Let there be light (1946)
Let there be light
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Title | Let there be light |
Year of production | 1946 |
Country of production | États-Unis |
Director(s) | John Huston |
Duration | 58 minutes |
Format | Parlant - Noir et blanc - 35 mm |
Original language(s) | English |
Subtitles and transcription | English |
Archive holder(s) | United States National Library of Medicine |
Main credits
Content
Medical themes
- Traumata. Injuries. Wounds
- Regressive and reparative processes
- Neural (nervous) disorders
- Various aspects of disease, patients and medical intervention
- Semeiology. Symptomatology. Signs and symptoms. Examination. Diagnosis. Propaedeutics
- Treatment
- Psychiatry. Pathological psychiatry. Psychopathology. Phrenopathies. Psychoses. Mental abnormality. Morbid mental states. Behavioural and emotional disturbances
Theme
Main genre
Synopsis
Context
Ce corpus comprend :
Combat Exhaustion (1943)
Introduction To Combat Fatigue (1944)
The Inside Story (1944)
The_N.P._Patient (1944)
Combat Fatigue Irritability (1945)
Insomnia (1945)
Assignment Home (1945)
Combat Fatigue Psychosomatic Disorders (1946)
Shades of grey (1948)
Combat Psychiatry - The Battalion Medical Officer (1954)
Combat Psychiatry - The Division Psychiatrist (1954)
Structuring elements of the film
- Reporting footage : Yes.
- Set footage : No.
- Archival footage : No.
- Animated sequences : No.
- Intertitles : Yes.
- Host : No.
- Voice-over : Yes.
- Interview : No.
- Music and sound effects : Yes.
- Images featured in other films : No.
How does the film direct the viewer’s attention?
Résolument optimiste, cette dynamique narrative s’attache à décrire l’évolution psychologique des soldats en filmant au plus près leurs visages, leurs paroles, leurs mouvements : lorsqu’ils racontent leur vécu au thérapeute, ils sont filmés de sorte à ce qu’ils occupent le centre de la composition visuelle du plan, souvent en gros plan. La caméra prend toujours soin d’articuler le son et l’image à la thématique abordée dans la conversation. Durant la première séance de narco-synthèse, le soignant demande au soldat « qui ne peut plus marcher » de se lever après le traitement : la caméra se focalise alors sur ses jambes, tandis qu’il effectue quelques pas sans l’aide du personnel (« alright, now walk out here, walk over the nurse all by yourself »). Enfin, lorsque le patient souffrant d’aphasie se met à parler normalement après l’injection d’amytal de sodium, la caméra se focalise longuement sur son visage en pleurs, puis maintient ce cadrage en gros plan lorsqu’il confie son vécu au soignant (« I can talk ! I can talk ! Ho god listen, I can talk ! »).
Nous remarquons que ce synchronisme est particulièrement sensible dans les moments forts du traitement des névroses, comme lorsque nous sont montrés les efforts de guérison des soldats , renforçant du même coup l’adhésion et l’empathie du spectateur. Il est intéressant aussi de noter comment la voix over invite à l’empathie en usant d’une forte dramatisation dans la description des patients (« These are the casualties of the spirit ») et de leurs troubles. Cette approche humaniste n’empêche pas le film de donner une image « objective » des névroses de guerre présentées comme une réalité dont il faut prendre acte, au même titre que les maladies somatiques (« physically ills often have psychic causes, just as emotional ills may have a heavy physical basis »).How are health and medicine portrayed?
Le psychiatre (le colonel Benjamin Simon, directeur de l’hôpital) est désigné comme un médecin de l’esprit qui pratique la psychothérapie à travers la cure par la parole, mais qui administre aussi à ses patients des médicaments pour les calmer ou les faire parler, le choc nerveux induisant des amnésies passagères que la narcothérapie permet de débloquer. Découvert au début des années 1930 le sodium amytal ou sodium penthotal permet de provoquer un état dans lequel le patient est plus relaxé et communicatif. Appelée aussi l’ivresse au pentothal ou l’hypnose chimique, cette substance agit comme une sorte de sérum de vérité induisant une relaxation du système nerveux central (mise en veille du cerveau), une hypotonie musculaire (ralentissements de mouvements) et une dépression respiratoire (ralentissements des mouvements respiratoires). Utilisé dans le contexte de conflits militaires pour obtenir des informations d’un sujet non consentant, comme les prisonniers des armées ennemies, la narcosynthèse est créditée dans le cinéma d’une efficacité magique puisqu’elle offre la possibilité de faire dire la vérité à des sujets qui la dissimulent ou qui l’ont oubliée suite à un choc nerveux. Dans la réalité, les études montrent que l’information obtenue sous l’effet de cette drogue chimique n’est pas fiable puisque le sujet interrogé mélange souvent faits réels et imaginaires, sans compter que chaque individu réagit différemment au produit selon sa sensibilité.
Les patients sont présentés comme des hommes meurtris par les horreurs de la guerre (« the names and the places are different, the circumstances are different. But through all the stories runs one thread – death and the fear of death »). Leur vie personnele est placée au cœur du récit, renforçant l’identification du spectateur grâce à un ensemble d’éléments familiers comme la visite de leurs proches.
Let There Be Light, dans sa dimension profondément humaine, accorde une place significative à la famille : les patients admis à l’hôpital Mason General ont le droit, avant leur première nuit, à de longs appels téléphoniques sans frais avec leurs proches (« after months and years of silence, familiar voices are heard once again »), tandis que la journée des visiteurs montre les soldats passant du temps avec des membres de la famille dans les jardins de l’hôpital.
Quant à la névrose de guerre, elle est présentée comme une maladie concrète, ayant des causes explicables et dont les symptômes peuvent être traités comme n’importe quelle autre maladie. On soulignera notamment la volonté du film de décrire les psychonévroses de guerre à travers un langage clair et accessible – par exemple pour la narco-synthèse : « the use of this drug serves a twofold purpose : like hypnosis, it is a shortcut to the unconscious, as a surgeon probes for a bullet. The psychiatrist explores a submerging regions of the mind attempting to locate and bring to the surface the emotional conflict which is the cause of the patients emotional distress »). Le recours aux analogies permet à la fois d’assurer la bonne transmission de l’information et de sensibiliser le public aux conséquences psychiques de la guerre .Broadcasting and reception
Where is the film screened?
La première projection de Let There Be Light a lieu dans le cadre privé de l’armée au Pentagone, séance à laquelle John Huston n’assiste pas. S’ensuit de nombreuses controverses au sein des autorités militaires, certains accusant le long métrage de faire de la propagande pacifiste, en cherchant, entre autres, à décourager de potentielles nouvelles recrues. L’armée choisit d’annuler l’avant-première publique initialement planifiée au Musée d’Art Moderne de New York et interdit ensuite toute exploitation publique du film de John Huston . Malgré les protestations pour lever l’interdiction de diffusion du film, la censure durera trente-cinq ans, durant lesquelles quelques rares projections privées seront données devant des associations de santé mentale , toujours dans le cadre strictement privé de l’armée.
Les raisons d’une telle censure restent encore aujourd’hui sujet à discussion, d’autant plus que John Huston répond parfaitement à la commande qui consistait à faire un film de propagande au bénéfice de l’armée. Si l’effet potentiellement démoralisateur sur les futures recrues est un argument récurrent dans la littérature critique et académique, à celui-ci s’en ajoute d’autres : l’armée aurait voulu préserver l’identité des personnes filmées, alors que Huston avait obtenu d’elles leur accord signé (mais ces documents semblent avoir mystérieusement disparus au moment où le cinéaste se défend d’avoir commis une faute éthique) (voir Edgerton) ; le film mettrait trop frontalement en question le mythe du soldat américain, fort et viril ; il développerait un discours contradictoire, partagé entre célébration de la psychiatrie moderne et mise en évidence de la fragilité des soldats, entre efficacité d’une cure-éclair de huit semaines et insistance sur la longévité nécessaire du processus de guérison (voir Köhne). Selon Richard Ledes, les choses sont encore plus complexes : la conception essentiellement psychique du trauma défendue par le film – qui se réfère à la théorie freudienne selon laquelle, derrière une névrose de guerre se cache un trauma personnel plus profond, lié à la vie affective et sexuelle – ne correspond pas au modèle de trauma que la nouvelle psychiatrie psychanalytique souhaite promouvoir après la guerre. Soucieux d’acclimater les préceptes psychanalytiques à la culture américaine d’après-guerre, les psychiatres américains défendent une conception sociale et environnementale des troubles psychiques. Leur pragmatisme les pousse en effet à mettre l’accent davantage sur les causes extérieures du trauma que sur les conflits psychiques internes à l’individu, l’enjeu consistant à maintenir le paradigme de l’intégration, de la réconciliation et de l’adaptation sociale qui sera au cœur de la psychologie du moi des années 1950.Presentations and events associated with the film
Peu avant la censure, l’armée américaine autorise l’utilisation des plans du film en guise d’illustrations pour un article traitant du syndrome « d’épuisement au combat » paru dans la revue Life Magazine, le 29 septembre 1945.
Début 1947, compte tenu les controverses suscitées par la décision de censure, l’armée américaine passe commande, auprès du cinéaste Joseph Henabery, d’un remake de Let There Be Light basé en grande partie sur les dialogues et les situations du documentaire original, mais entièrement joué par des acteurs. Sorti en 1948, le long métrage intitulé Shades of Grey traite toujours du sujet des psychonévroses, mais selon une perspective idéaliste qui sauvegarde l’intégrité du mythe du « guerrier ».
En 1962, l’anthologie du film de guerre et de paix de Robert Hugues obtient également la permission de publier des images du film, malgré l’interdiction de toute diffusion publique.
Sous l’impulsion de plusieurs personnalités d’Hollywood , la censure est levée en 1980 et la toute première projection publique du film a lieu le 16 janvier 1981, au théâtre Talia à New-York. La même année, Let There Be Light est présenté au Festival de Cannes dans la section spéciale Un certain regard. Cette dernière permet de mettre en lumière un cinéma moins conventionnel que celui sélectionné dans la section officielle.Audience
Local, national, or international audience
National
Description
De ce fait, l’existence de Shades of Grey réalisé en 1947 est sans doute l’explication la plus éloquente de la censure : entièrement fictionnalisé , le remake de Let There Be Light révèle, moins une volonté de l’armée de corriger les controverses, que d’orienter l’opinion publique vers une image plus flatteuse du soldat fragilisé par la guerre. Il s’agit donc de défendre des valeurs patriotiques, des intérêts politiques , ainsi que la réputation de l’armée dont l’héroïsme doit rester intact aux yeux des civils . Shade Of Grey s’emploie en effet à alimenter le mythe du guerrier à l’esprit indestructible, en présentant le champ de bataille comme un simple stimulus réveillant des peurs inhérentes à chaque homme. Le soldat traumatisé n’a plus alors qu’à s’en remettre au psychiatre qui bénéficie d’un pouvoir magique de guérison, ce qui permet au passage de mettre en exergue le caractère passager et remédiable de la névrose de guerre.
L’adaptation de Let There Be Light montre finalement comment le médium du cinéma devient le véhicule idéal pour promouvoir l’idéologie de la psychiatrie américaine, laquelle se préoccupe davantage de diffuser par ce biais les intérêts politiques et institutionnels de la branche de diffuser, que de livrer un savoir médical .
On peut regretter que l’intention initiale de John Huston n’ait pas toujours été comprise pusqu’il ne s’agissait pas pour lui de montrer la psychiatrie sous l’angle d’une science magique qui guérit chaque patient atteint de shell-shock. Il a cherché surtout à indiquer la possibilité « d’ouvrir le chemin » vers un diagnostic et un traitement adaptés, et ce grâce au développement de méthodes psychothérapeutiques à même de traiter les blessures mentales. Le ton du film est d’ailleurs à la prudence (la guérison est progressive, dit-il), même si l’aspect « miraculeux » des thérapies a fini par occulter cette importante nuance : « the fact that he walks now does not mean that his neurosis has been cured - That will require time but the way has been opened for the therapy to follow ».
Dans tous les cas, John Huston donne admirablement à voir ce qui sont les névroses de guerre, dont les premières études remontent aux nombreux cas cliniques entraînés par la Première Guerre mondiale et dont la psychiatrie moderne se saisit pour mettre au point de nouveaux traitements.Supplementary notes
Musique : Dimitri Tiomkins Photo : Stanley Cortez Voix off : Walter Huston (père de John Huston)
Sources
References and external documents
Lowy Vincent & Cantor David, Conversion Narratives, Health Films, and Hollywood Filmmakers of the 1930s and 1940s in Health Education Films in the Twentieth Century, edited by Christian Bonah, David Cantor and Anja Laukötter, University of Rochester Press, Rochester, 2018.
C. A. Morgan III, From Let there be light to Shades of Grey: the construction of authoritative knowledge about combat fatigue (1945-1948), in Signs of life, Cinema and Medicine, edited by Graeme Harper and Andrew Moor, Wallflower Press, London and New York, 2005, pp. ?
CROCQ, Louis, « La culpabilité du soldat occidental », Revue des Deux Mondes, mars 2011, pp. 129-148 [en ligne] : https://www.jstor.org/stable/44193025?seq=1#metadata_info_tab_contents
EDGERTON, Gary, « Revisiting the Recordings of Wars Past: Remembering the Documentary Trilogy of John Huston », in Gaylyn Studlar & David Desser (dir.), Reflections in a Male Eye. John Huston and the American Experience, Washington-Londres, Smithsonian, 1999, pp. 33-61.
KÖHNE, Julia Barbara, « Gegenläufige Erzählungen. Filmische Verfertigung individualer und kollektiver Heilung und ihre Subversion – LET THERE BE LIGHT (1945/6) von John Huston », Medizinhistorisches Journal, vol. 52, n°2/3, 2017, pp. 180-218.
LEDES, « Let There Be Light: John Huston’s Film and the concept of trauma in the United Sates after WWII », conférence donnée. Le 13 novembre 1998 dans le cadre de l’association psychanalytique Après-coup [pdf en ligne].
LOWE, Bryce, Let There Be Light, Library of Congress, 2012.
MCBRIDE, Joseph, « Casualties of the Spirit: Liberating John Huston’s Let There Be Light (1946) », Brightlightfilms, 11 juin 2017 [en ligne] : https://brightlightsfilm.com/casualties-spirit-liberating-let-there-be-light-john-huston-1946/?__cf_chl_captcha_tk__=pmd_h7JxQR9nOsM2bdylZjGATmfYecInUVm.opvHeRLcRW8-1635260395-0-gqNtZGzNA5CjcnBszQel#.YX gYAJrP02w
SIMMON, Scott, « Let There Be Light (1946) et its Restoration », Filmpreservation, 2012 [en ligne], URL : https://www.filmpreservation.org/
Contributors
- Record written by : Élisabeth Fuchs