahissent l’écran. Un policier : « Ne bougez pas. » Première phrase du commentaire (elles seront peu nombreuses tout le long du film, trois phrases tout au plus) : « Faisons le point, les amis… A-t-il la tête d’un animal ? » En flashback, récit de l’employé Mamine.
Bruits et agitation à la ville, au travail...
8 h 30, il part au travail. Il doit subir les agressions des enfants qui jouent, du trafic, des usagers du métro. De la fenêtre de son bureau, il voit une grue assembler les étages d’un immeuble. L’activité autour de lui est incessante, avec son cortège de nuisances. Le soir, Mamine chez lui doit en affronter de nouvelles. Rassemblés dans la cour, les voisins fument en jouant aux dominos, frappent la table à chaque nouveau coup. La bande-son accentue l’intensité de chaque coup. De même, la fumée des pipes se transforme en nuages. Ces effets grossissants visent à exprimer la manière dont Mamine les subit. À remarquer que jusqu’à présent, aucune de ces nuisances n’est volontaire, ou directement portée sur Mamine. Il en sera ainsi tout le long du film. C’est la ville le coupable, avec le mode de vie que son environnement, sa structure, ses activités impliquent, mais aussi avec l’anonymat qu’elle engendre, qui déresponsabilise ses habitants. L’agression est structurelle en quelque sorte.
... et chez soi
Mamine regarde la télévision. (Dans le champ de l’écran, les images sont des vues réelles, comme les films de la DEFA.) Aussitôt, le bruit des autres postes couvre le sien. La nuit, Mamine cherche le repos du juste dans son lit alors que la fête bat son plein dans l’appartement au-dessus du sien. Sous les vibrations, même les personnes photographiées sortent de leurs cadres. Quand la fête s’apaise, une scène de ménage prend le relais, où les dialogues sont remplacés par des coups de tambours et autres percussions. Puis ce sont deux amoureux, voisins d’immeubles, qui communiquent en donnant des coups dans la tuyauterie du chauffage qui relie tous les appartements. Enfin, un robinet se met à fuit, des pas se font entendre dehors, un homme vocifère dans la cour.
Le vrai coupable : l'environnement moderne
« Le crime est accompli et on emmène ce pauvre Mamine » reprend le commentaire. « Mais qui donc est coupable ? Nous espérons que ceux qui verront ce film comprendront ». Qui est coupable ? Personne et tout le monde, par un mode de vivre ensemble qui se passe de règles.