His fighting chance (1949)

De Medfilm



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Titre :
His fighting chance
Année de production :
Pays de production :
Réalisation :
Durée :
10 minutes
Format :
Parlant - Noir et blanc - 16 mm
Langues d'origine :
Sous-titrage et transcription :
Sociétés de production :
Commanditaires :
Archives détentrices :
Corpus :

Générique principal

BRITISH BOARD OF FILM CENSORS
133, OXFORD STREET, W.1.
Secretary: A. T. L. WATKINS

THIS IS TO CERTIFY THAT “HIS FIGHTING CHANCE” HAS BEEN PASSED FOR UNIVERSAL EXHIBITION

CROWN FILM UNIT PRESENTS

JOHNNY GREEN IN HIS FIGHTING CHANCE

COMMENTARY SPOKEN BY MRS. ELEANOR ROOSEVELT AND MICHAEL REDGRAVE AS A CONTRIBUTION TO THE FIGHT FOR JOHNNY

Contenus

Thèmes médicaux

Sujet

La poliomyélite. Prise en charge hospitalière, techniques de rééducation et espoir d'une réinsertion professionnelle et sociale en milieu ordinaire pour les malades.

Genre dominant

Documentaire

Résumé

À travers quelques cas "fils rouges" (Johnny Green, John Broadbent, la fillette aux tresses) sont abordés le début de la poliomyélite, la prise en charge hospitalière, la rééducation, l'ergothérapie et la reconversion professionnelle. Des adultes connus ou non sont donnés en exemple d'un retour réussi à une vie normale. À plusieurs reprises, le commentaire fait référence au président américain Roosevelt à la fois pour le donner en exemple et pour montrer combien les techniques de prise en charge ont progressé depuis l'époque où lui-même est tombé malade.

Contexte

La poliomyélite (de polios/gris et muelos/moelle) est une maladie infectieuse qui touche la substance grise de la moelle épinière. Elle est connue depuis très longtemps (des séquelles de la maladie ont été observées sur des momies égyptiennes datant de 3 700 ans avant JC). Elle est décrite par un pédiatre londonien, J. Underwood, en 1789, et individualisée cliniquement par J. Heine (Wurttemberg) en 1840. Les premières descriptions anatomopathologiques datent de 1855 (G. Duchene). J-L. Prevost localise les lésions au niveau de la corne antérieure de la moelle épinière en 1865. Ces données sont confirmées par A. Vulpian (1866) et J. Charcot (1870).
La poliomyélite est causée par un poliovirus (genre ː entérovirus). La transmission de la maladie peut se faire par l'ingestion d'aliments, d'eau ou de boissons contaminés par les selles d'une personne porteuse du virus ou à partir des virus de la gorge des personnes infectées. L'infection passe inaperçue dans environ 75̥% des cas. L'atteinte de la moelle épinière et des neurones peut être responsable de paralysies définitives (1 cas sur 200) touchant un muscle, un membre ou pouvant se généraliser et entraîner des troubles respiratoires ou des handicaps très lourds. Elle peut évoluer vers le décès. Avant la vaccination, la poliomyélite était la première cause de handicap chez les enfants.
À partir de la fin du XIXe siècle, il y a eu de plus en plus d'épidémies de poliomyélite sur tous les continents.
En Angleterre, l'obligation de déclarer la poliomyélite aiguë date de 1912.
Incidence de la poliomyélite en Angleterre depuis 1912 (Consulté le 19 mai 2020.)
Le premier vaccin efficace contre la polio a été développé par l'Américain Jonas Salk en 1952. Les premières grandes campagnes de vaccination ont été lancées en 1955. Seule la vaccination a permis la quasi-éradication de la poliomyélite dans le monde. À ce jour (mai 2020), il n'existe toujours pas de traitement.

Cf. le podcast sur Apothicast : "La poliomyélite et ses vaccins" par Baptiste Baylac-Paouly (https://apothicast.fr/la-poliomyelite-et-ses-vaccins-avec-baptiste-baylac-paouly-ep-6/)
His Fighting Chance a été principalement réalisé à partir de séquences d'un film beaucoup plus long (59 min), Polio Diagnosis and Management (1948). À ces séquences remontées a été ajoutée une séquence tirée des actualités de l'époque (visite d'Eleanor Roosevelt à Londres et inauguration de la statue de F. D. Roosevelt à Grosvenor Square en présence du roi Georges VI et de son épouse). Un compte-rendu publié dans le Times en juin 1948 estime que Polio Diagnosis and Management, actuellement conservé au British Film Institute et destiné à la formation du personnel soignant, a été visionné par 17 000 médecins et 16 000 infirmières. Sa structure est celle d'un colloque de médecins. Son déroulé est le suivant ː

  • Générique ː Polio Diagnosis and Management Spring 1948/Medical Advisers H. J. Seddon - T. S. R. Fisher - W. H. Kelleher - J. H. Fisher - W. H. Bradley/A Crown Film Unit Production. Le fond du générique montre une assemblée d'hommes d'un certain âge manifestement en train d'assister à un colloque, à une formation ou à une autre réunion de ce type. À un moment donné, ils lèvent la main comme pour voter. (00ː50)
  • Exposé ː Un médecin est appelé à s'exprimer. Il fait un exposé assez technique sur la poliomyélite en commençant par retracer l'historique des épidémies de polio au Royaume-Uni, en Suède et aux États-Unis du début du XXe siècle jusqu'à la grande épidémie britannique de 1947 (schémas filmés ou animés). Description d'un cas de polio familial (les parents, deux enfants petits et une grand-tante sont tombés malades en l'espace d'un mois), schéma déroulant à l'appui. Classification clinique (polio non paralytique/paralytique). Critique du terme infantile paralysis ("paralysie infantile"). (08ː30)
  • Discussion ː Conformément au format du colloque, les personnes qui ont écouté l'exposé ont à présent la possibilité de s'exprimer. La "discussion" qui suit l'exposé est l'occasion, images à l'appui, de présenter des cas cliniques, d'entrer en détail dans le processus diagnostique de la poliomyélite et la description de toutes les atteintes possibles, de parler de la prise en charge des malades et d'évoquer leurs possibilités de réadaptation et de réinsertion dans la vie professionnelle ː

1. Le diagnostic de la poliomyélite
John Broadbent, 18 ans, apprenti aux chemins de fer. Description de ses symptômes lors d'une première consultation au cabinet du généraliste, anamnèse. Le médecin vient le voir à domicile le lendemain. Description de nouveaux symptômes et examen clinique très complet commenté par le médecin à grand renfort de termes médicaux précis en voix off. Conclusion ː suspicion de polio. Le médecin recommande à la mère de garder ses autres enfants à distance de John.
Le médecin demande un deuxième avis à l'un de ses confrères du Ministry of Health car pour le moment, il n'y avait pas eu de cas de polio dans cette région. Nouvel examen très précis et décrit avec tous les termes techniques nécessaires. Le second médecin est également en faveur d'un diagnostic de polio. Rapide rappel didactique des éléments les plus importants de l'examen et diagnostic différentiel ː ostéomyélite, sciatique, méningite (pour cette dernière maladie, l'examen partiel d'un enfant malade est comparé à celui de John), encéphalite (examen neurologique d'un patient), paralysie hystérique (examen des membres inférieurs d'une patiente).
Retour sur John Broadbent, toujours chez lui. Le second médecin prévient la mère que son fils va devoir être hospitalisé et lui donne de nombreux conseils d'hygiène (linge, vaisselle, aliments, lavage des mains) pour éviter la contamination du reste de la famille. Son confrère et lui acceptent néanmoins une tasse de thé en expliquant qu'à leur âge, ils ne risquent pas grand-chose ǃ Recommandation est faite à la famille de rester à distance les uns des autres, d'éviter les voisins et de ne pas mettre la petite sœur de John à l'école pendant une à deux semaines.
Explication très pédagogique des chances qu'a John de se rétablir ː le médecin aligne trois tas d'allumettes sur un torchon et trace une ligne imaginaire au milieu du torchon. Premier tas ː la poliomyélite bulbaire et respiratoire. Très peu d'allumettes franchissent la ligne, c'est-à-dire que très peu de malades survivent. Deuxième tas ː la paralysie spinale (c'est le cas de John). La plupart des allumettes passent de l'autre côté, la plupart des malades guérissent. Troisième tas ː la poliomyélite non paralytique. Toutes les allumettes franchissent la ligne, tous les malades guérissent. Le médecin précise en voix off (c'est-à-dire uniquement à l'intention des spectateurs) qu'il n'a pas donné le chiffre global de la mortalité à la mère de John mais que ce chiffre s'élève à 9̤̬%. En revanche, il lui dit que dans les cas de poliomyélite paralytique, 4 personnes sur 5 peuvent reprendre une vie normale.
John est transporté à l'hôpital. Le premier médecin va signaler ce premier cas de polio aux autorités compétentes. (28ː01)
2. Les diverses atteintes possibles
Une ponction lombaire a confirmé le diagnostic de polio pour John Broadbent. Tableau déroulant rappelant la sémiologie qui doit faire penser à la polio et les signes qui permettent de l'exclure.
À l'hôpital, la visite du médecin-chef entouré de ses assistants et étudiants permet de faire la démonstration de divers examens sur des patients enfants et adultes pour illustrer différentes atteintes (nerfs crâniens, bulbe rachidien, muscles des membres supérieurs et inférieurs, etc.). Pour certains, une page de leur dossier médical est montrée à l'écran. Parmi les petits patients examinés se trouve Johnny Green (le film lui consacre environ 3 min.) Quelques instructions en direction des infirmières concernant le poumon d'acier. Comparaison des indications du poumon d'acier et du respirateur de Bragg-Paul. (44ː00)
3. Traitement orthopédique
Utilisation d'attelles en fonction du degré de paralysie des muscles. Démonstration des mobilisations passives des membres à pratiquer chaque jour puis passage aux exercices actifs dont des exercices en piscine. Retour sur John Broadbent qui réapprend à marcher entre deux barres parallèles. Orthèse qui permet à une fillette de marcher. John réapprend à monter et descendre les escaliers. (51ː20)
4. L'École à l'hôpital, ergothérapie
Une institutrice écrit sur un tableau noir dans une salle occupée par une dizaine de lits au moins. Les élèves produisent un petit journal, ce qui leur permet d'exercer leurs talents et compétences.
L'ergothérapie (vannerie, tissage (John), travail du cuir, usinage, etc.) permet de poursuivre la rééducation musculaire. La voix off insiste sur la nécessité d'adapter le matériel aux besoins de chaque patient.
5. Le travail de l'assistante sociale
Évaluation des capacités de John Broadbent et de ses centres d'intérêt. Il est orienté vers une formation de dessinateur industriel.
Touche personnelle ː l'assistante sociale avoue qu'elle porte toujours une attention particulière aux patients qui ont la polio car elle l'a eue elle-même (plan sur l'embrayage manuel spécial dont est équipée sa voiture). (56ː00)
6. Rappel des informations essentielles du film en direction des spectateurs médecins
C'est le médecin de famille de John Broadbent qui s'exprime.
- Importance du diagnostic précoce
- Ne pas hésiter à hospitaliser ou à demander une seconde opinion
- Rester en contact avec le patient, notamment au stade de la rééducation
- Importance du rôle de l'assistante sociale pour le reclassement professionnel
- Importance des encouragements fournis par le médecin pour permettre au patient de se réinsérer dans le monde du travail

  • Carton de fin ː The End - Crown Film Unit - Made for the Ministry of Health by the Central Office of Information/Direction ː Geoffrey Innes - Photography ː Jonah Jones - Editing ː William Freeman/Made with the co-operation of medical, surgical and nursing staff at the Wingfield-Morris Hospital, Oxford, the Isolation Hospital, Abingdon, the Western London County Council Hospital

Éléments structurants du film

  • Images de reportage : Non.
  • Images en plateau : Non.
  • Images d'archives : Oui.
  • Séquences d'animation : Non.
  • Cartons : Non.
  • Animateur : Non.
  • Voix off : Oui.
  • Interview : Oui.
  • Musique et bruitages : Oui.
  • Images communes avec d'autres films : Oui. La plupart des images de ce film sont issues du film Polio - Diagnosis and Management (1948)

Comment le film dirige-t-il le regard du spectateur ?

Destiné à la formation du personnel soignant, Polio Diagnosis and Management s'appuyait sur des pratiques et des codes connus de ce public en adoptant la structure d'un colloque de médecins, en montrant la visite d'un chef de service à l'hôpital, en étant à la fois exhaustif en ce qui concerne la sémiologie de la maladie et très précis dans l'emploi des tous les termes médicaux nécessaires, et en confiant les premiers rôles à des médecins, chacun d'entre eux donnant à leurs confrères spectateurs l'exemple de la conduite à tenir en cas de suspicion de poliomyélite. Ex ː demander un deuxième avis à un confrère, se mettre à la portée de la famille du patient pour lui donner les explications nécessaires, déclarer le cas aux autorités sanitaires, garder le contact avec le patient tout au long de sa maladie et de sa rééducation, etc.
Les objectifs de His Fighting Chance et le public visé sont totalement différents. Il s'agit ici de s'adresser à un public tout venant qui vient de vivre une grande épidémie de poliomyélite (1947 en Grande-Bretagne) et sur qui le risque d'une nouvelle épidémie pèse puisqu'il n'y a à l'époque ni traitement ni vaccin. Par rapport au film d'origine, les informations médicales sont limitées au maximum. L'examen clinique conserve juste un élément facile à comprendre par le grand public (John Broadbent assis dans son lit, les jambes repliées, n'arrive pas à toucher ses genoux), la nécessité éventuelle de demander un second avis n'est pas évoquée et tous les termes médicaux ont disparu.
À l'époque, la poliomyélite terrorise, non seulement parce de nombreuses personnes en meurent mais aussi parce que celles qui guérissent en gardent souvent un handicap plus ou moins lourd. Comme on ne comprend pas bien comment la maladie fonctionne, des interrogations sur une éventuelle "faute" et un ostracisme par rapport aux personnes handicapées dont on se demande si elles sont encore contagieuses pèsent sur les malades et leurs familles.
Pour lutter contre tous ces préjugés, His Fighting Chance met en œuvre plusieurs stratégies. Ici, les héros ne sont pas les médecins mais les patients, à commencer par un petit bout de chou blondinet, Johnny Green, qui apparaît au début et à la fin du film et dont le nom figure au générique. Ses progrès en un an ne sont vraiment pas spectaculaires mais il retient l'attention du spectateur par la façon dont il semble le regarder droit dans les yeux et le mettre au défi de le rejeter alors qu'il est tellement mignon et plein d'innocence.
Ensuite, l'histoire de John Broadbent donne l'image d'un "parcours réussi". Il a un médecin compétent qui réagit rapidement, il fait ce qu'on lui dit et se montre tenace, tant au cours de sa rééducation que dans la reprise d'une formation et dans sa volonté de reprendre une vie normale. On notera cependant que cette "reprise d'une vie normale" n'est présentée que sous l'angle de la vie professionnelle. Il n'est pas du tout fait allusion à la vie sociale et familiale, que ce soit pour John ou pour les autres personnages du film.
Contrairement à Polio Diagnosis and Management où, excepté John Broadbent, tous les malades sont anonymes, dans His Fighting Chance, on donne le nom de plusieurs personnes ː Johnny Green et John Broadbent, Sheila Harris, Felicity Lane-Fox et Richmal Crampton. Les deux dernières sont connues du grand public (cf. Notes complémentaires) et font la preuve que la maladie n'empêche pas de mener une vie au service des autres ou de connaître le succès. (On notera que la séquence avec Richmal Crompton est l'une des rares qui soit absente de Polio Diagnosis and Management.) Enfin, le choix de deux autres personnalités pour dire le commentaire, l'acteur Michael Redgrave et Eleanor Roosevelt confère à ce film un élément de prestige destiné encore une fois à attirer l'attention des spectateurs et à contribuer à dédiaboliser la maladie. Le recours à ces célébrités montre également combien l'acceptation par la société des personnes que la polio a laissées handicapées est devenue un enjeu important (on rappelle à ce sujet que ce film a manifestement été réalisé suite à la grande épidémie de poliomyélite de 1947).
La longueur et la difficulté de la rééducation et de réadaptation en général sont mentionnées par le commentaire en voix off mais ne sont pas appuyées par l'image. On ne voit pas de patient découragé, ils font leurs exercices avec le sourire ou avec une expression neutre et d'éventuelles difficultés psychologiques du fait de longues séparations avec la famille ne sont absolument pas évoquées. Rien ne vient ternir le message général d'espoir, de dynamisme et de positivité que veut faire passer le film.

Comment la santé et la médecine sont-elles présentées ?

Le médecin généraliste de ce film est très réactif. Il a beau ne pas avoir établi de diagnostic définitif, il fait hospitaliser son patient sans attendre (Doctors err on the safe side/"Les médecins sont prudents") car il sait qu'une prise en charge précoce de la poliomyélite assurera le maximum de chances de guérir et de récupérer à son patient.
Ensuite, cette maladie permet aux médecins (comme à leurs patients) de donner la pleine mesure de leur créativité et de leur ingéniosité (Helping patients to help themselves rehabilitation offers tremendous scope for the ingenuity of both doctors and patients), deux qualités qu'il est assez rare de voir associées à la pratique médicale.
Enfin, tous le travail des médecins et des soignants en général vise à permettre aux patients de reprendre une vie normale que le film réduit en réalité à la reprise d'une activité professionnelle (même pour les enfants, on ne montre que "l'école", pas de moment de jeu), c'est-à-dire que l'objectif est de redonner aux patients la possibilité de contribuer de façon active et positive à la société, sans dépendre de qui ou de quelque système que ce soit.

Diffusion et réception

Où le film est-il projeté ?

Tout de suite après la guerre et jusqu'au début des années 50, certains des films du Central Office of Information sont diffusés au cinéma (pré-programme). Cependant, la plupart d'entre eux sont diffusés par des unités cinématographiques mobiles équipées de projecteurs et d'écrans qui se rendent jusque dans les endroits les plus reculés de Grande-Bretagne et organisent des séances de projection dans des cantines d'usines, des écoles, des salles des fêtes, des églises, etc.
À ce sujet, voir Shown by request.

Communications et événements associés au film

Public

Tout public.

Audience

Descriptif libre

La paralysie infantile ː le cas de Johnny Green Plongée en oblique sur un garçonnet couché dans un petit lit. La voix off le présente. Il s'agit de Johnny Green, un petit garçon de 2 ans qui a l'air d'aller plutôt bien. Il a l’œil vif et paraît éveillé. Il regarde directement vers la caméra, ce qui donne au spectateur l'impression que l'enfant le regarde droit dans les yeux. Deux mains soulèvent Johnny par les épaules tandis que la voix off annonce qu'il a eu la paralysie infantile, plus précisément appelée poliomyélite. On remarque qu'il ne tient pas sa tête. Des manipulations de son bras gauche montrent que la polio a laissé ses membres hypotoniques. Sa polio est guérie à présent et il commence à récupérer un peu de force musculaire. Il suit le mouvement de sa main gauche comme un bébé beaucoup plus jeune. L'objet que l'examinateur lui tend (la voix off dit que c'est une lampe torche alors que c'est en réalité un stylo ǃ) l'intéresse autant qu'un nouveau jouet. Il le saisit mais sans pouvoir le tenir seul (l'examinateur est obligé de soutenir le stylo pour que Johnny ne le lâche pas). L'enfant ne peut ni soulever la tête ni saisir le stylo de la main droite. Il s'en désintéresse très vite, peut-être distrait par la caméra qui se trouve à sa gauche. On remarquera qu'il regarde à nouveau le spectateur "droit dans les yeux" au moment précis où la voix off dit que Johnny ne peut rien faire à sa situation (there's nothing he can do about that) comme s'il voulait interpeler celui qui est train de le regarder. (01ː43)
La poliomyélite ː les adultes ne sont pas épargnés
Un jeune homme est couché dans son lit, chez lui. Sa mère, souriante et attendrie, parle avec le médecin d'un air plutôt enjoué. La voix off explique que le terme poliomyélite convient mieux que paralysie infantile car depuis toujours, cette maladie atteint des adultes. (Elle touche d'ailleurs autant d'adultes que d'enfants au moment où ce film est produit.) Le jeune homme alité, John Broadbent, a 19 ans. Il a eu la sagesse de se mettre au lit (He sensibly went to bed) quand il a commencé à avoir des symptômes grippaux. Assis sur son lit, le médecin prend sa température et l'interroge sur ses symptômes. John semble décrire une raideur ou une douleur dans la nuque. Le médecin lui fait passer un petit test pour établir un diagnostic différentiel car au début, la polio ressemble beaucoup à certaines autres maladies (In the early stages, there's often not much to distinguish polio from some other diseases.) Il le fait asseoir sur son lit, les jambes repliées, et lui demande de toucher ses genoux avec son nez. Le fait qu'il n'y arrive pas, associé à une "faiblesse" dans la jambe gauche, évoque la poliomyélite. Le diagnostic n'est pas encore posé mais comme une prise en charge précoce améliore largement le pronostic, John est aussitôt transporté à l'hôpital (deux ambulanciers sortent un malade d'une ambulance sur un brancard ). "Les médecins préfèrent être prudents." (Doctors err on the safe side.)
Deux unes de journaux, l'un indiquant un nombre de nouveaux cas (662, date inconnue), l'autre une diminution du nombre de cas (septembre 1947 ?) (02ː58)
Prise en charge hospitalière
Le film ne s'attarde pas sur la phase aiguë de la maladie (pour laquelle il n'y a pas de traitement) et passe tout de suite à la rééducation. Une infirmière découvre une petite patiente qui a un arceau dans son lit pour ne pas être gênée par le poids des couvertures. L'objectif des soins qui suivent est de permettre aux patients de se prendre en charge, c'est-à-dire de dépendre au minimum d'autrui et de la société. Un homme (infirmier, médecin, kinésithérapeute ?) mobilise les jambes d'un enfant dont on ne voit pas le visage. Ce travail permet aux médecins et aux patients "d'exprimer leur ingéniosité" ((...) rehabilitation offers tremendous scope for the ingenuity of both doctors and patients). Ce commentaire éveille la curiosité du téléspectateur qui restera cependant sur sa faim car le film n'en dit pas plus à ce sujet. La voix off insiste sur les transferts de connaissances qui s'effectuent d'un domaine à l'autre ː d'une part les techniques de rééducation naissent de l'étude d'autres maladies et des suites d'accidents, d'autre part elles s'appliquent ensuite à des patients souffrant d'autres maladies que la polio.
Succession de plans présentant une progression dans la rééducation ː mobilisation de l'articulation de la hanche ; marche entre deux barres parallèles pour John Broadbent et en poussant un petit chariot pour une fillette avec des tresses (la voix off souligne la dynamique qui peut se créer entre deux patients qui travaillent en même temps et s'encouragent tandis qu'on voit John et la fillette échanger quelques mots avant de reprendre leurs exercices respectifs). (04ː00)
Le modèle de la réussite ultime et de la ténacité, malgré la maladie
Des images manifestement tirées des actualités montrent l'inauguration de la statue de Franklin Roosevelt à Grosvenor Square à Londres le 12 avril 1948, en présence du roi Georges VI, de son épouse et de Mme Roosevelt. Musique triomphale (cuivres) lorsque la statue de l'ancien président des États-Unis est dévoilée. Transition de la voix off masculine (l'acteur Michael Redgrave) à Eleanor Roosevelt qui va expliquer ce que signifie "avoir foi en la rééducation".(05ː02)
Poursuite de la description de la prise en charge hospitalière et de la rééducation
Une femme vient de réajuster l'orthèse que la fillette aux tresses porte à la jambe gauche. Elle l'aide à faire quelques pas. Par contraste, Mme Roosevelt explique qu'elle se souvient de l'époque où avoir la polio signifiait qu'on resterait infirme toute sa vie. Manifestement, ce ne sera pas le cas de cette fillette qui est en train de récupérer la marche. Le film veut montrer ici que sa génération (celle des enfants des spectateurs pour qui ce film est conçu) aura moins à souffrir que celle de Franklin Roosevelt (qui a eu la polio en 1921, à l'âge de 39 ans) car "on a beaucoup progressé depuis cette époque" (A great deal has been done since then.)
Plan sur une femme en train de faire des exercices lents dans une piscine. E. Roosevelt rappelle que son mari avait fait construire une piscine pour ses exercices à la Maison Blanche mais que pour la plupart des gens, ce genre d'équipement est un luxe. Ce commentaire renvoie à la situation américaine car elle précise tout de suite qu'en Grande-Bretagne "être soigné à l'hôpital est un droit" (In Britain, hospital treatment exists as a right.)
Retour sur la petite fille aux tresses qui s'exerce à marcher entre les barres parallèles. "Les progrès ne sont pas toujours directs et simples." (Progress isn't always straightforward and simple.) Il ne s'agit pas de tromper les spectateurs en leur donnant de fausses idées sur la réalité des efforts nécessaires pour reprendre une vie normale mais de leur faire comprendre que la reprise d'une vie normale est possible et que c'est l'objectif du travail de rééducation.
Plan rapide sur un poumon d'acier autour duquel s'affairent deux infirmières. La gravité de l'état des patients qui ont besoin de ce type d'appareil et son caractère impressionnant sont atténués par un plan sur le visage du petit patient concerné, un garçonnet bouclé et souriant. (06ː05)
L'école à l'hôpital
Une dizaine de lits sont alignés dans une grande salle, une institutrice écrit sur un tableau noir. L'objectif de cette séquence n'est pas de détailler les apprentissages proposés aux petits patients mais de faire comprendre aux spectateurs que l'intelligence de ces enfants est intacte (pour aller à l'encontre d'idées reçues et de peurs ?) Un enfant écrit à la machine, d'autres, dans diverses positions, utilisent des crayons et des cahiers ordinaires. Plan sur le petit journal qui réunit leurs articles, notamment sur la vie de l'hôpital, leur lieu de vie pendant de nombreux mois.
Cette forme de scolarisation adaptée, rendue nécessaire par les soins hospitaliers dont les enfants ont besoin, peut être mise en parallèle avec le film Des enfants comme les autres où le choix d'une séparation stricte entre élèves voyants et malvoyants (notamment pendant la récréation) est peut-être moins compréhensible.(06ː41)
Ouverture sur la vie d'après
Divers plans sur des activités artistiques et artisanales permettant aux patients (adultes cette fois-ci) d'utiliser leurs muscles endommagés (making patients use their damaged muscles) ː peinture, tissage, travail du cuir, etc. Le nom de certains patients est cité. Ainsi, Sheila Harris est déterminée à "rendre sa vie utile" et E. Roosevelt affirme avec autorité qu'elle y parviendra (she is determined to lead a useful life, and she will.)
Nouveau message d'espoir ː on retrouve John Broadbent en train d'utiliser un métier à tisser sur les pédales duquel ses pieds sont sanglés pour qu'il puisse les manœuvrer. John fait partie de cette majorité de patients qui "contre-attaquent" (they fight back) et ne souffriront pas de séquelles graves.
Petite séquence sur Felicity Lane Fox (cf. Notes complémentaires ci-dessous), également en train de tisser. Elle a entrepris une carrière politique. L'adaptation de son siège lui permet de passer de la station assise à la station debout quasiment sans aide (cuivres triomphants et coupe de cymbale quand elle arrive à la station debout), ce qui est un nouveau rappel des possibilités d'autonomie de ces patients.
Petite séquence sur une autre personnalité, Richmal Crompton, auteure à succès, notamment de livres pour enfants (cf. Notes complémentaires ci-dessous), en train de travailler avec deux hommes (s'agit-il de la préparation d'un enregistrement pour la radio ?). La canne dont elle a besoin pour marcher est visible.
Petite séquence sur une jeune femme qui conduit une voiture. C'est une assistante sociale qui a eu elle-même la poliomyélite et qui, grâce à l'adaptation de sa voiture (embrayage manuel), peut mener une vie normale et "travaille aussi dur qu'une personne valide" ((...) works as hard as someone sound in every limb.) Sur cette séquence, on relève un petit élément discordant. En parlant de cette assistante sociale, E. Roosevelt dit ː "the almoner of this very hospital" ("l'assistante sociale de cet hôpital"). Or il n'est question d'aucun hôpital en particulier dans ce film. C'est en fait une trace du film (Polio Diagnosis and Management) dont certaines scènes ont été remontées pour réaliser His Fighting Chance. La séquence sur l'assistance sociale y est beaucoup plus longue puisqu'on explique d'abord son rôle dans le reclassement professionnel des personnes qui ont eu la polio avant de l'entendre évoquer la raison de son dévouement particulier pour ce type de malades ː elle a eu elle-même la polio. (08ː03)
Un exemple de reclassement professionnel
Retour sur John Broadbent. Sa vie va devoir changer. Il lui faut un métier qu'il pourra exercer assis. Ce passage pose un problème de compréhension pour le spectateur car la profession ou la formation antérieure de John n'ont pas été mentionnées jusque-là. Seul le spectateur qui a vu également Polio Diagnosis and Management sait que John était apprenti aux chemins de fer avant de tomber malade...
John reprend une formation pour devenir dessinateur industriel. En voix off, il explique ce qu'il pense de ce changement. Son commentaire insiste sur la satisfaction qu'il éprouve à retrouver une vie active normale. Lui aussi, comme le petit Johnny Green, regarde quelques instants en direction de la caméra. Droit et digne, il semble interpeler le spectateur qui oserait mettre en doute ses capacités ou le rejeter.
Ce passage peut être mis en parallèle avec toute la seconde moitié du film Clarté dans la nuit où, comme ici, l'accent est mis non pas sur les limitations imposées par le handicap (qui est d'ailleurs très peu visible à l'écran) mais sur l'insertion dans un milieu professionnel aussi normal que possible. (08ː52)
Tous les espoirs sont permis
Retour sur Johnny Green, le petit garçon du début du film. Un an a passé, il est toujours à l'hôpital (aucune allusion aux éventuels dommages psychologiques d'une séparation aussi longue d'avec la famille). Johnny ne peut toujours pas marcher mais on remarque qu'il tient un jouet de la main gauche. Une infirmière mobilise ses bras. E. Roosevelt explique que des médecins, des infirmières et ses parents vont l'aider. Plan rapproché sur Johnny. Pour lui, tous les espoirs sont permis grâce aux progrès qui ont été faits depuis l'époque où Franklin Roosevelt est tombé malade (soit près de 30 ans auparavant). L'enfant est à nouveau face caméra et semble regarder le spectateur droit dans les yeux comme s'il le mettait au défi de contredire le message d'espoir et les exhortations d'Eleanor Roosevelt (Go ahead, Johnny, and win through/"Vas-y, Johnny, tu vaincras").

Notes complémentaires

La baronne Felicity Lane-Fox (1918-1988) était membre de la Chambre des Lords (parti Conservateur). Frappée par la poliomyélite à l'âge de 12 ans, elle défend la cause des personnes handicapées au parlement britannique et reçoit l'OBE (Order of the British Empire) pour services rendus aux personnes handicapées.
Elle a raconté sa lutte incessante contre la maladie dans ses mémoires intitulées Triumphing over Disability.

Richmal Crompton (1890-1969) attrape la poliomyélite à l'âge de 33 ans, à la suite de quoi elle perd l'usage de la jambe droite. Elle abandonne sa carrière de professeur d'anglais et se consacre à l'écriture. Elle écrit de nombreux livres pour enfants (notamment la série William qui compte une quarantaine de livres), des nouvelles humoristiques et une quarantaine de romans pour adultes.

Références et documents externes

Contributeurs

  • Auteurs de la fiche : Élisabeth Fuchs
  • Transcription Anglais : Jérôme Fuchs
  • Sous-titres Français : Jérôme Fuchs
Erc-logo.png  Cette fiche a été rédigée et/ou traduite dans le cadre du projet BodyCapital, financé par l'European Research Council (ERC) et le programme de l'Union européenne pour la recherche et l'innovation Horizon 2020 (grant agreement No 694817).