La scolarité oui, mais... (1994)

De Medfilm



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Titre :
La scolarité oui, mais...
Série :
Année de production :
Pays de production :
Réalisation :
Durée :
14 minutes
Métrage :
56 mètres
Format :
Parlant - Couleur -
Langues d'origine :
Sous-titrage et transcription :
Sociétés de production :
Commanditaires :
Corpus :

Générique principal

Raphaëlle, Nicolas, Ayrald...
Histoires aux Singuliers II
Un film de Catherine MARDINÉ

"La scolarité oui, mais..."

(Le générique de fin est extrêmement détaillé et donne le nom de tous les intervenants et de toutes les institutions concernées.)

Contenus

Thèmes médicaux

Sujet

La scolarité des enfants handicapés.

Genre dominant

Documentaire

Résumé

Ce documentaire montre l'intégration scolaire de trois enfants de 10-12 ans porteurs de divers handicaps. Les enfants eux-mêmes sont interviewés, ainsi que leurs parents et divers acteurs de l'intégration scolaire.

Contexte

Les Centres Régionaux de l’Enfance et l’Adolescence Inadaptée (CREAI) ont été créés le 22 janvier 1964 par un arrêté du Ministère de la Santé. Il s'agissait de créer, dans chaque région de France Métropolitaine et DOM-TOM, un lieu ouvert à tous les partenaires de l'action sociale en vue de favoriser leur collaboration et de créer une équipe technique compétente à la disposition du terrain et de l'administration qui venait d'être mise en place (DDASS et DRASS). Les CREAI devaient également jouer un rôle important dans le domaine de l'information et de la formation. Un Commissaire du Gouvernement veillait au bon fonctionnement de l'organisme et l'État accordait une subvention de fonctionnement.
De nos jours, suite à une note de service interministérielle du 13 janvier 1984, les CREAI ont pour mission principale d'être des lieux de repérage et d’analyse des besoins et d’étude des réponses à y apporter, des lieux de rencontre et de réflexion entre les élus, les représentants des forces sociales et ceux des administrations concernées, de fournir des analyses et des avis techniques aux décideurs, ainsi qu'aux gestionnaires des établissements et services.
Ils ont à cet égard un rôle important à jouer comme outil technique au service des responsables de l'élaboration et de la mise en œuvre de la politique en faveur des personnes en situation de vulnérabilité à l'échelon régional.

En France, la Loi d'orientation de 1975 fixe une obligation de scolarisation pour les enfants handicapés. Par la suite, les circulaires de janvier 1982 et janvier 1983 visent à "favoriser l'insertion sociale de l'enfant handicapé en le plaçant le plus tôt possible dans un milieu ordinaire où il puisse développer sa personnalité et faire accepter sa différence."
Deux modes d'intégration sont proposés ː une intégration individuelle (en classe ordinaire) ou collective (regroupement d'enfants en unités spécialisées).
En 1994, année de diffusion de ce film, l'UNESCO adopte la Déclaration de Salamanque "sur les principes, les politiques et les pratiques en matière d’éducation et de besoins éducatifs spéciaux". "L’adoption, en 1993, des Règles des Nations Unies pour l’égalisation des chances des handicapés qui exhortent les États à garantir que l’éducation des personnes handicapées fasse partie intégrante du système éducatif" est rappelée.
La Charte du Luxembourg promulguée par l’Union européenne en 1996 "prône une école pour tous et pour chacun" en plaçant "la personne au centre de tout projet éducatif en reconnaissant les potentialités de chacun et ses besoins spécifiques".
(Il est important de noter les mentalités à l'égard du handicap que dénonce l'acteur Lino Ventura, fondateur de l'association "Perce-Neige", lorsqu'il est interviewé à la télévision en 1979 sur le refus des habitants de Sèvres de voir un centre pour handicapés se construire sur leur commune.)

Éléments structurants du film

  • Images de reportage : Oui.
  • Images en plateau : Non.
  • Images d'archives : Non.
  • Séquences d'animation : Non.
  • Cartons : Non.
  • Animateur : Non.
  • Voix off : Oui.
  • Interview : Oui.
  • Musique et bruitages : Oui.
  • Images communes avec d'autres films : Non.

Comment le film dirige-t-il le regard du spectateur ?

Ce documentaire donne la parole de façon assez équilibrée à des enfants handicapés, à leurs parents et à des acteurs de l'intégration scolaire (directeurs d'école, directeur adjoint de l'enseignement catholique, directrice de SESSAD, déléguée départementale à l'intégration). La parole des enfants est particulièrement marquante du fait de la grande maturité dont ils font preuve. Néanmoins, les professionnels les plus directement concernés par l'intégration scolaire, à savoir les enseignants, sont quasiment absents. On voit furtivement l'instituteur de Raphaëlle et on entend l'instituteur d'Ayrald sans le voir. La seule enseignante qui s'exprime à l'écran (professeure dans une classe pour enfants sourds) est assez critique et dénonce une "soi-disant intégration". Est-ce la raison pour laquelle le choix a été fait de si peu donner la parole aux enseignants ? Y avait-il un risque que ces derniers révèlent trop de difficultés ? En effet, sur la plus grande partie de ce documentaire, l'intégration scolaire des enfants handicapés est présentée comme très positive, voire idyllique, notamment par le contraste mis en scène entre des enfants apparemment bien adaptés au système scolaire ordinaire et des parents anxieux et fatigués. Les difficultés éventuelles ne sont pas abordées (incompatibilité entre l'emploi du temps scolaire et les besoins en prise en charge médicale et paramédicale des enfants, surcharge de travail pour les enseignants, fatigue supplémentaire des enfants, etc.) et la question des enfants dont le handicap est trop lourd pour permettre une intégration scolaire en milieu ordinaire est totalement occultée.

Comment la santé et la médecine sont-elles présentées ?

Ni la santé ni la médecine ne sont abordées dans ce documentaire, ce qui est particulièrement étonnant car pour au moins trois des enfants présentés, et pour une grande partie des enfants handicapés en général, la nécessité d'avoir un suivi médical et/ou paramédical (séances de kinésithérapie, d'orthophonie, de psychomotricité, etc.) a forcément un impact sur l'intégration scolaire (difficulté à caser des rendez-vous en dehors du temps scolaire, fatigue supplémentaire pour l'enfant, modalités de collaboration entre les thérapeutes et l'école à mettre en place, etc.).

Diffusion et réception

Où le film est-il projeté ?

Diffusion dans des contextes de sensibilisation professionnelle.

Communications et événements associés au film

Public

Tout public

Audience

Descriptif libre

Raphaëlle Premier plan sur des toits de maison dans une brume matinale. Assise à une table, Raphaëlle prend son petit déjeuner. Son visage est masqué par le bol qu'elle tient à deux mains. Lorsqu'elle le pose, on s'aperçoit qu'elle est trisomique. Sa mère s'affaire autour de l'évier de la cuisine. Plan montrant Raphaëlle assise dans une voiture qui roule. L'interview de sa mère commence en même temps (la personne qui pose les questions reste invisible). La mère de Raphaëlle est interrogée sur la façon dont elle envisage l'avenir de sa fille. Elle avoue ressentir à la fois un certain pessimisme et un étonnement devant ce que sa fille a accompli jusque-là (scolarisation en classe intégrée au lieu d'un institut médico-pédagogique). Retour dans la voiture. C'est le père de Raphaëlle qui conduit, il lui donne des consignes sur l'heure à laquelle ils se retrouveront en fin de journée. La caméra est placée derrière lui, si bien que le spectateur voit la situation à travers les yeux de Raphaëlle.
Plan rapide sur Raphaëlle dans sa classe. Elle est en train d'écrire quelque chose. Les autres enfants semblent avoir environ trois ans de plus qu'elle. M. Abric, directeur d'école publique, est interviewé face caméra. Il est très favorable à "l'orientation actuelle" ː "autant que possible (...) ces enfants doivent être acceptés dans le milieu de société normal." On notera que la désignation "ces enfants" est assez vague et qu'on ne sait pas si ce directeur parle des enfants trisomiques, des enfants déficients intellectuels ou des enfants handicapés en général. Pour M. Abric, une démarche d'intégration permet d'éviter une marginalisation de la personne à l'âge adulte. C'est pour lui "un devoir moral". Retour rapide sur la classe où l'instituteur est penché sur le travail de Raphaëlle et s'entretient avec elle. Cette image transmet le message d'une attention individualisée accordée à l'enfant qui ne peut que s'épanouir dans un cadre aussi favorable.
Retour à l'interview de la mère de Raphaëlle qui avoue sa difficulté personnelle à laisser sa fille prendre de l'autonomie et mettre en œuvre toutes ses capacités (par exemple, aller faire des courses seule). Elle souligne que si les "éducateurs" n'incitaient pas sa fille à passer ces étapes, elle ne le ferait pas. La mention très rapide du travail des éducateurs auprès de Raphaëlle révèle un aspect de la prise en charge du handicap qui n'est abordé qu'à travers des allusions indirectes par ce film. Il est extrêmement rare qu'un enfant handicapé, même parfaitement intégré dans un établissement scolaire ordinaire, n'ait pas besoin d'un suivi extra-scolaire. Suivant le type de handicap dont il est porteur, il peut avoir besoin d'un suivi psychologique et/ou éducatif, de séances de kinésithérapie, d'orthophonie, de psychomotricité, d'un auxiliaire de vie scolaire, etc. en cabinet de ville ou en lien avec un service ou un établissement spécialisé. Ici, étant donné que Raphaëlle a une trisomie 21, on peut imaginer que les éducateurs dont il est question font partie d'un SESSAD (Service d'éducation spéciale et de soins à domicile) et qu'elle bénéficie également d'autres prises en charge.
Interview de Raphaëlle assise en tailleur sur son lit. Elle est parfois un peu difficile à comprendre parce que sa voix est grave et soufflée, et son rythme un peu précipité mais ses phrases sont remarquablement bien construites et sa compréhension excellente. Pour ce qu'on peut en voir dans cette courte séquence, elle a un niveau de langage (et probablement un niveau intellectuel) nettement au-dessus de la majorité des enfants trisomiques de son âge pour l'époque.
Interrogée sur ce qu'elle conseillerait aux parents d'enfants trisomiques, Raphaëlle répond en parlant d'autonomie, comme sa mère ː "Il faut qu'ils apprennent à faire tout tout seuls, ce serait merveilleux pour les parents." (03'18)
Nicolas
Contrairement à la séquence précédente où on découvrait l'enfant progressivement, à mesure qu'elle posait son bol, cette fois-ci la caméra est placée d'emblée face à un jeune garçon mince dont les mains partent directement des épaules. Il souffre manifestement d'agénésie des bras et des avant-bras. Il est installé sur son lit, au milieu de ses peluches. Ses réponses sont assez laconiques. Il explique qu'il est scolarisé au Centre scolaire Saint-Marc (il existe un établissement d'enseignement privé sous tutelle jésuite regroupant des écoles primaires, des collèges et des lycées portant ce nom à Lyon). Pour Nicolas, tout s'est toujours bien passé à l'école.
Sa mère ne partage pas son avis. Elle cite les fausses excuses qui ont été invoquées par certains établissements scolaires pour refuser son fils (problème d'escaliers, d'effectifs trop nombreux, etc.)
La question que pose ensuite la voix off à l'enfant est extrêmement directe voire choquante quand on sait que Nicolas n'a que 11 ans ː "Qu'est-ce qui permettrait aux gens (...) de ne pas avoir peur de toi ?" Cet entretien a dû être préparé et/ou Nicolas fait preuve d'une grande maturité car il répond ː "Qu'ils se rendent compte qu'il y a des handicapés et qu'ils peuvent faire comme eux... Mais en moins détaillé." Il donne l'exemple de l'écriture qu'il maîtrise. Pendant qu'il continue à parler, plan rapide sur Raphaëlle et sa mère dans la rue. Retour sur Nicolas en train de lire un magazine qu'il a posé sur son genou et qu'il tient des deux mains.
Intervention de Mme Bouttier, déléguée départementale à l'intégration. Elle rappelle que l'intégration des enfants handicapés dans les écoles ordinaires dépend de la bonne volonté des enseignants à qui il faudrait pouvoir donner "quelque chose" en échange. De quoi parle-t-elle ?
Intervention de M. Jouffrey, directeur adjoint de l'enseignement catholique, qui apporte une réponse à la question précédente. Les enseignants ont besoin d'être formés pour intégrer des enfants handicapés dans leur classe. Même si l'enseignement est pour eux une vocation et qu'ils ont un "savoir être", il faut les aider à acquérir un "savoir faire". Cette réponse révèle en creux l'une des failles de l'intégration en France.
Retour sur Mme Bouttier qui évoque les classes trop chargées comme frein à l'intégration et demande que les enseignants puissent collaborer non seulement avec les familles mais aussi avec les soignants, ce qui nécessite de résoudre des problèmes d'emploi du temps ː comment décharger un enseignant ou prendre en compte les heures supplémentaires qu'il effectue quand il participe à des réunions de synthèse avec une équipe médico-sociale, par exemple ?
On notera que ces demandes sont exprimées pour les enseignants mais que le documentaire ne donne pas directement la parole à un enseignant "sur le terrain".
Intervention de Mme Baton, directrice d'un SESSAD. Elle souligne que les parents ont besoin d'espaces de parole sur le handicap et de professionnels qui fassent le lien avec l'école. Le documentaire reste néanmoins silencieux sur les modalités de ce lien et le type de professionnels qui pourraient s'en charger. (07'07)
Ayrald
Vue d'ensemble sur une classe puis zoom sur un élève en particulier. Son port de tête et ses gestes donnent à penser qu'il présente un handicap moteur, peut-être une infirmité motrice cérébrale. Hors champ, M. Maudry, instituteur, évoque les bénéfices de l'intégration scolaire, à la fois pour l'enfant handicapé et pour ses camarades. Ensuite, M. Vernay, directeur d'école privée, parle de la distance qu'il faut garder dans un projet d'intégration ː distance par rapport à son propre souhait (parfois irréaliste) d'accueillir l'enfant, distance par rapport à ses propres émotions telles qu'elles sont suscitées par le travail avec un enfant handicapé, distance par rapport aux familles, à leur inquiétude et à la pression qu'elles peuvent exercer sur l'équipe pédagogique. (08'55)
Le bémol
Plan de transition sur une cour de récréation. Intervention de Mme Ferrere, professeur (de quelle matière ?) Elle intervient manifestement dans une classe pour enfants sourds intégrée dans un collège ordinaire (plan sur des adolescentes qui signent à toute vitesse). Pour elle, il s'agit d'une "soi-disant intégration" car la récréation est le seul moment où ses élèves sourds et les élèves entendants peuvent se rencontrer et que rien ne se passe vraiment à ce moment-là. Pour elle, les sourds sont forcés d'aller vers les entendants (elle pense probablement à toutes les situations de la vie quotidienne en société) mais elle regrette que le chemin inverse ne se fasse pas. En même temps, on voit Ayrald en fauteuil roulant jouer avec des copains dans une cour de récréation.
Retour sur Ayrald
Dans toutes ses réponses à la personne qui l'interroge, Ayrald insiste sur la nécessité d'être et de faire "comme les autres", sinon "on ne vit plus". Pour lui, "il ne faut pas être exclu, il faut être dedans." Le mot "différent" le fait réagir vivement. Pour lui, la différence n'est pas compatible avec le fait d'être "dedans".
Intervention des parents d'Ayrald qui soulignent qu'il a toujours eu le souhait d'être comme les autres, malgré son fauteuil roulant, et qu'ils se sentent obligés de le suivre dans cette voie. Le père admet que c'est une façon d'échapper à la question du handicap.
Plan sur Ayrald en train de taper lentement sur le clavier d'un ordinateur. La voix off lui demande s'il envisage d'entrer dans un établissement spécialisé. Sa réponse est catégorique. Il n'en est pas question parce que là-bas "ils n'apprennent presque rien". Pour ses parents, un conflit avec leur fils s'annonce. Ils semblent dire qu'il ne va pas pouvoir rester dans un circuit scolaire ordinaire mais ils ne sont pas assez précis pour qu'on comprenne pourquoi. Ils avouent qu'il est difficile de le "porter", physiquement et moralement, et qu'il fait appel à eux en permanence.
Séquence montrant Ayrald qui sort de son appartement en poussant un déambulateur. Sa mère l'aide un peu. Il va prendre l'ascenseur. Interrogé hors caméra sur ses projets d'avenir, il répond qu'il aimerait devenir informaticien. (13'12)
Les limites de l'intégration
Une voix féminine hors champ (Mme Baton ?) répond à la question soulevée par le père d'Ayrald concernant le passage d'une école ordinaire à un établissement spécialisé en disant que cela devrait faire partie de l'évolution de l'enfant, sans qu'il le prenne comme un échec ou une source de conflit. Images de l'Ancilevienne, course de relais par deux d'une longueur de 46 km autour du lac d'Annecy. Des hommes valides courent d'un côté tandis que des jeunes en fauteuil roulant ou divers autres véhicules concourent en autonomie ou poussés par des camarades valides.
Plan sur des toits de maison, comme au début du film. Le jour s'est levé.

Notes complémentaires

Références et documents externes

'Lino Ventura à propos des mentalités face au Handicap' Antenne 2 Midi, 16 oct. 1979, sur ina.fr.
"Déclaration de Salamanque & Cadre d’action pour l’éducation et les besoins spéciaux. UNESCO 1994 – ED-94/WS/18. (Reproduit par Daniel Calin.)
"Scolarisation des enfants handicapés - 10e législature - question et réponse", senat.fr, en ligne.
Beaucher, Hélène, La scolarisation des élèves en situation de handicap en Europe Centre international d'études pédagogiques, 2012, en ligne.
Bonneton-Botté, Nathalie, Programme du Master MEEF - Parcours «Handicap, difficulté et grande difficulté scolaire» 2015-2016, ESPE de Bretagne, en ligne.
Courtault, Michel. « Note sur la scolarisation des enfants handicapés », Pour, 195/3, 2007, pp. 30-36, en ligne.

Pour plus d'information sur L'Ancilevienne, voir leur site web.

Contributeurs

  • Auteurs de la fiche : Élisabeth Fuchs, Thomas Berthol