Images du monde visionnaire (1963)

De Medfilm



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Titre :
Images du monde visionnaire
Série :
Année de production :
Pays de production :
Réalisation :
Conseil scientifique :
Durée :
34 minutes
Format :
Parlant - Couleur - 16 mm
Langues d'origine :
Sous-titrage et transcription :
Sociétés de production :
Commanditaires :
Archives détentrices :

Générique principal

Contenus

Thèmes médicaux

Sujet

Les effets hallucinogènes de la mescaline et du haschich.

Genre dominant

Documentaire

Résumé

Le film présente diverses altérations perceptives et visuelles qui peuvent être provoquées par différents hallucinogènes, ici la mescaline puis le haschich. Reprenant les travaux du poète Henri Michaux sur le « monde visionnaire » (Misérable miracle (1956), Paix dans les brisements (1959), L'infini turbulent (1957), Connaissance par les gouffres (1961)), le film montre les types d'images qui apparaissent, disparaissent, se créent sous l'action de ces deux substances. Mais il s'insère surtout dans le cadre d'un projet scientifique visant à rendre compte d'expériences sur des substances hallucinogènes, permettant de mieux comprendre les psychoses. Les états hallucinatoires provoqués par certains psychotiques sont montrés comme analogues voir identiques à certaines pathologies psychiques.

Contexte

Images du monde visionnaire est intégré dans la série Hallucinations. Diffusé dans les salles d'Art et Essai en 1967, Hallucinations regroupe quatre courts métrages signés Eric Duvivier, à thématique psychiatrique et puisant dans l'iconographie artistique d'avant-garde. Les autres films sont : La perception et l'imaginaire (1964), Concerto mécanique pour la folie (1963) et La femme 100 têtes (1967).

Éléments structurants du film

  • Images de reportage : Non.
  • Images en plateau : Non.
  • Images d'archives : Non.
  • Séquences d'animation : Oui.
  • Cartons : Oui.
  • Animateur : Non.
  • Voix off : Oui.
  • Interview : Non.
  • Musique et bruitages : Oui.
  • Images communes avec d'autres films : Non.

Comment le film dirige-t-il le regard du spectateur ?

Le texte du début présente les aspirations scientifiques et médicales de ce film ; les commentaires de Henri Michaux rendent compte de sa déception quant au rendu des images. Les raccords brusques, les enchaînements rapides (voir instantanés), les sons perçants laissent cependant une impression d'étourdissement.

Comment la santé et la médecine sont-elles présentées ?

Santé et médecine ne sont pas directement représentées, l'enjeu est de permettre au médecin de visualiser un état mental sous influence.

Diffusion et réception

Où le film est-il projeté ?

Circuit médical

Communications et événements associés au film

Le film a été présenté en 1963 à une audience composée de médecins, sous l'intervention du Professeur Jean Delay ; puis projeté en 1965 à la Cinémathèque française (Paris), puis censuré brièvement, car il allait contre la volonté des pouvoirs publics en incitant la consommation de drogues illicites amenant à la dépendance. Il a été par ailleurs diffusé dans les salles d'exploitants avec les autres films de la série Hallucinations (voir la rubrique "contexte").

Public

Corps médical

Audience

Descriptif libre

Le sujet est présenté comme une expérience scientifique par un texte en début de film. Un préambule de Henri Michaux (lu en off) présente le film en général, met en garde sur l'insuffisance des images, pose un lien entre celles-ci et celles rapportées par des malades et établit une différence entre les deux types d'images présentées. Le film se construit en deux parties, chacune présentée par un commentaire de l'auteur (en hors-champ).
Logo Sandoz. Le carton (texte en bleu clair sur fond noir) présente le film et ses aspirations médicales (le professeur Jean Delay est présenté comme le garant de la bonne démarche scientifique) :
« Avec une extraordinaire lucidité et une incroyable précision, Henri MICHAUX avait réussi à fixer dans sa mémoire telles ou telles images du monde visionnaire qui apparaissent sous telle ou telle substance hallucinogène. C'est la grande valeur scientifique de ces expériences qui a justifié la perspective médicale initiale de cette réalisation d’Éric DUVIVIER. Le professeur Jean DELAY en 1963 présentait ce film au corps médical en expliquant que : « L'analogie ou l'identité de ces états expérimentaux, qui peuvent être produites et réduites en quelques heures, avec certains états d'aliénation mentale, est à l'origine des recherches actuelles sur la pathologie biochimique des psychoses ». 

Préambule : les réticences de Henri Michaux

Un autre carton introduit le préambule de l'auteur (fond rouge orangé, écritures en noir, titre du film en rose majuscule) : « En préambule au film Images du Monde Visionnaire (un film de la cinémathèque Sandoz) Henri Michaux vous parle. »
Fondu noir. Le livre Misérable Miracle, posé sur une table, s'ouvre. Henri Michaux lit alors son préambule alors que la caméra balaye ses fameux dessins mescaliniens : « Lorsqu'on me proposa de faire un film sur les visions mescaliniennes, je déclarai et répétai et le répète encore que c'est entreprendre l'impossible. Quoi qu'on fasse, cette drogue est au-delà. Même d'un film supérieur, fait avec des moyens beaucoup plus importants, avec tout ce qu'il faut pour une réalisation exceptionnelle, je dirais encore de ces images et d'avance qu'elles sont insuffisantes. Elles devraient être plus éblouissantes, plus instables, plus subtiles, plus labiles, plus insaisissables, plus oscillantes, plus tremblantes, plus martyrisantes, plus fourmillantes, infiniment plus chargées, plus intensément belles, plus affreusement colorées, plus agressives, plus idiotes, plus étranges. Quant à la vitesse, elle est telle que toutes les séquences réunies devraient tenir en cinquante secondes. Là, le cinéma devient impuissant. D'autant qu'il faudrait toutes ces caractéristiques augmentées à la fois. Les images du film sont donc très assagies, ralenties, atténuées, simples indications des formation visuelle par lesquelles presque obligatoirement, si la dose prise est suffisante, l'imagination de celui qui se drogue passera, qu'il soit un génie de la vie intérieure ou un homme sans problèmes. On n'a pas tenté de représenter l'action générale, et en profondeur, sur une personnalité, film qui serait tout différent, mais les types d'images que l'on rencontre communément dans ces états. Elles suffiront a montrer à ceux que l'important problème des visions intéresse, combien celles-ci diffèrent de celles du rêve, et d'une certaine manière de celles provoquées par le haschich, et par où elles rejoignent celles que certains malades mentaux ont rapportées tant bien que mal. Voilà la justification de cette tentative. Avant il n'y avait rien, après on va pouvoir faire mieux. Quoi que les visions mescaliniennes passent ordinairement dans le plus absolu silence, ce n'est pas sans raison que la musique a été introduite dans cette partie ; elle y a un rôle. »
Fondu noir ; générique sur musique. Fond coloré (majorité de vert, avec orange et un peu de jaune, formes non identifiables) :
Sous mescaline
Fondu noir. Un plan serré présente un homme qui tient une fiole ; il regarde autour de lui. Un autre plan s'attarde sur un feu de cheminée. Des alternances de plans serrés sur l'homme et de différents plans (chaise à bascule qui bouge dans la pénombre du feu de cheminée, plante qui s'approche, fauteuil qui se floute et se déforme) témoignent du début des hallucinations. L'homme s'assoit avec peine dans le fauteuil, au coin du feu, qui devient abusivement rouge en même temps que tout le reste. Il place ses mains sur ses yeux ; les couleurs paraissent insoutenables. Les visions commencent. On voit une succession d'images pas vraiment identifiables, mais au milieu desquelles on peut reconnaître : le mot manuscrit « aveuglant » d'une écriture fébrile, le mot « intolérable » avec une typographie rappelant celle des cartons expressionnistes, une série de gants en latex, des petites vagues ou un bord de mer. Les images montrent ensuite des ensembles colorés et scintillants (comme des poussières ou des petits cristaux) certains prenant des formes qui rappellent les dessins mescaliniens d'Henri Michaux ; ces ensembles bougent, se transforment « incessamment en autre chose, jamais définitivement reconnaissable », sont « comme rongés de l'intérieur », font penser à un « cristal se formant, presque formé, mais qui, dans une imperceptible, mais rapide modification de sa microstructure forme un cristal différent ». Des objets sont multipliés, déformés, piégés dans un mouvement de floutage, foncièrement kaléidoscopique. La musique angoissante semble suivre ces mouvements, tantôt rapides et brusques, tantôt plus doux et lents. Visions sous mescaline pendant 14 minutes.
Sous haschich
(sous-titre et générique sur le même fond coloré que pour la partie I) :
Un nouveau plan montre le même homme ; caméra en plongée, plan serré. Un zoom arrière le montre allongé à terre. On le voit ensuite toujours allongé, mais au bord d'un canapé ; il semble étourdi et fatigué (ses mouvements sont lents et indécis) ; puis il rit. En même temps, on entend les explications d'Henri Michaux en hors-champ :
« Cependant que le sujet devient apathique, béat, hilare, ou agité, les images visionnaires l'envahissent, animées cette fois non d'un mouvement vibratoire, mais d'un mouvement entraînant. Ce qui est démesurément allongé, ce qui est exagérément haut, ce qui fuse, jaillit, se précipite, une animation extrême, folle, irréversible, présente ou toujours prête à se déclencher, de l'inattendu, du cocasse, de l'immense, du merveilleux, des corridors sans fin, des terrasses à perte de vue, des abîmes, des palais fabuleux, des métamorphoses incessantes, stupéfiantes, de l'insolite, surtout de l'insolite, voilà qui est du domaine du haschich. On y entend des rumeurs, de vraies voix parfois, quelques-uns des bruits qui se rapportent aux visions, pas constamment, pas strictement, souvent décalés. De même la musique, commençant juste, se nouant bientôt, pour finir en amalgames bouffons et étourdissants. Périodiquement tout s'arrête, son et lumière, ou l'un sans l'autre, comme ferait quelqu'un pour reprendre des forces. De ce fantastique défilé plus fugace encore qu'énigmatique, nous avons, par longs tâtonnements, reconstitué quelques parties, imparfaitement. »
Les images représentent ici des objets ou êtres reconnaissables, mais déformés ou dans d'étranges situations. On distingue ainsi un pont dans le brouillard d'un lever ou coucher de soleil, un homme se faisant couper la tête par un coup d'épée et de la fumée qui sort du cou en une longue traînée vers le haut pour retomber brutalement, cette même tête se retrouve alors posée sur un tapis volant (le tout un peu transparent) qui vole dans le ciel au-dessus de la cime des arbres ; le son est plus perçant. Des billes descendent rapidement un escalier (bruit de fracas). Une sphère en métal tourne autour de son axe et dévoile derrière des sortes de hublots différents objets (chapeaux, dessins de visages, animaux, maquette de cœur, etc.) : on voit d'abord les hublots puis un zoom arrière montre la sphère. Le son devient profond, déformé (comme un bruit d'échographie). On distingue des images d'oiseaux, un écoulement de lave, une personne étendue dans la boue, des mouvements rapides (rappelant des voies de circulation), une chute d'une falaise, une girafe, un coup de revolver dans une vitre, des mouvements de kaléidoscope, des images de nature (avec bruits d'oiseaux), une statue de monstre oriental, etc. Suivent des enchaînements d'images surréalistes ; succession d'images qui montrent des mouvements rapides suivis brusquement, sans raccords, d'images fixes ou de situations plus calmes (par exemple une autruche ou des montagnes). Tout devient inquiétant (musique et image d'église suivie de croassements de corbeaux et d'images d'une procession de funéraire étrange) : l'étrangeté se lie à l'impénétrable calme ; tout est inquiétant, rien n'est en paix. L'homme entre dans une cour de justice ; l'avocat change alternativement de têtes d'animaux vers une tête d'homme ; un membre du jury en colère est associé à des images de singe furieux ; le juge consulte deux squelettes à ses côtés. Deux jeunes filles tombent d'un escalier et sont devenues de vieilles femmes. Encore des images kaléidoscopes.
Fondu noir. FIN sur le même fond utilisé pour présenter les titres des parties.
Fonds Eric Duvivier code 176.

Notes complémentaires

Réfs au CIL : Cote 176 + dossier sur le film (affiche et brochure en français, préface et synopsis en anglais)
Au CERIMES : DVD n° 08475 (+ U-matic + BétaSP)

Références et documents externes

Dans le documentaire "Louis Dufay, a couleur et l'héliophore", réalisé par en 2015 par Edouard Hollande (Ananda Pictures), une séquence concerne la participation de Duvivier au tournage de L'enfer après que son réalisateur, Henri-Georges Clouzot, a pris connaissance de son usage de l'héliophore dans Images du monde visionnaire : https://vimeo.com/133017858

Contributeurs

  • Auteurs de la fiche : Caroline Ruebrecht, Joël Danet