Maurice Baquet
Professeur et expert pédagogique
Militaire de carrière, titulaire du certificat d’aptitude à l’enseignement de la gymnastique (CAEG) degré supérieur depuis 1922, Maurice Baquet est détaché en Pologne de 1922 à 1926 en tant que professeur d’éducation physique au lycée de Varsovie. Mis en retraite de l’armée, il intègre le système éducatif en 1931 pour prendre le poste de professeur de gymnastique au lycée de garçons de Versailles qu’il quitte pour le lycée Buffon à Paris à la rentrée 1935. L’année scolaire 1935-1936 est un véritable tournant dans sa carrière. Préparateur des équipes de France pour les Jeux olympiques de 1936, reconnu pour ses compétences techniques et pédagogiques grâce à ses nombreuses publications dans la revue L’athlétisme, il devient en novembre 1935 directeur technique de l’ENEP. Il occupe toujours cette fonction au début de la guerre avant d’être nommé en 1943, sur sa demande, responsable national de la doctrine de pédagogie sportive au Centre national d’éducation générale et sportive (CNEGS). Il a alors en charge de conceptualiser et de diffuser une méthode nationale de pédagogie sportive.
Un apport théorique sur l'éducation par le sport
Loin d’être inquiété à la Libération, il est promu inspecteur de la jeunesse et des sports et nommé directeur adjoint de l’INS. Il s’investit parallèlement dans la Fédération sportive et gymnique du travail (FSGT), fédération travailliste prônant une éducation du plus grand nombre par le biais des sports, dont il semble être proche sur le plan idéologique. Il reste jusqu’à la fin des années 1950 un membre très actif de cette structure, multipliant les voyages dans les pays de l’Est (Yougoslavie en 1947, Pologne en 1955, République démocratique allemande en 1958) et les interventions sur le sol français.
Quoi qu’il en soit, il s’affirme dès la fin de la guerre en leader et porte-parole des défenseurs de la méthode sportive, comme en témoigne son dynamisme en matière de publications : entre 1946 et 1952, il signe trente-deux articles dans INS ou Héraclès (jamais dans le Bulletin de l’Amicale ni dans la revue EPS) dont vingt concernent spécifiquement l’éducation sportive pour les enfants. Il participe également à la réalisation de deux courts-métrages produits par la DGEPS : Soyons sportifs. La vie d’une association sportive (1945) et Courses de haies (1947). Découlant de ses expériences passées, de son appartenance à l’INS et de ses activités militantes, les articles qu’il publie sont l’occasion de mettre en avant une certaine conception de l’action éducative et de rappeler les finalités qu’il convient de poursuivre par le biais des sports. Précisant que l’éducation physique est incluse dans la méthode sportive « comme le solfège dans la musique et la grammaire dans la littérature », il insiste sur la portée éducative des activités sportives qui ont, comme il l’affirmait déjà dans un de ses ouvrages phares en 1942, des bienfaits « morphologique, fonctionnel et hygiénique », mais aussi « technique, caractériel, social et même intellectuel ». L’importance de la formation des enseignants, soulignée en 1942, est rappelée à de multiples reprises. Ses articles laissent par ailleurs entrevoir une conception moniste de l’être humain : « L’homme, corps, esprit, caractère est un tout indissociable », écrit-il ainsi dans la Revue de l’INS en 1947. Seules les activités sportives sont, selon lui, en mesure d’offrir une éducation complète aux enfants car, en tant que « forme supérieure de jeu », les actions à réaliser ne sont « ni figées, ni limitées. Elles posent des problèmes, des difficultés, elles déchaînent les instincts et les passions »43. La volonté de prendre en considération la psychologie des enfants est par ailleurs très marquée. Il vante, comme dans les deux ouvrages qu’il a rédigés durant la guerre, les mérites d’une méthode qui, loin des exercices « mornes et mièvres », respecterait le besoin de jeu et le plaisir d’apprendre. Cette méthode moderne ne peut ignorer les situations de compétition, car celles-ci provoquent des émotions proches de celles ressenties « dans la vie ». Très largement diffusées, ces propositions font l’unanimité auprès des cadres de l’INS et des spécialistes des sports des deux écoles normales – rebaptisées chacune École normale supérieure d’éducation physique et sportive (ENSEPS) par décret du 27 novembre 1946 – à la fin des années 1940.
Mise au point de la la méthode d’éducation physique sportive généralisée
Au-delà de ces principes, Maurice Baquet entend baliser les recherches pédagogiques en proposant un canevas à partir duquel élaborer ce qu’il nomme la méthode d’éducation physique sportive généralisée (EPSG). Celle-ci, en plein chantier, devrait, selon lui, s’organiser autour de deux étapes (initiation et entraînement), elles-mêmes déclinées en deux types de séances : généralisées et spécialisées. La séance de type « initiation sportive généralisée », particulièrement adaptée aux scolaires, est composée de cinq temps de travail différents afin qu’elle ait une réelle efficacité pédagogique : une mise en train, des exercices d’assouplissement et de musculation, des exercices de cran et d’agilité, des exercices sportifs et un retour au calme. Quatre spécialités sportives sont jugées nécessaires à utiliser pour obtenir des résultats probants : l’athlétisme, la natation, les sports collectifs, un sport de combat pour les garçons ou de rythmique pour les filles. Si ses propositions répondent bien aux attentes protéiformes du système éducatif, soucieux que le temps scolaire soit balisé et que les exercices soient adaptés aux buts poursuivis, l’auteur se contente de donner quelques illustrations au gré de ses articles et confie à la commission de pédagogie de l’INS le soin de concrétiser l’ensemble.
Parmi ses ouvrages :
BAQUET M. (1942), Éducation sportive. Initiation et entraînement, Paris, Godin.
BAQUET M. (1943), Précis d’initiation sportive : à l’usage de l’enseignement primaire et des organisations de jeunesse, Paris, Bourrelier.
BAQUET M. (1946), « La doctrine d’éducation sportive », Héraclès, nº 1, mars.
BAQUET M. (1946), « Éducation sportive. Exemple de séance d’éducation sportive », Héraclès, nº 5, juillet.
BAQUET M. (1947), « Influences du sport », Revue de l’INS, mars.
BAQUET M. (1947), « Comment orienter notre éducation », Revue de l’INS, nº 2, novembre, p. 2-3.
BAQUET M. (1949), « Le jeu et le sport dans l’éducation moderne », INS. Cahiers techniques et pédagogiques, nº 1, janvier, p. 2.
BAQUET M. (1949), « Caractéristique de la séance d’éducation sportive », INS. Cahiers techniques et pédagogiques, nº 6, novembre-décembre, p. 3-4.
BAQUET M. (1951), « Principes d’éducation physique sportive généralisée », INS. Cahiers techniques et pédagogiques, nº 13, janvier-février, p. 11-13.
BAQUET M., SERA M. (1942), Courses de demi-fond, Paris, Fédération française d’athlétisme (Cahier de l’athlétisme).
(D'après Gomet, Doriane. « Reconstruire les corps par le sport : un projet éducatif en pleine effervescence ». Reconstructions physique et sportive en France sous la IVe République (1946-1958), édité par Frédéric Dutheil et al., Presses universitaires de Caen, 2018).
Sur MedFilm
Référent scientifique pour