Des ouvriers en usine (1966)
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Sommaire
Générique principal
Gén. début : L’Homme et son milieu / Des ouvriers en usine.
Gén. fin : "dans la série animée par Michel Denel / C'était une émission de Jacques Morin et Léon Wisniewski / Avec le concours de la société industrielle de l'Artois / Prises de vues : François Vieuxgue et Jean-Claude Rahaga / réalisation Jacques Morin
Contenus
Sujet
Sur l'exemple d'une menuiserie industrielle en Artois, description du mode de travail et de la condition des ouvriers en usine : la mécanisation du travail, la différenciation des tâches au sein d’une usine, enfin le risque de déqualification du travail. Par ailleurs, l'émission invite à se demander s'il vaut mieux qu'un produit soit fabriqué en usine ou par un artisan.
Genre dominant
Résumé
Plusieurs ouvriers de la « Société Industrielle de l'Artois » (abrégée SIA dans le film) sont interrogés sur leur travail en usine (fonction, perception…). Leurs témoignages sont confrontés à celui d'un artisan. Le film présente également le parcours du bois depuis le stade de l’empilage pour le sécher jusqu’à celui de l’assemblage. Les différentes interviews d'ouvriers et des patrons évoquent la pratique de la division du travail et l'enjeu du rendement (il est précisé que les ouvriers sont augmentés si le rendement est jugé bon). Par la division des tâches, chaque ouvrier est spécialisé dans une tâche bien précise, au contraire de l’artisan qui maîtrise les différentes tâches d'une activité. Les dirigeants de l'usine expliquent également ce qu'ils attendent de leurs ouvriers, quels sont leurs critères d'embauches, comment ils « forment » leurs ouvriers.
Contexte
En 1966, nous sommes dans « Les Trente Glorieuses ». Le taux de chômage est très bas et la production industrielle est en plein progrès, avec des rendements en constante augmentation. La production est de plus en plus mécanisée, la course à la rentabilité bat son plein en raison de la société de consommation. Dans le domaine économique, la croissance française se porte bien. Le PIB (Produit Intérieur Brut qui désigne la richesse produite par un État) est élevé tout comme le taux de croissance qui reste élevé pendant cette période. Les classes moyennes, ayant acquis plus d'aisance, vivent différemment. Avec « Les Trente Glorieuses » éclot la société de consommation.
Éléments structurants du film
- Images de reportage : Non.
- Images en plateau : Non.
- Images d'archives : Non.
- Séquences d'animation : Non.
- Cartons : Oui.
- Animateur : Non.
- Voix off : Oui.
- Interview : Oui.
- Musique et bruitages : Oui.
- Images communes avec d'autres films : Non.
Comment le film dirige-t-il le regard du spectateur ?
La réalisation se veut didactique. Choix de plans fixes centrés sur un ou plusieurs ouvriers en train de réaliser leur tâche. Le montage présente les différentes étapes du travail, du rangement de la matière première jusqu’à la réalisation de la pièce finale. Notons que le montage est plus dynamique quand le film montre les ouvriers à la tâche que quand il montre l’artisan. Le travelling est employé pour détailler un poste de travail particulièrement étendu ou une expérience mise en scène en comparant 2 « équipes ». Le dézoom est quant à lui très largement utilisé, à la fois pour montrer une situation dans son ensemble et souligner la vastitude des locaux de l’usine.
Comment la santé et la médecine sont-elles présentées ?
Si les questions de santé et de médecine ne sont pas clairement présentées, elles ne sont néanmoins pas absentes du film. Le spectateur peut se demander ce qu’implique, physiquement et psychiquement, le travail des ouvriers dans une usine sur les journées, sur les horaires. Par ailleurs, des questions restent en suspens : quel est leur rapport à l’accident du travail, les travailleurs se sentent-ils en sécurité ?
Diffusion et réception
Où le film est-il projeté ?
télévision scolaire
Communications et événements associés au film
Bulletin de la RTS (Radio-Télévision Scolaire)
Public
Élèves des écoles.
Audience
Descriptif libre
Ouvriers et artisans
Panoramique dans l'usine, la caméra resserre sur un journaliste qui s'entretient avec deux ouvriers qui charrient des planches en piles. Il évoque devant eux les propos qu'un artisan lui a livrés lors d'un entretien précédent : "pour rien au monde, il n'aurait voulu être un ouvrier". Selon l'un des deux ouvriers, l'artisan veut simplement "continuer son petit boulot" en ignorant le modernisme. Avec l'usine, la menuiserie est devenue "simple". Quand le journaliste lui demande s'il serrait capable de travailler comme un artisan, l'ouvrier répond qu'il ne connaît que "la méthode moderne". En plans de coupe, des vues sur un menuisier à l'ancienne, oeuvrant dans son atelier, avec un gros plan sur ses outils (cette séquence rappelle les réalisations de Georges Rouquier sur le tonnelier et le charron pendant les années 40 : à rappeler que le réalisateur Jacques Morin, ainsi que son assistant Léon Wisniewski, ont travaillé sur un film CNDP réalisé en 1965 par Georges Rouquier : L'ouvrier). Quand le film montre le travail des ouvriers, le découpage s'accélère, le montage est dynamique. Le visage des ouvriers n'est pas montré – par contre, les machines elles sont souvent au cœur des images - , le travail reste anonyme, au contraire de l’artisan montré de la tête au pied. Le montage est moins saccadé. Carton interactif : "Préféreriez-vous être : artisan? ouvrier?" (06:02)
La division du travail
Carton : « Des ouvriers en usine. 1° - De l’atelier à l’usine ou la division du travail ». Le film expose le processus de transformation et de fabrication du bois. Le commentaire insiste sur un principe clé : la division des tâches et les effectifs ouvriers. Les ouvriers complètent le travail des machines, ils deviennent un élément de la mécanique mise en place. Le commentaire précise que sur l’ensemble des effectifs, seuls 15% des ouvriers sont dits « qualifiés ». Il accumule les informations chiffrées (productions de portes, d’escaliers, de fenêtres, nombre d’ouvriers…) pour montrer l’ampleur de la productivité en usine et la spécificité de ses tâches. "Nous avons vu des machines, encore des machines, toujours des machines, et des hommes derrière les machines." Un carton pour finir : "Quelles traces humaines?" Le film cherche à orienter sa présentation vers la souffrance au travail, suggérant que le modernisme entraîne une pression psychique qu'il faut mettre en évidence. Il demande en quelque sorte de dépasser la simple lecture des images, de chercher à discerner ce que dissimule une chaîne de tâches uniforme servie par des machines efficaces et complémentaires. (13:14)
L'importance du rendement
Carton : "Des ouvriers en usine - 2° - le rendement des travailleurs". Cette séquence rappelle la stratégie qu’emploie l’entreprise afin d’accroître sa production et améliorer ses rendements en ayant mis en place une prime de rendement. Le journaliste tend son micro à des ouvriers groupés autour de lui, les interrogeant sur le rendement. Ils en constatent l'augmentation "à de petites choses", et l'augmentation de leur salaire par la prime relative au travail supplémentaire fourni. Ils sont invités à déclarer s'ils jugent cette augmentation intéressante, mais leurs réponses sont prudentes.
Dans son bureau, le Président Directeur Général est interrogé. Il assume totalement la stratégie de la prime de rendement qu'il a mise ne place en juin 1964. La raison : "arriver à être compétitifs vis-à-vis de la concurrence". Un ouvrier interrogé devant la tenonneuse sur laquelle il travaille. Il n'est plus impressionné par cette machine que d'autres pourraient trouver "monstrueuse". Il ajoute qu'elle reste néanmoins très difficile à régler. Faire "partie de la machine", pour lui, c'est s'être suffisamment familiarisé avec elle. Il ne s'agit pas de renoncer à son humanité par l'acquisition d'un état fusionnel avec elle, comme voudrait le lui faire dire le journaliste.
Pour rendre la stratégie de rendement plus compréhensible, une expérience est faite : mettre deux équipes de travailleurs l’une à côté de l’autre, l'une où ses membres sont monotâches, l'autre où ils sont chacun sur toutes les tâches. Sans doute faut-il estimer que la première équipe est la plus efficace, mais les résultats filmés ne permettent pas de tirer cette conclusion de façon claire. De même, la question de la prime n'est plus évoquée alors qu'il en a été question pendant toute la séquence. (21:10)
Dire la condition prolétaire?
Carton : « Des ouvriers en usine. 3° - L’ouvrier et sa condition ». Des patrons affirment en entretien la stratégie privilégier l'emploi des ouvriers « spécialisés » plutôt que des ouvriers « qualifiés ». Un ouvrier est dit spécialisé quand il est affecté à la réalisation d'une unique tâche. Ils décrivent un mode de qualification qui favorise l'augmentation de la productivité par une formation appropriée. Leur modèle d’organisation est plus productif et plus rentable économiquement.
Dernier plan du film : sortie d’usine, les ouvriers prennent leurs voitures ou leurs bicyclettes. L'atmosphère paraît gaie, avec des voix qui s'interpellent et des corps qui occupent l'espace en désordre. Ce plan contraste avec leur réserve et leurs attitudes contraintes quand ils se trouvaient dans les ateliers. Une musique pompeuse et inquiétante recouvre les bruits ambiants qui flottent sur les grands trottoirs et les chaussées humides de pluie qui séparent les bâtiments.
Notes complémentaires
Références et documents externes
Contributeurs
- Auteurs de la fiche : Jules Gross