La mission Jamot au Cameroun (1926-1932) (1930)

De Medfilm



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Titre :
La mission Jamot au Cameroun (1926-1932)
Année de production :
Pays de production :
Réalisation :
Conseil scientifique :
Durée :
16 minutes
Format :
Parlant - Couleur - 16 mm
Langues d'origine :
Sous-titrage et transcription :
Sociétés de production :
Commanditaires :
Archives détentrices :

Générique principal

LA SOCIETE PARISIENNE D’EXPANSION CHIMIQUE
Marque RHONE Specia POULENC (uplr) présente
LA MISSION JAMOT AU CAMEROUN (1926-1932)
Version sonorisée d’un film original et unique, tourné au CAMEROUN par CHAUMEL- GENTIL et Jehan FOUQUET et projeté au THEATRE DES CHAMPS ELYSEES, à Paris, le 19 mai 1930.
Une production CITHER
Texte et scénario du docteur de MARQUEISSAC Par décret ministériel, signé Léon PERRIER, fut créée, à PARIS, le 8 juillet 1926, dans les Territoires du CAMEROUN, placé sous le MANDAT DE LA FRANCE : LA MISSION PERMANENTE DE PROPHYLAXIE DE LA MALADIE DU SOMMEIL
Le Chef de cette mission fut le Docteur JAMOT, médecin-commandant, assisté de dix médecins, vingt agents sanitaires européens et de cent cinquante infirmiers africains
En trois années, grâce au travail effectué par cette mission médicale autonome, la MALADIE DU SOMMEIL, qui menaçait gravement l’avenir démographique des riches régions du Centre-Cameroun, était maîtrisée.

Contenus

Sujet

Présentation de la mission médicale du professeur Jamot au Cameroun, alors colonie française. Le but de cette mission était de soigner du mieux possible la population camerounaise face à la maladie du sommeil.

Genre dominant

Documentaire

Résumé

Le Cameroun, alors colonie française, est en proie à une épidémie dévastatrice de la maladie du sommeil. Une mission française, la mission Jamot qui commence en 1926, met au point des méthodes de dépistage, intervention nécessaire pour rétablir la situation sanitaire. Ses méthodes sont rigoureuses et leurs effets bénéfiques. La coopération entre les deux populations en jeu sont sans cesse soulignées, de même la supériorité de la médecine française sur celle du concurrent allemand. Enfin ce film contribue à l’apologie des colonies de l’Empire français, Alfred Chaumel parlant et filmant en colonialiste convaincu.

Contexte

Le Cameroun, terre coloniale

La colonisation allemande commence en 1884 avec la signature en juillet d'un traité entre les rois Bell et King Akwa et les représentants de firmes hambourgeoises, Johanness Vogt, représentant de la firme Jantsen and Thormälen et Edward S., représentant de la firme Woermann (cf Saïd Sélassié, mémoire de master en histoire). Le protectorat s'étend du lac Tchad au nord aux rives de la Sangha au sud-est. La ville de Buéa au pied du mont Cameroun en devient la capitale avant d'être destituée au profit de Douala en 1908. En 1911, un accord franco-allemand étend les possessions allemandes à certains territoires de l'Afrique Équatoriale française. De grandes compagnies commerciales allemandes (Woermann, Jantzen und Thoermalen) et compagnies concessionnaires (Sudkamerun Gesellschaft, Nord-West Kamerun Gesellschaft) se sont implantées dans la colonie.

Après la Première Guerre mondiale, pendant laquelle le Cameroun est conquis par les forces franco-britanniques, la colonie allemande est partagée en deux territoires confiés à la France (pour les quatre-cinquièmes), et le restant au Royaume-Uni par des mandats de la Société des Nations (SDN) en 1922. L'administration française, réticente à rétrocéder aux compagnies allemandes leurs possessions d'avant guerre, en réattribue certaines à des compagnies françaises. C'est notamment le cas pour la Société financière des caoutchoucs, qui obtient des plantations mises en exploitation pendant la période allemande et devient la plus grande entreprise du Cameroun sous mandat français. Des routes sont construites pour relier les principales villes entre elles, ainsi que diverses infrastructures telles que ponts et aéroports. La ligne de chemin de fer Douala-Yaoundé, commencée sous le régime allemand, est achevée. Des milliers d'ouvriers sont déportés de force vers ce chantier pour y travailler cinquante-quatre heures par semaine. Les ouvriers souffrent également du manque de nourriture et de la présence massive de moustiques. En 1925, le taux de mortalité sur le chantier s'élève à 61,7 %.

Le film, s’inscrit dans la controverse qui opposait depuis plusieurs années Français et Allemands quant aux méthodes prophylactiques adoptées par la France depuis l’instauration de son mandat au Cameroun (l’Allemagne ayant perdu le Cameroun à la suite de sa défaite lors de la Première Guerre Mondiale).

Alfred Chaumel et le cinéma colonial

Alfred Chaumel a tourné des images sur le continent africain qui lui ont permis d'aboutir à plusieurs documentaires. En 1930, sur l’Algérie, à l’occasion du centenaire de l’Algérie française, puis, au moins deux documentaires sur la maladie du sommeil qui sévit au Cameroun. L’un muet, plutôt destiné aux spécialistes et le second, le réveil d’une race, sonore, destiné au grand public et aux écoles. Difficile de savoir si le film étudié est l’un ou l’autre ou si c’est un mélange des deux. Quoi qu’il en soit, tout porte à croire que ce film centré sur la mission Jamot fut diffusé ultérieurement. On sait toutefois qu’il a été diffusé dans une version muette à Paris en 1930. Les deux films cités plus haut ont, quant à eux, été diffusés en 1931 à l’exposition coloniale de Vincennes. Le second étant rediffusé en 1933 à Paris et dans différentes écoles. Les diffusions étaient assurées par des camions de visionnage ou alors dans les cinémas dont le développement était en plein essor à l’époque. Le but étant de familiariser la population et la jeunesse à l’idée d’un Empire colonial français. Qu’il travaille sur l’esthétique de l’ailleurs ou sur l’appel à la sensibilité, voire à la pitié, le documentaire colonial exaltait le sentiment d’appartenance à l’Empire. La mission Jamot débute en 1926, le pic de son action se situe en 1927-1928. Lors de la diffusion de ces films documentaires, le docteur Jamot était dans la tourmente. Alors qu’il paraissait être en route pour le prix Nobel, une enquête est ouverte à l’encontre du docteur Jamot, suite à un surdosage prescrit par un de ses médecins au Cameroun. La réputation du docteur Jamot n’y survivra pas et ce dernier mourut en 1937 d’une attaque cérébrale. Alfred Chaumel, colonialiste convaincu et admirateur de ces personnages pionniers du monde colonial comme le docteur Jamot, tente à travers ses documentaires, de rétablir la figure de Jamot.

Éléments structurants du film

  • Images de reportage : Oui.
  • Images en plateau : Non.
  • Images d'archives : Non.
  • Séquences d'animation : Non.
  • Cartons : Oui.
  • Animateur : Non.
  • Voix off : Oui.
  • Interview : Non.
  • Musique et bruitages : Non.
  • Images communes avec d'autres films : Non.

Comment le film dirige-t-il le regard du spectateur ?

La première mention de la Mission Jamot est à 02:40. Le préambule, insistant sur les ravages de la Maladie du sommeil, sert à en montrer la nécessité. D'une part secourir la population, d'autre part, selon une idée colonialiste, restaurer la capacité de production en matières premières de la colonie pour le bénéfice de la métropole. Ce préambule sert aussi à mettre ces ravages sur le compte du premier colon, l'Allemagne. Ainsi, avec l’idée de la mission et de sa réussite, ce dernier est amené à se dire que le Cameroun se porte mieux depuis la présence française.

Le film comporte des images tournées pour le compte des personnels médicaux, en particulier les plans sur les techniques et les méthodes de soins et de dépistages. Le film a été adapté pour le grand public avec notamment l’ajout d’une bande sonore.

Comment la santé et la médecine sont-elles présentées ?

La méthodologie de l'intervention française en dépistage est présentée comme un modèle pour éradiquer le fléau de la maladie du sommeil au Cameroun.

Diffusion et réception

Où le film est-il projeté ?

Le film a été projeté la première fois au Théâtre des Champs-Elysées le 19 mai 1930 dans une version muette. La bande son est ajoutée par la suite pour cette diffusion ayant eu lieu en 1931 ou plus tard.

Communications et événements associés au film

Exposition coloniale de Vincennes en 1931.

Public

tout public

Audience

Descriptif libre

Préambule : une intervention nécessaire

La scène d’ouverture nous montre des corps squelettiques de malades. Il s’agit d’appuyer la situation dramatique du Cameroun face à la maladie du sommeil avant la mission Jamot. Le plan est fixe. S’ensuit l’apparition à l’image d’une carte permettant à la population de localiser le Cameroun. En effet, pour la population, les colonies ne sont souvent qu’une destination lointaine et exotique. La promotion des films coloniaux doit permettre une meilleure connaissance des colonies et vise à développer une fierté de ces dernières. Avec l’apparition de la carte, des chiffres sont donnés pour rappeler la gravité de la situation sanitaire au Cameroun avant 1926 et le début de la mission Jamot. Sur des paysages camerounais, le commentaire précise les facteurs de contamination rapides (les pirogues et la mouche tsé-tsé). Les plans des paysages sont fixes et la mouche apparaît en gros plan derrière une vitre de microscope. En plan large, on nous montre l’afflux de populations malades voulant se faire soigner dans les rares dispensaires de la région. (02:37)

La mission Jamot

Présentation des préconisations du docteur Jamot pour dépister au mieux la maladie (issues d’un témoignage de 1920). Son visage est en arrière-plan puis zoomé. Un médecin blanc marque les malades. Les tests au microscope sont effectués par des médecins ou infirmiers camerounais. Le médecin français n’est là que pour contrôler. En gros plan, le microscope au travail, puis les malades regroupés et exemptés de travail et d’impôts. Au moment où le commentaire évoque le début de la mission, en plan large, on peut à nouveau voir le paysage mais cette fois-ci le réalisateur insiste sur les installations médicales et modernes installées à Ayos. C’est ici que l’on décide d’installer le centre des soins de la mission. Dans le plan qui suit, on se rapproche des baraquements. On y voit une grande population camerounaise. Le plan s’effectue cette fois-ci de gauche à droite. Vu la rigidité du mouvement et son côté robotique, on peut penser à un plan panoramique d’une caméra sur pied. La voix off nous explique ensuite que des Camerounais sont formés sur place afin d’effectuer les dépistages et qu’ils étaient trop peu nombreux en 1925 avant le début de la mission. D’où la nécessité d’une mission permanente française. L’accent est sans cesse mis sur la nécessité de cette dernière. On peut voir ici que le réalisateur et le docteur chargé du scénario tentent d’insister sur le fait que l’intervention de la France était inéluctable afin de rétablir la situation. Le colonialisme est ici vu comme un objet nécessaire et ce, afin de sauver des populations jugées incapables de le faire elles-mêmes. (04:00)

Montrer la maladie, montrer les malades

En plan large, afflux de Camerounais venant se faire dépister à Ayos. Séquence d'explication de la maladie du sommeil avec des plans de malades, dirigés par une main qui entre dans le champ, pour illustrer ses différents symptômes. (09:52) Séquence sur le rôle de supervision de la mission par des médecins français originaires de la métropole. Sur un plan large d’Ayos, exposé sur la logistique de la mission Jamot. Après quatre mois de formation à Ayos, les médecins se rendent de village en village afin de mettre en place des laboratoires mobiles. La mise en scène insiste sur la coopération et le bon accueil de la population locale puis sur la rigueur de travail des infirmiers camerounais préalablement formés au centre de Ayos. Une séquence montre un infirmier camerounais manipulant son microscope.

Mise en oeuvre et supervision

Arrivée de malades venant se faire dépister. Ils sont triés par une marque à la craie par le médecin-chef. Différents infirmiers travaillent devant leur microscope avec un suivi effectué par un médecin français. Ensuite, les malades passent devant un personnel qui s'occupe de l’enregistrement des cas puis, ils rejoignent leur village. Le chef local de chaque village lance un appel à la population pour l'appeler à coopérer.

Plan fixe sur un médecin : il valide le traitement pendant que les infirmiers travaillent à côté pour lui. Sur le fond d’une carte du Cameroun en arrière-plan, indication des chiffres positifs de l’intervention française. Plan du docteur Jamot et de ses équipes sous un porche de bâtiment : ils sourient, confirmant en quelque sorte le caractère positif de ce premier bilan. Une musique entraînante renforce le message. (15:15)

La musique se poursuit sur un plan panoramique montrant un paysage fluvial en eau calme. Symbole de la quiétude revenue au sein du peuple camerounais, et ceci grâce à l’intervention française, comme l'affirme le commentaire.

Notes complémentaires

Références et documents externes

Bonah, Christian, Laukötter, Anja (eds.), Body, Capital and Screens. Visual Media and the Healthy Self in the 20th Century, Amsterdam, Amsterdam University Press, 2020.
Pastre Béatrice, « Cinéma éducateur et propagande coloniale à Paris au début des années 1930 », Revue d’histoire moderne & contemporaine, 2004/4 (n° 51-4), p. 135- 151. URL : https://www.cairn.info/revue-d-histoire-moderne-et-contemporaine-2004- 4-page-135.htm

Milleliri Jean-Marie, Bull Soc Pathol Exot, 2004, 97, 3, 213-222 213 Cet article relate l'œuvre du Docteur Eugène Jamot (1879-1937), médecin militaire français, qui consacra 25 ans de sa vie à la lutte contre la maladie du sommeil en Afrique.

Lachenal Guillaume, « Le médecin qui voulut être roi. Médecine coloniale et utopie au Cameroun », Annales. Histoire, Sciences Sociales, 2010/1 (65e année), p. 121-156. URL : https://www.cairn.info/revue-annales-2010-1-page-121.htm

Contributeurs

  • Auteurs de la fiche : Arègue Reihanian-Hadany, Maxime Diebold